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29/04/2021 | FRANCE | N°21LY00234

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 29 avril 2021, 21LY00234


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... a demandé à la présidente du tribunal administratif de Lyon :

- d'annuler les arrêtés du 4 novembre 2020 du préfet du Rhône ordonnant sa remise aux autorités belges pour l'examen de sa demande d'asile, et portant assignation à résidence pour une durée de 45 jours ;

- d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile dans un délai de 48 heures, de lui remettre un dossier de demande d'asile et de lui délivrer une autorisati

on provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile ou, à titre subsidiaire, de réexamin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... a demandé à la présidente du tribunal administratif de Lyon :

- d'annuler les arrêtés du 4 novembre 2020 du préfet du Rhône ordonnant sa remise aux autorités belges pour l'examen de sa demande d'asile, et portant assignation à résidence pour une durée de 45 jours ;

- d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile dans un délai de 48 heures, de lui remettre un dossier de demande d'asile et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de huit jours à compter de la décision à intervenir ;

- de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2007860 du 10 novembre 2020, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 21 janvier 2021 Mme B..., représentée par la Selarl Lozen Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2020 du préfet du Rhône ordonnant sa remise aux autorités belges ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de procéder à l'enregistrement de sa demande d'asile dans un délai de 48 heures à compter de l'arrêt à intervenir, de lui remettre un dossier de demande d'asile et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeur d'asile ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de huit jours à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 alors que l'entretien individuel a été mené en français, langue qu'elle ne comprend pas, et non en lingala, langue dans laquelle les brochures prévues à l'article 4 du même règlement lui ont été communiquées ;

- c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 19 du même règlement, dès lors qu'elle justifie avoir quitté le territoire des Etats membres pendant une durée de trois mois, faisant cesser la responsabilité de la Belgique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2021, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme C..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., se déclarant ressortissante de République démocratique du Congo née le 23 janvier 1972 a présenté une demande d'asile enregistrée par le préfet du Rhône le 6 août 2020. Elle demande l'annulation du jugement du 10 novembre 2020 par lequel une magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 4 novembre 2020 par lesquels l'autorité préfectorale, à l'issue de la procédure de détermination de l'Etat membre responsable de sa demande d'asile, a ordonné sa remise aux autorités belges et son assignation à résidence. Elle demande également à la cour d'annuler le seul arrêté de transfert vers la Belgique.

2. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 visé ci-dessus que, dès qu'une demande de protection internationale est introduite dans un Etat membre, les autorités compétentes de cet Etat doivent communiquer par écrit au demandeur diverses informations relatives à l'application du règlement, au moyen de brochures communes établies dans la langue comprise par le demandeur ou dont on peut raisonnablement penser qu'il la comprend. Aux termes de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., lorsqu'elle s'est présentée au service de premier accueil des demandeurs d'asile a déclaré comprendre le lingala et le français, de sorte que l'autorité préfectorale pouvait raisonnablement supposer qu'elle était capable de communiquer en langue française. La requérante ne conteste pas, par ailleurs, s'être vu remettre les deux brochures prévues par l'article 4 du règlement en langue lingala, et a ainsi été mise en mesure de demander l'assistance d'un interprète pour mener l'entretien individuel, ce dont elle s'est abstenue. Il ressort en outre du résumé de l'entretien individuel, signé par la requérante, qu'elle a pu communiquer des informations sur son parcours, en vue de la détermination de l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile. Mme B... a au demeurant également formulé des observations, en français et sans l'assistance d'un interprète, à l'occasion de la notification de l'arrêté attaqué le 4 novembre 2020. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté de transfert serait intervenu au terme d'une procédure irrégulière, en méconnaissance des dispositions précitées du règlement, au seul motif que l'entretien individuel a été mené en langue française.

4. En second lieu, aux termes du paragraphe 2 de l'article 19 du règlement du 26 juin 2013 visé ci-dessus : " Les obligations [de reprise en charge] prévues à l'article 18, paragraphe 1, cessent si l'État membre responsable peut établir, lorsqu'il lui est demandé de prendre ou reprendre en charge un demandeur ou une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), que la personne concernée a quitté le territoire des États membres pendant une durée d'au moins trois mois, à moins qu'elle ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité délivré par l'État membre responsable. / Toute demande introduite après la période d'absence visée au premier alinéa est considérée comme une nouvelle demande donnant lieu à une nouvelle procédure de détermination de l'État membre responsable ".

5. Si Mme B... soutient avoir quitté la Belgique " en 2018 " et n'être venue en France par avion que le 19 décembre 2019, après avoir quitté le territoire des Etats membres, elle ne fournit ni déclarations circonstanciées et vérifiables, ni billet de transport, ni cachet de sortie au soutien de ses allégations. Le " rapport médicale " établi le 25 novembre 2020 relatant une consultation du 6 septembre 2018 et l'attestation médicale du 24 juillet 2019 sont insuffisants à démontrer que Mme B... aurait quitté le territoire des Etats membres pendant une durée d'au moins trois mois. La délivrance d'une carte d'électeur n'est pas davantage suffisante à rapporter cette preuve. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la France serait devenue responsable de l'examen de sa demande d'asile en application des dispositions précitées de l'article 19 du règlement du 26 juin 2013.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes. Les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme B... doivent dès lors être également rejetées.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse au conseil de Mme B... la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 8 avril 2021, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 avril 2021.

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N° 21LY00234


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00234
Date de la décision : 29/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Mathilde LE FRAPPER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : MESSAOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-29;21ly00234 ?
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