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04/11/2021 | FRANCE | N°21LY01983

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 04 novembre 2021, 21LY01983


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 24 janvier 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer le titre sollicité ou à défaut de réexaminer sa situation et de mettre

la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 24 janvier 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer le titre sollicité ou à défaut de réexaminer sa situation et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2003279 du 12 mars 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 juin 2021, Mme A..., représentée par Me Prudhon, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2003279 du 12 mars 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions du 24 janvier 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, de lui délivrer le titre sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer durant ce réexamen un récépissé de demande de titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- la décision a été prise en méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- en ce qu'elle méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.

La demande d'aide juridictionnelle présentée pour Mme A... a été rejetée par une décision du 19 mai 2021 confirmée sur recours par une décision du 5 octobre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Mme A... a été régulièrement avertie du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pourny, président de chambre,

- et les observations de Me Prudhon, représentant Mme A....

Une note en délibéré a été présentée pour Mme A... le 8 octobre 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante algérienne née le 14 juillet 1992, est entrée en France le 12 novembre 2018 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 5 août 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en invoquant son état de santé. Par des décisions du 24 janvier 2020, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être reconduite d'office. Par un jugement du 12 mars 2021, dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...)7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ; (...) ".

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, applicable aux ressortissants algériens en l'absence de stipulations de l'accord franco-algérien traitant de la procédure de délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis (...) au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ". Selon l'article R. 313-23 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

4. En l'espèce, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a conclu le 26 novembre 2019 que l'état de santé de Mme A... nécessitait une prise en charge médicale, qu'un défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner pour elle de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle pouvait voyager vers son pays d'origine. La circonstance que Mme A... a déjà bénéficié d'un traitement à base de méthadone en France en 2014, que les symptômes de son addiction soient réapparus après son retour en Algérie et qu'elle bénéficie de nouveau d'un suivi médical constant en France, ne suffisent pas à établir qu'un défaut de prise en charge médicale pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée dans son pays d'origine. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu les dispositions du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doit être écarté.

5. En deuxième lieu, Mme A..., célibataire et sans enfant à charge, entrée sur le territoire français à l'âge de 25 ans, y réside depuis moins de 4 ans à la date de la décision attaquée. Elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où vit l'ensemble de sa famille. Compte tenu de l'état de santé et de la situation familiale de l'intéressée et eu égard aux conséquences de ce refus de titre de séjour sur la situation personnelle de la requérante, le moyen tiré de ce que le préfet du Rhône aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ne peut être retenu.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, le refus de titre de séjour n'étant pas entaché d'illégalité, l'obligation de quitter le territoire français ne saurait faire l'objet d'une annulation par voie de conséquence de l'illégalité de ce refus.

7. En second lieu, aux termes de de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ". Pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 4 et 5, les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français faite à Mme A... méconnaitrait les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision désignant le pays de destination :

8. D'une part, l'obligation de quitter le territoire français étant légale, la décision désignant le pays de renvoi ne saurait faire l'objet d'une annulation par voie de conséquence de l'illégalité de cette obligation. Cette dernière décision n'ayant été prise ni en application ni sur le fondement de la décision de refus de délivrance de titre de séjour, Mme A... ne saurait utilement invoquer l'illégalité de ce refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi.

9. D'autre part, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 1 'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". Si Mme A... se prévaut de ces stipulations en se bornant à faire valoir les risques que présenterait un retour dans son pays d'origine sur son état de santé, ce moyen peut être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

Sur les autres conclusions de la requête :

10. Les conclusions à fin d'annulation présentées pour Mme A... étant rejetées, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 novembre 2021

5

N° 21LY01983


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01983
Date de la décision : 04/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : PRUDHON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-04;21ly01983 ?
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