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27/05/2021 | FRANCE | N°19LY03129

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 27 mai 2021, 19LY03129


Vu la procédure suivante :

Par une requête et trois mémoires enregistrés les 7 août 2019, 27 février 2020, 24 juin 2020 et 6 décembre 2020 (non communiqué), les sociétés Bouquin Presse et Librairie du château, représentées par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler la " décision " de la Commission nationale d'aménagement commercial du 16 mai 2019 émise sur le projet, porté par la société So.Su.Mar, d'extension de l'ensemble commercial E-Leclerc situé à Saint-Etienne-de-Fontbellon par agrandissement de la galerie commerciale afin d'y créer un magasin

espace culturel Leclerc ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 e...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et trois mémoires enregistrés les 7 août 2019, 27 février 2020, 24 juin 2020 et 6 décembre 2020 (non communiqué), les sociétés Bouquin Presse et Librairie du château, représentées par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler la " décision " de la Commission nationale d'aménagement commercial du 16 mai 2019 émise sur le projet, porté par la société So.Su.Mar, d'extension de l'ensemble commercial E-Leclerc situé à Saint-Etienne-de-Fontbellon par agrandissement de la galerie commerciale afin d'y créer un magasin espace culturel Leclerc ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à chacune des sociétés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- elles disposent d'un intérêt à agir ; la décision rendue par la Commission nationale d'aménagement commercial ne constitue pas un acte préparatoire ; leur requête est recevable ;

- la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial est insuffisamment motivée ;

- il n'est pas établi que les membres de la Commission nationale d'aménagement commercial auraient été convoqués conformément aux prescriptions de l'article R. 752-35 du code de commerce ni que la convocation à la séance du 16 mai 2019 a été signée par son président ;

- le pétitionnaire ne démontre pas que les terrains d'assiette du projet ont été rendus constructibles avant le 4 juillet 2003 ; par suite, en vertu de l'article L. 142-4 du code de l'urbanisme, aucune autorisation d'exploitation commerciale ne pouvait être délivrée ;

- le projet méconnaît les articles L. 752-6 et R. 752-6 du code de commerce ce qui aurait dû conduire la Commission nationale d'aménagement commercial à émettre un avis défavorable.

Par trois mémoires, enregistrés les 7 février 2020, 1er avril 2020 et 18 août 2020, la société So.Su.Mar, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge des requérantes en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Elle fait valoir que :

- l'acte par lequel la Commission nationale d'aménagement commercial statue sur le recours administratif préalable obligatoire dont elle est saisie revêt le caractère d'un avis préalable insusceptible de faire l'objet d'un recours contentieux ; il s'agit d'un acte préparatoire ; la requête est ainsi irrecevable ;

- les moyens soulevés à l'encontre de cet avis ne sont, en tout état de cause, pas fondés.

Une ordonnance du 5 novembre 2020 a fixé la clôture de l'instruction au 7 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D..., première conseillère,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me B... pour la société Bouquin Presse et la société Librairie du château et de Me A... pour la société So.Su.Mar.

Considérant ce qui suit :

1. Les sociétés Bouquin Presse et Librairie du château, en application de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme et de l'article L. 752-17 du code de commerce, ont formé un recours à l'encontre de l'avis favorable du 28 janvier 2019 de la Commission départementale d'aménagement commercial de l'Ardèche sur le projet, porté par la société So.Su.Mar, d'extension de l'ensemble commercial E-Leclerc situé à Saint-Etienne-de-Fontbellon par agrandissement de la galerie commerciale afin d'y créer un magasin espace culturel Leclerc. La Commission nationale d'aménagement commercial a, par " décision " du 16 mai 2019, rejeté ce recours. Les sociétés Bouquin Presse et Librairie du château demandent à la cour d'annuler cette " décision ".

Sur les conclusions dirigées contre la " décision " du 16 mai 2019 de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial (...) A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du même code est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire ".

3. Il résulte de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme que l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial a désormais le caractère d'un acte préparatoire à la décision prise par l'autorité administrative sur la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, seule décision susceptible de recours contentieux. Il en va ainsi que l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial soit favorable ou qu'il soit défavorable.

