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04/11/2021 | FRANCE | N°21LY00174

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 04 novembre 2021, 21LY00174


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 25 août 2020 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation, soit de lui délivrer le titre sollicité et de mettre à la charge de

l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 25 août 2020 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai, d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation, soit de lui délivrer le titre sollicité et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2005468 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 janvier 2021, M. B..., représenté par Me Coutaz, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2005468 du 18 décembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 août 2020 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation et de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- sa situation relève des cas de régularisation prévus par la circulaire du 28 novembre 2012 ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pourny, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant algérien né le 1er janvier 1975, a présenté une demande d'asile le 6 septembre 2001, qui a été rejetée le 30 octobre 2003. Par un arrêté du 7 janvier 2004, l'intéressé a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire, puis d'une reconduite à la frontière, le 27 août 2004. Il est revenu en France en mars 2013, sous couvert d'un titre de séjour italien délivré le 14 juillet 2011. Il a sollicité, le 27 février 2014, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et s'est vu opposer une décision de rejet avec obligation de quitter le territoire français, le 31 décembre 2014. Par un jugement du 2 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le recours de M. B... présenté à l'encontre de ces décisions. L'intéressé a exécuté cette mesure d'éloignement puis il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien le 7 juin 2018, en qualité de travailleur. Par un arrêté du 25 août 2020, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 18 décembre 2020, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) ", aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".

3. En premier lieu, M. B... a vécu hors de France jusqu'à l'âge de 43 ans et y réside depuis moins de 8 ans à la date de la décision attaquée. S'il se prévaut de la présence en France de ses parents, de son frère, de sa femme et de leurs trois enfants, qui sont scolarisés en France, les deux premiers étant nés en Italie en 2011 et 2012 et le troisième étant né en France en 2019, il ressort des pièces du dossier que M. B... a séjourné 12 ans en Italie, où il dispose d'un titre de séjour longue durée, alors que sa résidence continue en France depuis l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français dont il a fait l'objet en 2014 n'est pas établie. Le requérant conserve des attaches familiales dans son pays d'origine, où résident ses deux frères et sa sœur. Par ailleurs, son épouse fait également l'objet d'une mesure d'éloignement. Enfin, il n'établit pas que ses enfants et son épouse ne pourraient pas le suivre dans son pays d'origine ou en Italie. Ainsi rien ne s'oppose à ce que sa cellule familiale se reconstitue hors de France et à ce que ses enfants poursuivent leur scolarité hors de France. Dès lors, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de M. B..., le préfet de l'Isère n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'arrêté litigieux a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales comme celui tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que le préfet aurait entaché ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation doit également être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ". Toutefois, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissant d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France, M. B... ne peut utilement invoquer le bénéfice de ces dispositions.

5. En troisième lieu, si les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3, le préfet de l'Isère n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle et professionnelle de M. B... en s'abstenant d'exercer son pouvoir discrétionnaire en vue de régulariser le séjour de l'intéressé en France.

6. Enfin, le requérant ne peut utilement se prévaloir des orientations générales contenues dans la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, laquelle est dépourvue de valeur règlementaire et ne contient aucune ligne directrice invocable.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par suite, les conclusions à fin d'annulation présentées pour M. B... étant rejetées, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 novembre 2021

3

N° 21LY00174


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00174
Date de la décision : 04/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : COUTAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-11-04;21ly00174 ?
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