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30/09/2021 | FRANCE | N°19LY02474

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 30 septembre 2021, 19LY02474


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

1°) de condamner la commune de Châteaugay à lui verser la somme de 30 000 euros au titre des préjudices subis, assortie des intérêts moratoires à compter du 18 juillet 2018, ainsi que la capitalisation de ces intérêts ;

2°) d'enjoindre à la commune de Châteaugay, sous astreinte dont il plaira à la juridiction de fixer le montant et la date d'effet, de lui rembourser les frais médicaux engagés, dès lors qu'il b

néficie de la protection fonctionnelle.

Par une ordonnance n° 1900761 du 23 mai 2019, le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

1°) de condamner la commune de Châteaugay à lui verser la somme de 30 000 euros au titre des préjudices subis, assortie des intérêts moratoires à compter du 18 juillet 2018, ainsi que la capitalisation de ces intérêts ;

2°) d'enjoindre à la commune de Châteaugay, sous astreinte dont il plaira à la juridiction de fixer le montant et la date d'effet, de lui rembourser les frais médicaux engagés, dès lors qu'il bénéficie de la protection fonctionnelle.

Par une ordonnance n° 1900761 du 23 mai 2019, le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande en application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 27 juin 2019, M. A... B..., représenté par Me Duplessis, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 23 mai 2019 ;

2°) à titre principal, de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

3°) subsidiairement :

- d'annuler la décision implicite de rejet du 13 septembre 2018 et le cas échéant, la décision explicite de rejet du 7 septembre 2018 ;

- d'ordonner le remboursement par la commune de Châteaugay des frais médicaux exposés ;

- de condamner, sous astreinte, l'Etat à lui verser une indemnité de 30 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices subis du fait du harcèlement moral et de la discrimination dont il a été victime ;

4°) de mettre une somme de 1 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, qui a omis de faire application de l'article R. 421-5 du code de justice administrative rendant inopposable le délai de recours faute de mention des voies et délais de recours, a rejeté sa demande comme tardive ; ni la décision implicite ni le courrier du conseil de la commune n'ont fait courir le délai de recours contentieux ;

- s'agissant d'une requête indemnitaire, la prise en compte de la sécurité juridique est assurée par les règles de la prescription quadriennale ;

- il a été victime d'agissements répétés de harcèlement moral et de discrimination ; en dépit de la protection fonctionnelle qui lui a été accordée tardivement, l'inertie de la commune de Châteaugay pour mettre fin aux agissements de l'agent concerné constitue une faute de nature à engager sa responsabilité, de même que l'absence de prise en compte de son handicap ;

- sa maladie revêt un caractère professionnel et est imputable au service ; en refusant de reconnaître cette imputabilité, la commune a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- il convient d'ordonner le remboursement des frais médicaux exposés ;

- les graves agissements commis sur sa personne, qui compromettent définitivement son avenir professionnel, justifient l'allocation de dommages et intérêts à hauteur de 30 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2020, la commune de Châteaugay, représentée par Me Bonicel-Bonnefoi, conclut à titre principal à la confirmation de l'ordonnance attaquée, à titre subsidiaire, au rejet au fond de la requête, à titre infiniment subsidiaire, à ce que la condamnation prononcée soit limitée à la somme de 1 500 euros, et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge du requérant en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande était tardive ;

- à titre subsidiaire, elle n'a commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité du fait d'une prétendue abstention à faire cesser les faits de harcèlement moral dont le requérant a été victime : en lui accordant la protection fonctionnelle, elle a reconnu le harcèlement moral dont il a été victime et en a tiré les conséquences qui s'imposaient ; elle était dans l'impossibilité de prendre d'autres mesures du fait de l'absence du requérant sur son lieu de travail ; le refus de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie est définitif et n'est entaché d'aucune illégalité dès lors qu'elle ne disposait d'aucun élément susceptible d'établir avec certitude un lien de causalité entre le syndrome dépressif dont il dit souffrir et l'exécution du service notamment les relations avec certains de ses collègues ;

- les conclusions indemnitaires du requérant sont mal dirigées ;

- la somme demandée est injustifiée ; le préjudice moral subi par l'agent n'excède pas 1 500 euros ;

- la demande de condamnation de la commune au titre des frais médicaux constitue une demande d'injonction à titre principal, irrecevable ; ce chef de préjudice n'est pas justifié ; aucune condamnation ne saurait être prononcée postérieurement au 31 décembre 2016, date à laquelle l'intéressé a été transféré au sein des effectifs de la métropole.

