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03/06/2021 | FRANCE | N°20LY00230

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 03 juin 2021, 20LY00230


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 4 avril 2019 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination de son éloignement et d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous ast

reinte de 155 euros par jour de retard, subsidiairement de réexaminer sa situati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 4 avril 2019 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination de son éloignement et d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " salarié " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 155 euros par jour de retard, subsidiairement de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours, sous astreinte journalière de 155 euros.

Par un jugement n° 1904595 et 1904685 du 29 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 janvier 2020, Mme C... représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 octobre 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions du 4 avril 2019 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éloignement ;

3°) d'enjoindre au préfet de procéder au réexamen de son dossier sans délai ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que l'arrêté :

- est entaché d'un vice de procédure, faute d'avoir été précédé de l'avis de la commission départementale du titre de séjour, en méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- méconnaît le 4°) de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-12 ;

- méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er avril 2020, le préfet de la Haute-Savoie conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Fédi, président-assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante marocaine née le 1er juin 1988, relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 octobre 2019 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté 4 avril 2019 par lequel le préfet de la Haute-Savoie a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger (...) marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage (...) ". Il est constant que la communauté de vie entre Mme C... et son époux français a cessé au plus tard le 18 mai 2017, date de l'ordonnance de non conciliation attribuant la jouissance du domicile conjugal à Mme C.... Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, par suite, être écarté.

3. Aux termes de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. Toutefois, lorsque l'étranger a subi des violences familiales ou conjugales et que la communauté de vie a été rompue, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et en accorde le renouvellement. En cas de violence commise après l'arrivée en France du conjoint étranger mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint étranger se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" (...) ". Il ressort des pièces du dossier que, concomitamment à la requête en divorce introduite par son mari le 9 novembre 2016, Mme C..., estimant avoir été victime de violences conjugales, a déposé deux plaintes à ce titre le 13 décembre 2016 et le 15 mars 2017, qui ont été classées sans suite au motif d'une " infraction insuffisamment caractérisée ". Sa requête aux fins d'obtention d'une mesure de protection a également été rejetée par ordonnance du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains du 4 mai 2017. Par ailleurs, les deux certificats médicaux produits par la requérante à l'appui de ses allégations ne permettent pas d'établir l'origine des ecchymoses qui y sont décrites. Les allégations de séquestration, dont elle soutient avoir fait l'objet, ne sont pas plus établies par les attestations succinctes produites. Dès lors, la réalité des violences conjugales n'étant pas établie, le préfet de la Haute-Savoie a pu refuser à Mme C... le renouvellement de son titre de séjour sans méconnaître les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Mme C... n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur les fondements des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Haute-Savoie n'a pas examiné d'office la demande de l'intéressée sur ces deux fondements, ni fait usage de son pouvoir discrétionnaire sur ce point. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions sont donc inopérants.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile (...)". Mme C..., âgée de 30 ans à la date de la décision attaquée, séjourne en France depuis moins de quatre ans. En instance de divorce, elle ne justifie d'aucune attache familiale en France, alors que toute sa famille réside au Maroc. La circonstance qu'elle bénéficie d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 21 juin 2017 ne suffit pas à démontrer que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle de l'appelante. Ainsi, eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

6. Aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) ". Aux termes de l'article R. 312-2 du même code : " Le préfet (...) saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions, que lorsque, comme en l'espèce, ainsi qu'il a été exposé aux points précédents, le préfet a estimé, à bon droit, que le demandeur ne remplissait pas les conditions de fond auxquelles est subordonnée la délivrance d'un titre de séjour, il n'est pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant d'opposer un refus. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 312-2 doit être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... épouse C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2021, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juin 2021.

2

N° 20LY00230


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : BLANC

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 03/06/2021
Date de l'import : 15/06/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20LY00230
Numéro NOR : CETATEXT000043639555 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-03;20ly00230 ?
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