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14/10/2021 | FRANCE | N°21LY01712

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 14 octobre 2021, 21LY01712


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 30 mars 2021 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2102365 du 29 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 29 mai 2021, Mme A..., représenté par Me Blanc, avocate, demand

e à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 30 mars 2021 par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2102365 du 29 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 29 mai 2021, Mme A..., représenté par Me Blanc, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 29 avril 2021 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le préfet a méconnu le droit à un entretien préalable prévu par l'article 5 du règlement 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le père de son enfant à naître ayant présenté une demande d'asile en France, le préfet a méconnu les dispositions des articles 7 et 10 du règlement 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le préfet a entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 juillet 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative aux réfugiés ;

- le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante guinéenne, née le 1er février 1999, déclare être entrée en France le 17 octobre 2020 et y a sollicité l'asile le 28 octobre suivant. La consultation du fichier européen Eurodac ayant fait apparaître que Mme A... avait été identifiée en Italie, où elle était entrée irrégulièrement, le 31 août 2020, les autorités françaises ont saisi les autorités italiennes d'une demande de prise en charge de l'intéressée sur le fondement de l'article 13 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 que ces autorités ont tacitement accepté. Mme A... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté pris le 30 mars 2021 à son encontre par le préfet du Rhône, décidant son transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. 2. L'entretien individuel peut ne pas avoir lieu lorsque: a) le demandeur a pris la fuite ; ou b) après avoir reçu les informations visées à l'article 4, le demandeur a déjà fourni par d'autres moyens les informations pertinentes pour déterminer l'État membre responsable. L'État membre qui se dispense de mener cet entretien donne au demandeur la possibilité de fournir toutes les autres informations pertinentes pour déterminer correctement l'État membre responsable avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ".

3. Il ressort des pièces du dossier et des mentions figurant sur le compte-rendu de l'entretien individuel mené avec l'intéressée que Mme A... a bénéficié d'un entretien individuel le 28 octobre 2020, en présence d'un interprète en langue soussou, que l'intéressée a déclaré comprendre, avec un agent du service de la préfecture de l'Isère, qui est un agent qualifié au sens du point 5 de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013. Ces dispositions n'exigent pas en outre que le résumé de l'entretien individuel mentionne l'identité et la qualité de l'agent qui l'a mené. Dès lors, la circonstance que ni le nom, ni la qualité, ni la signature de l'agent des services de la préfecture ne figure sur le compte rendu de l'entretien n'est pas de nature à démontrer que celui-ci n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. Il ressort par ailleurs du résumé dudit entretien que Mme A... a pu faire valoir à cette occasion toutes observations utiles. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. ". Aux termes du paragraphe 2 de l'article 7 du même règlement : " La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre ".

5. Aux termes de l'article 10 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 : " Si le demandeur a, dans un État membre, un membre de sa famille dont la demande de protection internationale présentée dans cet État membre n'a pas encore fait l'objet d'une première décision sur le fond, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale, à condition que les intéressés en aient exprimé le souhait par écrit ". Aux termes du g) de l'article 2 du même règlement : " (...) on entend par " membre de la famille ", dans la mesure où la famille existait déjà dans le pays d'origine, les membres suivants de la famille du demandeur présents sur le territoire des Etats membres : - le conjoint du demandeur, ou son ou sa partenaire non marié(e) engagé(e) dans une relation stable, lorsque le droit ou la pratique de l'Etat membre concerné réserve aux couples non mariés un traitement comparable à celui réservé aux couples mariés, en vertu de sa législation relative aux ressortissants de pays tiers ".

6. Si la requérante fait valoir que le père de son enfant à naître a présenté une demande d'asile en France, elle ne justifie pas plus en appel qu'en première instance qu'elle pouvait être considérée comme sa partenaire dans une relation stable au sens des dispositions précitées. Dès lors, son moyen tiré de ce que la décision ordonnant sa remise aux autorités italiennes aurait méconnu les articles 7 et 10 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ".

8. Si la requérante fait valoir qu'elle est enceinte, les documents qu'elle produit ne permettent pas d'établir que son état de grossesse ou son état de santé ferait obstacle à tout déplacement ou que le suivi de sa grossesse ne pourrait être effectué en Italie. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet du Rhône aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions de son conseil tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

Mme Dèche, présidente-assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2021.

2

N° 21LY01712

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01712
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-10-14;21ly01712 ?
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