Par ordonnance du 17 décembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Lambert pour la commune de Châteaugay ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... relève appel de l'ordonnance du 23 mai 2019 par laquelle le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté comme manifestement irrecevable, sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, sa demande tendant à la condamnation de la commune de Châteaugay à lui verser une indemnité de 30 000 euros.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. D'une part, aux termes du premier alinéa de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours ".

3. D'autre part, en vertu de l'article L. 112-2 du code des relations entre le public et l'administration, ne sont applicables aux relations entre l'administration et ses agents ni les dispositions de l'article L. 112-3 de ce code aux termes desquelles : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception ", ni celles de son article L. 112-6 qui dispose que : " les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis (...) ".

4. Enfin, l'article L. 231-4 du code des relations entre le public et l'administration prévoit que le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet dans les relations entre les autorités administratives et leurs agents.

5. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'en cas de naissance d'une décision implicite de rejet du fait du silence gardé par l'administration pendant la période de deux mois suivant la réception d'une demande, le délai de deux mois pour se pourvoir contre une telle décision implicite court dès sa naissance à l'encontre d'un agent public, alors même que l'administration n'a pas accusé réception de la demande de cet agent, les dispositions de l'article L. 112-3 du code des relations entre le public et l'administration n'étant pas applicables aux agents publics. Ce n'est qu'au cas où, dans le délai de deux mois ainsi décompté, l'auteur de la demande adressée à l'administration reçoit notification d'une décision expresse de rejet qu'il dispose alors, à compter de cette notification, d'un nouveau délai pour se pourvoir.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... a formé une demande indemnitaire préalable, reçue par la commune de Châteaugay le 13 juillet 2018, en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi en raison de ses fonctions.

7. Pour critiquer l'ordonnance attaquée qui a rejeté sa demande, enregistrée au greffe du tribunal le 15 avril 2019, comme tardive, M. A... B... invoque la méconnaissance de l'article R. 421-5 du code de justice administrative qui prévoit que les délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés dans la notification de la décision.

8. Toutefois, d'une part, ces dispositions, qui ne concernent que les décisions ayant fait l'objet d'une notification, n'étaient pas applicables à la décision implicite de rejet née le 13 septembre 2018 du silence gardé par l'administration sur sa demande préalable indemnitaire, d'autre part, aucune décision administrative n'a pu naître du seul envoi par le conseil de la commune de Châteaugay à son confrère, avocat de M. A... B..., du courrier du 7 septembre 2018 informant ce dernier des motifs de rejet de sa réclamation, dès lors que n'est pas jointe à ce courrier la décision de la personne publique elle-même.

9. Il résulte de ce qui précède que la circonstance dont se prévaut le requérant qu'il n'a pas été informé des voies et délais de recours est sans incidence sur l'opposabilité du délai de recours contentieux contre la décision implicite de rejet qui a couru dès sa naissance le 13 septembre 2018 et jusqu'au 14 novembre 2018, d'autre part, qu'aucune décision explicite de rejet intervenue dans ce délai n'est susceptible d'avoir ouvert un nouveau délai au profit de M. A... B....

10. M. A... B... ne peut utilement invoquer les règles de la prescription quadriennale, dont l'application suppose la recevabilité de l'action qui recherche la responsabilité de la personne publique.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable en raison de sa tardiveté.

Sur les conclusions à fin d'injonction et sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les conclusions à fin d'annulation de M. A... B... devant être rejetées, il s'ensuit que doivent l'être également, d'une part, ses conclusions à fin d'injonction, puisque le présent arrêt n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution, et d'autre part, celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ces dispositions faisant obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. En tout état de cause, l'Etat n'est pas partie au litige et ne peut être condamné.

13. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Châteaugay tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de l'instance d'appel.

14. En l'absence de dépens, les conclusions de M. A... B... tendant à leur paiement par l'Etat, qui n'est au demeurant pas partie au litige ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Châteaugay sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et à la commune de Châteaugay.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2021.

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N° 19LY02474


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. - Contentieux de la fonction publique. - Contentieux de l'indemnité.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DMMJB AVOCATS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 30/09/2021
Date de l'import : 12/10/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19LY02474
Numéro NOR : CETATEXT000044172302 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-09-30;19ly02474 ?
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