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03/06/2021 | FRANCE | N°19LY00771

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 03 juin 2021, 19LY00771


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B..., professeur certifié de mathématiques, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler, d'une part, la décision du 22 décembre 2015 par laquelle le recteur de l'académie de Grenoble lui a infligé la sanction disciplinaire d'exclusion de fonction d'une durée de quinze jours, d'autre part, la décision du 17 janvier 2017 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a maintenu ladite sanction au visa de la recommandation émise par la

commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'E...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B..., professeur certifié de mathématiques, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler, d'une part, la décision du 22 décembre 2015 par laquelle le recteur de l'académie de Grenoble lui a infligé la sanction disciplinaire d'exclusion de fonction d'une durée de quinze jours, d'autre part, la décision du 17 janvier 2017 par laquelle le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a maintenu ladite sanction au visa de la recommandation émise par la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat.

Par jugement n° 1701608 lu le 20 décembre 2018, le tribunal a annulé la décision du 17 janvier 2017 et rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 26 février 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse demande à la cour d'annuler ce jugement en ce qu'il annule sa décision du 17 janvier 2017 et de rejeter la demande présentée au tribunal par M. B... contre cette décision.

Il soutient que :

- les dispositions réglementaires qui ont transféré aux recteurs le pouvoir de prononcer les sanctions des deux premiers groupes n'ont pas eu pour effet de dessaisir le ministre du réexamen de la sanction sur recours présenté auprès du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État ;

- les vices propres affectant une décision statuant sur un recours hiérarchique ne peuvent être utilement invoqués devant le juge de l'excès de pouvoir.

M. B... n'a pas présenté de défense avant la clôture de l'instruction, fixée au 28 janvier 2020 par ordonnance du 31 décembre 2019.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;

- l'arrêté du 9 août 2004 portant délégation de pouvoirs du ministre chargé de l'éducation aux recteurs d'académie en matière de gestion des personnels enseignants, d'éducation, d'information et d'orientation du second degré ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Arbarétaz, président ;

- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. / Premier groupe : - l'avertissement ; - le blâme. / Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement ; - l'abaissement d'échelon ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; - le déplacement d'office (...) ". Aux termes de l'article 67 de la même loi : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination (...) / La délégation du pouvoir de nomination emporte celle du pouvoir disciplinaire (...) Le pouvoir de prononcer les sanctions du premier et du deuxième groupe peut être délégué indépendamment du pouvoir de nomination. Les conditions d'application du présent alinéa sont fixées par des décrets en Conseil d'État ". Mettant en oeuvre ces dispositions législatives, le 3° d de l'article R. 911-84 du code de l'éducation et l'article 1er de l'arrêté du 9 août 2004 susvisé ont transféré du ministre chargé de l'éducation aux recteurs d'académies le pouvoir d'infliger des sanctions disciplinaires des deux premiers groupes aux personnels enseignants.

2. Enfin, aux termes de l'article 14 du décret 25 octobre 1984 susvisé : " Au vu tant de l'avis précédemment émis par le conseil de discipline que des observations écrites ou orales produites devant elle (...), la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat émet (...) une recommandation tendant à faire lever ou modifier la sanction infligée ", et aux termes de l'article 16 du même décret : " L'avis ou la recommandation émis par la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État est transmis au ministre intéressé. / Si celui-ci décide de suivre la recommandation, cette décision se substitue rétroactivement à celle qui a été initialement prise ".

3. Il résulte de ces dispositions combinées, d'une part, que les recteurs d'académies sont les autorités investies du pouvoir disciplinaire, au sens de l'article 67 précité de la loi du 11 janvier 1984, lorsque la sanction prononcée ne dépasse pas le quantum du déplacement d'office. A ce titre et dans cette limite, ils exercent la totalité des compétences ordinairement attribuées au ministre en sa qualité d'autorité investie du pouvoir de nomination. Ils sont, en conséquence, seuls habilités à statuer sur les suites qu'appellent les recommandations émises par la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État, saisie par l'agent sanctionné.

4. Toutefois, l'autorité disciplinaire n'ayant pas suivi la recommandation émise par la commission de recours, les dispositions précitées de l'article 14 du décret du 25 octobre 1984 font obstacle à ce que la décision litigieuse puisse être regardée comme s'étant substituée à la sanction du 22 décembre 2015 et, partant, à ce que puisse être utilement invoqués ou relevés d'office les vices propres qui l'entachent. Il suit de là que le tribunal n'a pu sans entacher le jugement attaqué d'irrégularité, le relever d'office et faire droit à la demande d'annulation. Ledit jugement, en ce qu'il annule la décision du 17 janvier 2017 du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, doit en conséquence être annulé.

5. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande d'annulation de la décision du 17 janvier 2017 présentée au tribunal par M. B....

6. Ainsi qu'il est dit au point 4, la décision du 17 janvier 2017 ne s'étant pas substituée à la sanction du 22 décembre 2015, les vices propres qui sont susceptibles de l'entacher ne peuvent être utilement invoqués. Il suit de là que les moyens tirés de l'incompétence de son signataire, du défaut de motivation et d'indication des voies de recours doivent être écartés comme inopérants et que la demande d'annulation présentée par M. B... doit être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1701608 lu le 20 décembre 2018 du tribunal administratif de Grenoble en ce qu'il a annulé la décision du 17 janvier 2017 du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, est annulé.

Article 2 : La demande d'annulation de la décision du 17 janvier 2017 présentée au tribunal par M. B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports et à M. C... B....

Délibéré après l'audience du 12 mai 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise au disposition au greffe le 3 juin 2021.

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N° 19LY00771

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00771
Date de la décision : 03/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-02-03-05 Actes législatifs et administratifs. Validité des actes administratifs - Compétence. Compétence en matière de décisions non réglementaires. Autorités diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-06-03;19ly00771 ?
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