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04/11/2021 | FRANCE | N°21LY02560

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 04 novembre 2021, 21LY02560


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 19 février 2021 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai, d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation, soit de lui délivrer le titre sollicité et de mettre

à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au tit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 19 février 2021 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai, d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation, soit de lui délivrer le titre sollicité et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2101617 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2021, Mme B..., représentée par Me Aldeguer, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2101617 du 22 juin 2021 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 février 2021 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jour et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation et de lui délivrer le titre sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- cette décision a été prise au terme d'une procédure irrégulière, rien n'indiquant que le médecin rapporteur de l'OFII n'a pas siégé avec ses confrères ;

- le préfet s'est cru lié par l'avis du collège de médecins ;

- la décision a été prise en méconnaissance des stipulations du 5) et du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de certificat de résidence ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Mme B... été régulièrement avertie du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pourny, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., ressortissante algérienne née le 24 mars 1967, est entrée en France le 15 mars 2016, sous couvert d'un visa court séjour valable jusqu'au 18 septembre 2016. Elle a sollicité, le 14 mai 2020 une demande de certificat de résidence au titre de la santé en application du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par un arrêté du 19 février 2021, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et lui a fixé un pays de destination. Par un jugement du 22 juin 2021, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ; (...) " et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, applicable aux ressortissants algériens en l'absence de stipulations de l'accord franco algérien traitant de la procédure de délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis (...) au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ". Selon l'article R. 313-23 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Isère s'est prononcé au vu d'un avis émis le 2 novembre 2020 par un collège de trois médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, nommément identifiés, qui s'est lui-même prononcé au vu d'un rapport médical, établi le 29 septembre 2020 par un médecin rapporteur, dont le nom figure également sur cet avis. Ce rapport a été transmis au collège de médecins le 30 septembre 2020 et il ne ressort pas des pièces du dossier que ce médecin rapporteur aurait siégé avec les trois médecins de ce collège. Ce moyen doit par suite être écarté.

5. Le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a conclu que l'état de santé de Mme B... nécessitait une prise en charge médicale, qu'un défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner pour elle de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle pouvait voyager vers son pays d'origine. Si le préfet de l'Isère a suivi cet avis, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait cru lié par l'appréciation de ce collège de médecins. Ce moyen doit également être écarté.

6. La circonstance que Mme B... bénéficie d'un suivi médical constant, conforté par un soutien familial en France, ne suffit pas à établir qu'un défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelles gravité et qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée dans son pays d'origine. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu les dispositions du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doit être écarté.

7. En deuxième lieu, Mme B..., célibataire et sans enfant à charge, entrée sur le territoire français à l'âge de 49 ans, y réside depuis moins de 5 ans à la date de la décision attaquée. Si elle se prévaut de la présence en France de cinq de ses sœurs et de sa mère, il ressort des pièces du dossier que sa mère fait également l'objet d'une mesure d'éloignement. En outre, elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où vivraient sa fille, mentionnée dans sa demande de première instance, et une autre de ses sœurs, mentionnée dans la décision attaquée. Dès lors, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de Mme B..., alors que cette dernière a vécu la majeure partie de son existence en Algérie, le préfet de l'Isère n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. En dernier lieu, compte tenu de l'état de santé et de la situation familiale de l'intéressée et eu égard aux conséquences de ce refus de titre de séjour sur la situation personnelle de la requérante, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Isère aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ne peut être retenu.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que Mme B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

10. En second lieu, si la requérante soutient que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, ce moyen peut être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les autres conclusions de la requête :

12. Les conclusions à fin d'annulation présentées pour Mme B... étant rejetées, les conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 novembre 2021

2

N° 21LY02560


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02560
Date de la décision : 04/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : ALDEGUER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-04;21ly02560 ?
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