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03/06/2021 | FRANCE | N°21LY00095

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 03 juin 2021, 21LY00095


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2020 par lequel le préfet de l'Ain lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai, a désigné le Kosovo, État dont il a la nationalité, comme pays de destination, lui a prescrit une interdiction de retour sur le territoire d'un an et l'a assigné à résidence.

Par jugement n° 2008769 du 11 décembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal n'a fait droit qu'à sa demande d'annulatio

n de l'assignation à résidence.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2020 par lequel le préfet de l'Ain lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai, a désigné le Kosovo, État dont il a la nationalité, comme pays de destination, lui a prescrit une interdiction de retour sur le territoire d'un an et l'a assigné à résidence.

Par jugement n° 2008769 du 11 décembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal n'a fait droit qu'à sa demande d'annulation de l'assignation à résidence.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 12 janvier 2021, le préfet de l'Ain demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2008769 du tribunal administratif de Lyon du 11 décembre 2020 en tant qu'il a annulé l'assignation à résidence de M. C... ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande de M. C... dirigées contre l'assignation à résidence.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal, d'une part, s'est fondé sur les contraintes alléguées par M. C... pour en déduire que les modalités de la mesure étaient disproportionnées, d'autre part, a regardé comme indivisible le principe de l'assignation et ses modalités pour l'annuler en totalité.

La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas produit d'observations.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 3 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Seillet, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant kosovar né le 16 janvier 1986, déclare être entré en France en octobre 2016 avec Mme A..., sa compagne de nationalité serbe. Leurs demandes d'asile ont été rejetées définitivement par décisions du 3 octobre 2018 de la Cour nationale du droit d'asile. Une première mesure d'éloignement a été prise, le 29 novembre 2018, à l'encontre de M. C..., qu'il n'a pas exécutée. Par des décisions du 2 décembre 2020 le préfet de l'Ain lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a assorti cette mesure d'une interdiction de retour sur ce territoire pendant un an, a désigné le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et l'a assigné à résidence. Le préfet de l'Ain relève appel du jugement du 11 décembre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal en tant qu'il a annulé la mesure d'assignation à résidence.

2. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie (...) L'autorité administrative peut également, aux fins de préparation du départ de l'étranger, lui désigner, en tenant compte des impératifs de la vie privée et familiale, une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside, dans la limite de trois heures consécutives par période de vingt-quatre heures. (...). " Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : (...) / 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) / Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des 1° et 2° à 7° du présent I, ou trois fois pour les cas relevant du 1° bis. (...) ".

3. Si une décision d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit comporter les modalités de contrôle permettant de s'assurer du respect de cette obligation et notamment préciser le service auquel l'étranger doit se présenter et la fréquence de ces présentations, ces modalités de contrôle sont divisibles de la mesure d'assignation elle-même. Dès lors c'est à tort que, pour annuler la décision d'assignation à résidence en litige dans sa totalité, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur le motif tiré de la disproportion, au regard des buts en vue desquels la mesure d'assignation avait été prise, des modalités d'exécution de cette mesure.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... en première instance dirigées contre la mesure d'assignation à résidence tant dans son principe que dans ses modalités d'exécution.

5. En premier lieu, M. C..., qui relève des catégories d'étrangers susceptibles d'être assignés à résidence en vertu des dispositions précitées du 5° de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être regardé comme contestant le caractère proportionné de cette mesure. Toutefois, en se bornant, pour ce faire, à affirmer que cette mesure porte atteinte à la liberté d'aller et venir, il n'établit pas l'erreur d'appréciation dont serait entachée cette mesure dans son principe, alors que son éloignement demeurait une perspective raisonnable et qu'il s'était soustrait à la mesure d'éloignement prise à son encontre le 29 novembre 2018.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que la mesure en litige astreignait notamment M. C... à rester à son domicile de 9 h à 12 h en plus de se présenter chaque jour à 15 h à la gendarmerie de Culoz, commune où il réside. Il en ressort également que M. C... dispose d'un logement à Culoz et que l'état de santé de sa fille âgée de moins d'un an et la scolarisation de sa fille aînée limitent sa faculté de se déplacer. Dès lors, eu égard à ces éléments de la situation personnelle de l'intimé, les modalités d'exécution de cette mesure d'assignation à résidence présentent un caractère disproportionné.

7. Il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Ain est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé la mesure d'assignation à résidence dans sa totalité.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du préfet de l'Ain du 2 décembre 2020 assignant M. C... à résidence est annulée en tant qu'elle prévoit le cumul de l'assignation de l'intéressé à son domicile tous les matins pendant trois heures et de l'obligation de se présenter quotidiennement à la gendarmerie de Culoz.

Article 2 : Le jugement n° 2008769 du 11 décembre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet de l'Ain est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. E... C....

Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2021 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président ;

Mme B..., première conseillère ;

Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juin 201.

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N° 21LY00095

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00095
Date de la décision : 03/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : DELBES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-03;21ly00095 ?
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