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30/09/2021 | FRANCE | N°19LY01727

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 30 septembre 2021, 19LY01727


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Elina a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge de l'amende mise à sa charge sur le fondement du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts, de lui accorder les intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales et de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801830 du 7 mars 2019, le tribunal administratif

de Lyon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL Elina a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge de l'amende mise à sa charge sur le fondement du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts, de lui accorder les intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales et de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801830 du 7 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 mai 2019 et le 19 janvier 2021, la SARL Elina, représentée en dernier lieu par Me Giroud, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de l'amende mise à sa charge sur le fondement du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire l'assiette de l'amende mise à sa charge à hauteur de 2 330 et 4 600 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le procès-verbal du 17 mai 2017 est insuffisamment motivé ;

- l'administration fiscale ne démontre pas que la SARL Elina aurait personnellement commis une infraction aux règles de facturation, dès lors notamment qu'en recevant des factures au nom des prestataires ayant réalisé des travaux pour son compte, elle n'a pas accepté sciemment l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom, et que les remises de chèques litigieuses procèdent, non d'une volonté frauduleuse, mais d'une négligence de son gérant ;

- l'administration ne peut, sans se contredire, soutenir que la société Elina a dissimulé l'identité de ses fournisseurs et affirmer qu'elle a versé des sommes à des personnes sans lien avec son activité professionnelle ;

- à titre subsidiaire, l'assiette de l'amende devra être réduite, dès lors d'une part que l'absence d'ordre sur la copie d'un chèque d'un montant de 2 330 euros ne saurait rapporter la preuve que le chèque n'a pas été encaissé par son fournisseur, et, d'autre part, que son gérant, qui a encaissé un chèque de 4 600 euros comptabilisé au compte fournisseur " RO.BA.T ", exerçait une activité occulte permettant de le considérer comme l'un des fournisseurs de la SARL Elina, la somme correspondante ayant au surplus été imposée entre les mains du gérant, dans la catégorie des revenus distribués.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 novembre 2019 et le 15 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Elina ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Elina, qui exerce une activité de marchand de biens, a fait l'objet, sur le fondement des articles L. 80 F à L. 80 H du livre des procédures fiscales d'une enquête pour rechercher les manquements aux règles de facturation portant sur les années 2014 à 2016. Par un procès-verbal du 24 mai 2017, l'administration a mis à sa charge une amende de 25 255 euros sur le fondement du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts, mise en recouvrement le 17 juillet 2017. La SARL Elina relève appel du jugement du 7 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'amende mise à sa charge.

Sur le bien-fondé de l'amende :

2. Aux termes du I de l'article 1737 du code général des impôts : " Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : / 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom ". Il résulte de ces dispositions que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue à la charge de la personne qui a délivré la facture ou à la charge de la personne destinataire de la facture si elle établit que la personne concernée a soit travesti ou dissimulé l'identité, l'adresse ou les éléments d'identification de son client ou de son fournisseur, soit accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom. L'administration qui a mis en recouvrement une amende fiscale sur le fondement des dispositions précitées doit apporter la preuve que les faits retenus à l'encontre du contribuable entrent bien dans leurs prévisions, lesquelles ne sanctionnent que le travestissement ou la dissimulation de l'identité du client ou du fournisseur, mais non le paiement effectué au profit de tiers, bénéficiaires effectifs des sommes mentionnées sur les factures concernées.

3. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a mis à la charge de la SARL Elina l'amende litigieuse au motif que les règlements correspondant à dix factures énumérées dans le procès-verbal du 24 mai 2017, émises au nom des sociétés AB Carrelage, KGCS et RO.BA.T. avaient été encaissés par des tierces personnes sans lien avec l'activité professionnelle de la SARL Elina.

4. D'une part, en se bornant à indiquer qu'un chèque de 2 330 euros du 31 octobre 2014 a été émis sans ordre, l'administration fiscale ne démontre pas que le règlement correspondant n'aurait pas été encaissé par l'émetteur de la facture. D'autre part, il résulte de l'instruction que l'administration fiscale, dans le cadre de la présente instance, n'a pas remis en cause la réalité des prestations correspondant aux factures litigieuses, ni l'identité des sociétés intervenues pour les réaliser, au demeurant confirmées par les maîtres d'œuvre intervenus sur les chantiers de la SARL Elina. Il n'est en particulier pas soutenu que les personnes ayant encaissé les règlements seraient les fournisseurs réels de la société requérante ou, en ce qui concerne le chèque encaissé par M. A..., gérant de la société Elina, qu'il aurait effectué lui-même les prestations réalisées pour sa société. Le ministre reconnaît également dans ses écritures que le gérant de la société RO.BA.T a lui-même demandé à M. A... d'établir des chèques de règlement sans ordre, alors qu'il n'est pas discuté que plusieurs bénéficiaires des paiements sont proches du gérant de la société RO.BA.T, qu'il s'agisse de son épouse ou de ses salariés. Par suite, en se bornant à reprocher à la SARL Elina d'avoir émis des chèques de règlement sans ordre ayant, in fine, bénéficié à d'autres personnes que ses fournisseurs, l'administration fiscale, malgré les irrégularités entachant certaines des factures en cause, n'apporte pas la preuve qui lui incombe que la SARL Elina aurait dissimulé l'identité réelle de ses fournisseurs ou sciemment accepté l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom.

5. Il résulte de ce qui précède que la SARL Elina est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'amende en litige.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SARL Elina et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 7 mars 2019 est annulé.

Article 2 : La SARL Elina est déchargée de l'amende pour manquements aux règles de facturation mise à sa charge au titre des années 2014 à 2016.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL Elina une somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Elina et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 9 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 septembre 2021.

4

N° 19LY01727


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-01-04 Contributions et taxes. - Généralités. - Amendes, pénalités, majorations.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Mathilde LE FRAPPER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : VOGEL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 30/09/2021
Date de l'import : 12/10/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19LY01727
Numéro NOR : CETATEXT000044172296 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-09-30;19ly01727 ?
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