4. En outre, aux termes de l'article R. 351-4 du code de justice administrative : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance. "

5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le dossier de demande d'autorisation commerciale, déposé le 10 décembre 2018 par la société So.Su.Mar, portait sur le projet d'extension de l'ensemble commercial E-Leclerc situé à Saint-Etienne-de-Fontbellon par agrandissement de la galerie commerciale de 600 m² à 1451 m² afin d'y créer un magasin espace culturel Leclerc d'une surface de vente de 851 m². Un tel projet nécessitait l'octroi d'un permis de construire ainsi que l'a demandé le pétitionnaire le 6 décembre 2018 notamment pour la création d'une nouvelle réserve induite par la création de l'espace culturel. Ce permis a été délivré au pétitionnaire le 14 juin 2019 et, régulièrement affiché, n'a pas été contesté par les sociétés requérantes. Le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale, versé au dossier, visait la demande de permis de construire et la " décision " rendue par la Commission nationale d'aménagement commercial le 16 mai 2019 a porté sur l'intégralité du projet susvisé. Contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort de l'ensemble de ces éléments concordants que l'extension de la surface de vente autorisée par l'autorisation d'exploitation commerciale en litige nécessitait la délivrance d'un permis de construire et que, dans ces conditions, le permis délivré le 14 juin 2019 doit être regardé comme valant autorisation d'exploitation commerciale quand bien même il ne l'indique pas expressément et la " décision " rendue le 16 mai 2019 par la Commission nationale d'aménagement commercial s'analyser comme un avis porté sur le projet, porté par la société So.Su.Mar. Un tel avis ne constitue pas, en vertu de ce qui a été dit au point 3, un acte susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir alors même que le courrier de notification de cet avis indique que " cette décision peut, dans le délai de deux mois, faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir devant la cour administrative d'appel ". Les sociétés requérantes, qui sont au nombre des personnes visées à l'article L. 75217 du code de commerce, pouvaient en revanche présenter un recours pour excès de pouvoir que contre le permis de construire délivré par l'autorité compétente valant autorisation d'exploitation commerciale, en excipant le cas échéant de l'illégalité de l'avis rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial. Il s'en suit que les conclusions des sociétés requérantes tendant à l'annulation de l'avis rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial le 16 mai 2019 sont irrecevables et doivent être rejetées.

6. Si les requérantes soutiennent que tant les mentions de l'acte de la Commission nationale d'aménagement commercial du 16 mai 2019 et de la notification des voies et délais de recours contre cet acte que les termes du permis de construire du 14 juin 2019, qui ne précisent pas que ce permis vaut autorisation d'exploitation commerciale, les ont induites en erreur, cette circonstance est sans incidence sur l'irrecevabilité résultant de la nature de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial. Une telle circonstance serait seulement susceptible de leur permettre de demander l'annulation du permis de construire obtenu par la société So Su Mar en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale en faisant valoir qu'aucun délai de forclusion ne peut leur être opposé. Les requérantes n'ont toutefois pas saisi la cour de telles conclusions.

7. L'irrecevabilité résultant de la nature de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial, qui n'est pas susceptible d'être couverte en cours d'instance, présente un caractère manifeste au sens de l'article R. 351-4 du code de justice administrative. Par suite, la cour administrative d'appel de Lyon est compétente, en dépit des règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions à fin d'annulation des sociétés Bouquin Presse et Librairie du château.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande présentée par les sociétés requérantes au titre des frais qu'elles ont exposés sur le fondement de ces dispositions à l'occasion de la présente instance.

9. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces sociétés le versement d'une somme de 2 000 euros à la société So.Su.Mar au titre des frais exposés par elle dans cette instance et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête des sociétés Bouquin Presse et Librairie du château est rejetée.

Article 2 : Les sociétés Bouquin Presse et Librairie du château verseront à la société So.Su.Mar une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié aux sociétés Bouquin Presse et Librairie du château, à la société So.Su.Mar et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au président de la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 mai 2021.

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