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30/04/2021 | FRANCE | N°21LY00075

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 30 avril 2021, 21LY00075


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2020 par lequel le préfet du Rhône a décidé de sa remise aux autorités italiennes, responsables de sa demande d'asile.

Par jugement n° 2007491 lu le 26 octobre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 8 janvier 2021, présentée pour Mme C..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement

n° 2007491 lu le 26 octobre 2020 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2020 par lequel le préfet du Rhône a décidé de sa remise aux autorités italiennes, responsables de sa demande d'asile.

Par jugement n° 2007491 lu le 26 octobre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 8 janvier 2021, présentée pour Mme C..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2007491 lu le 26 octobre 2020 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône d'enregistrer sa demande d'asile dans le délai de quarante-huit heures à compter de l'arrêt, de lui remettre le dossier de demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile en procédure normale, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de huit jours à compter de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'État le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit et elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement.

Par mémoire enregistré le 23 février 2021, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 9 décembre 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié par le règlement (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., de nationalité guinéenne, née le 10 mai 1992 à Conakry (Guinée), entrée en France le 16 janvier 2020, selon ses déclarations, a déposé une demande d'asile enregistrée à la préfecture du Rhône le 13 février 2020. Le système Eurodac a révélé qu'elle avait été identifiée en Italie, lors d'un franchissement de frontière, le 10 janvier 2020. Les autorités italiennes, saisies d'une demande de prise en charge de Mme C... le 2 avril 2020, ont fait connaître leur accord explicite pour sa réadmission le 27 mai 2020. Par un arrêté du 21 octobre 2020, le préfet du Rhône a ordonné son transfert aux autorités italiennes, responsables de sa demande d'asile. Mme C... relève appel du jugement du 26 octobre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du préfet du Rhône du 21 octobre 2020.

2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et, en particulier de la lecture de la décision en litige, qui mentionne les déclarations de Mme C... relatives à la présence en France de M. B... C..., présenté par la requérante comme le père de sa fille présente également sur le territoire français, que le préfet du Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet du Rhône se serait estimé tenu de prendre la décision de transfert contesté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Mme C... se prévaut de la présence sur le territoire français de M. B... C..., de nationalité guinéenne comme elle, dont elle affirme qu'il est le père de sa fille Fatoumata présente également sur le territoire français comme de son autre fille vivant en Guinée. Toutefois, comme l'a relevé le premier juge, à supposer même établi le caractère probant du jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance du tribunal de première instance de Conakry du 13 janvier 2020 concernant sa fille Fatoumata née le 4 mai 2014, alors que le préfet du Rhône a indiqué sans être contredit que M. C... s'était déclaré veuf et sans enfant dans sa demande d'asile déposée le 30 décembre 2016 et avait indiqué dans sa demande de titre de séjour qu'il était célibataire, ce dernier, qui disposait seulement, à la date de la décision en litige, d'un récépissé de demande de carte de séjour, n'avait pas vocation à se maintenir durablement en France et était présent en France depuis le 11 novembre 2016, alors que la requérante est entrée sur le territoire français le 16 janvier 2020, de sorte qu'ils sont restés éloignés pendant plusieurs années et que la requérante ne justifie pas d'une relation ancienne et stable avec M. C.... Dans ces circonstances, le transfert de la requérante aux autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile ne porte pas, au regard des buts poursuivis et compte tenu des effets d'une telle mesure, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme C... et il n'a pas davantage méconnu les stipulations des articles 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, dès lors que la décision en litige ne fait pas obstacle au maintien des relations entre la requérante et sa fille Fatoumata.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) ".

7. La faculté laissée à chaque État membre, par le 1 précité de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

8. Si Mme C... fait valoir que les autorités italiennes, submergées par un afflux de migrants, ne sont pas en mesure d'assurer son accueil et l'instruction de sa demande d'asile dans des conditions conformes aux exigences du droit de l'Union européenne, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle y serait privée du respect des garanties accordées par le droit d'asile en termes d'accueil et d'examen particulier de sa demande que les autorités italiennes se sont engagées à examiner en acceptant la demande de prise en charge de l'intéressée. Dès lors, le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage, en l'espèce, de la clause discrétionnaire prévue au 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et aux fins de mise à la charge de l'État d'une somme au titre des frais du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2021.

1

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N° 21LY00075


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00075
Date de la décision : 30/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : MESSAOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-30;21ly00075 ?
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