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30/09/2021 | FRANCE | N°19LY04577

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 30 septembre 2021, 19LY04577


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 16 octobre 2019 par lesquelles le préfet de la Côte d'Or l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1902940 du 24 octobre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une re

quête enregistrée le 11 décembre 2019, M. B..., représenté par Me Ben Hadj Younes, avocat, demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 16 octobre 2019 par lesquelles le préfet de la Côte d'Or l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1902940 du 24 octobre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2019, M. B..., représenté par Me Ben Hadj Younes, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon du 24 octobre 2019 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or, à titre principal de lui délivrer un titre de séjour et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans le délai d'un mois, à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- alors qu'aucune décision, au sens de l'article R. 311-12 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile n'était encore intervenue au sujet de sa demande de titre de séjour, le préfet ne pouvait prendre de mesure d'éloignement sans commettre d'erreur de droit ;

- il est présent en France depuis huit ans, il est pleinement intégré à la société française et ses enfants sont scolarisés ; il ne peut retourner dans son pays d'origine où son épouse et lui-même craignent de faire l'objet de traitements inhumains et dégradants; le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a entaché sa mesure d'éloignement d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'interdiction de retour est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet n'a pas procédé à l'examen de sa situation particulière avant de l'assigner à résidence ;

- il ne présente aucun risque de fuite et le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 décembre 2019.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique - le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant kosovar, né le 16 février 1983, a déclaré être entré en France le 15 octobre 2011. L'asile lui a été refusé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 13 janvier 2012. Le 17 mars 2013, il a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Le réexamen de sa demande d'asile a été rejeté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 19 novembre 2013. Le 27 janvier 2014, il a fait l'objet d'un nouveau refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. A la suite d'une interpellation, le 29 juin 2017, il a fait l'objet d'une obligation de quitter sans délai le territoire français, avec interdiction de retour d'un an. La légalité de ces décisions a été confirmée par le tribunal administratif de Dijon, le 28 août 2017. Le 17 septembre 2018, à la suite d'une nouvelle interpellation, le préfet de la Côte-d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français durant deux ans. La légalité de ces décisions a été confirmée par le tribunal administratif de Dijon, le 21 septembre 2018, puis par la cour, le 4 mars 2019. Enfin, par décisions du 16 octobre 2019, le préfet de la Côte-d'Or lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'a assigné à résidence. M. B... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 16 octobre 2019.

Sur la régularité du jugement :

2. Contrairement à ce que soutient le requérant, le premier juge, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués devant lui, a suffisamment motivé sa réponse à l'ensemble des moyens soulevés en première instance.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ".

4. Si le requérant fait valoir qu'il avait déposé une demande de titre de séjour toujours en cours d'instruction à la date de la mesure d'éloignement en litige, le courrier du cabinet du préfet qu'il produit daté du 15 juillet 2019 qui se borne à indiquer qu'il sera informé " des suites données à cette affaire dans les meilleurs délais " ne suffit pas à établir que cette demande aurait été effectivement déposée et enregistrée. Ainsi, dès lors que M. B... avait déjà fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et qu'il ne peut être regardé comme ayant saisi le préfet d'une nouvelle demande de titre de séjour, c'est sans commettre d'erreur de droit, que le préfet a pu fonder l'obligation de quitter le territoire en litige sur le du 3° du I. de l'article L 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

6. M. B... fait valoir qu'il est présent en France depuis 2011, qu'il y réside avec son épouse et leurs quatre enfants qui sont scolarisés, et qu'il n'a plus de lien avec son pays d'origine. Toutefois, alors qu'il ne fait pas preuve d'une intégration particulière en France en dépit des attestations qu'il produit, le requérant qui ne peut utilement se prévaloir des risques encourus dans son pays d'origine à l'encontre de la décision en litige, n'établit pas qu'il existerait un obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue au Kosovo, pays dont son épouse qui fait aussi l'objet d'une mesure d'éloignement, a également la nationalité et où il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il soit dépourvu d'attaches familiales. En outre, sa durée de présence en France a été acquise au prix de la soustraction à quatre précédentes mesures d'éloignement, ainsi qu'il a été dit plus haut. Dès lors, compte tenu en particulier de ses conditions de séjour, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait, par suite, les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français serait dépourvue de base légale doit être écarté.

8. En second lieu, pour les motifs énoncés précédemment, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la légalité de la décision d'assignation à résidence :

9. En premier lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier, ni des termes de la décision en litige, que le préfet se serait abstenu de procéder à l'examen de la situation personnelle de M. B... avant de prendre la décision de l'assigner à résidence.

10. En second lieu, en se bornant à faire valoir qu'il ne présente pas de risque de fuite, le requérant n'établit pas que le préfet, en l'assignant à résidence, a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles de son conseil tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2021.

2

N° 19LY04577


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04577
Date de la décision : 30/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : BEN HADJ YOUNES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-09-30;19ly04577 ?
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