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08/04/2021 | FRANCE | N°19LY03568

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 08 avril 2021, 19LY03568


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... D... et Mme H... F... épouse D... ont, l'un et l'autre, demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les arrêtés du 27 décembre 2018 par lesquels le préfet du Rhône leur a fait à chacun obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement nos 1901701 et 1901702 du 17 juin 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête

, enregistrée le 13 septembre 2019, M. et Mme D..., représentés par Me E..., demandent à la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... D... et Mme H... F... épouse D... ont, l'un et l'autre, demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les arrêtés du 27 décembre 2018 par lesquels le préfet du Rhône leur a fait à chacun obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement nos 1901701 et 1901702 du 17 juin 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 13 septembre 2019, M. et Mme D..., représentés par Me E..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon du 17 juin 2019 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 27 décembre 2018 par lesquels le préfet du Rhône leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de procéder au réexamen de leur situation et de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire :

- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées ;

- ils ont été privés de leur droit d'être entendus préalablement à l'adoption de ces décisions ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leur situation ;

- les décisions attaquées méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :

- elles sont illégales en conséquence de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire.

L'affaire a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative.

M. et Mme D... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure,

- et les observations de Me G..., représentant M. et Mme D... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., ressortissants albanais nés respectivement le 19 mai 1976 et le 29 septembre 1986, sont entrés en France le 10 septembre 2013, selon leurs déclarations, en compagnie de leur fils né en 2012, et ont sollicité la reconnaissance du statut de réfugié. Leur demande a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 3 avril 2014, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 6 novembre 2014. Par un arrêté du 22 décembre 2014, le préfet du Rhône a refusé de les admettre au séjour et leur a fait obligation de quitter le territoire français. M. et Mme D... ont présenté une demande de réexamen de leur demande d'asile qui a été rejetée par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 juin 2016, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 5 décembre 2016. Par des arrêtés du 27 décembre 2018, le préfet du Rhône leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a fixé le pays de destination. M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 17 juin 2019 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon, après les avoir jointes, a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, les décisions attaquées visent le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rappellent que les demandes d'asile présentées par les intéressés ont été rejetées à deux reprises tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile et indiquent que les époux, qui se maintiennent irrégulièrement en France depuis le rejet de leurs demandes d'asile, ne justifient pas d'une vie privée et familiale ancienne, intense et stable en France. Par suite, ces décisions précisent les circonstances de fait et droit qui en sont le fondement, et sont, en conséquence, suffisamment motivées, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'elles ne font état ni du rendez-vous obtenu par les intéressés en vue de solliciter un titre de séjour ni de la naissance de leur fille sur le territoire français.

3. En deuxième lieu, dans le cas prévu au 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision faisant obligation de quitter le territoire français fait suite au constat de ce que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou de ce que celui-ci ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 du même code, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a été entendu dans le cadre du dépôt de sa demande d'asile à l'occasion de laquelle l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit reconnue la qualité de réfugié ou accordé le bénéfice de la protection subsidiaire et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, laquelle doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux.

4. M. et Mme D..., qui, au demeurant, ne pouvaient ignorer que, depuis le rejet devenu définitif de leur demande d'asile en 2016, ils étaient susceptibles de faire l'objet d'une mesure d'éloignement, ne précisent pas en quoi ils ont été empêchés de porter utilement à la connaissance de l'administration des informations pertinentes tenant à leur situation personnelle avant l'adoption des mesures d'éloignement dont ils font l'objet. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que les décisions attaquées ont été prises en méconnaissance du droit d'être entendu qu'ils tiennent du principe général du droit de l'Union européenne tel qu'il est notamment exprimé à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

5. En troisième lieu, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le préfet du Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. et Mme D... avant d'adopter les décisions attaquées.

6. En dernier lieu, M. et Mme D... font valoir qu'ils résident en France depuis près de cinq ans, que leur fils C... est scolarisé en France, que leur fille Amélia y est née et qu'ils se sont investis dans des activités associatives. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. et Mme D..., qui se sont maintenus irrégulièrement en France en dépit de mesures d'éloignement dont ils ont fait l'objet, ne sont pas dépourvus d'attaches privées et familiales en Albanie, où ils ont vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans et vingt-sept ans respectivement. Rien ne fait obstacle à ce que les requérants et leurs enfants mineurs reconstituent la cellule familiale dans leur pays d'origine, dont tous les membres ont la nationalité et où les enfants pourront être scolarisés. Dans les circonstances de l'espèce, le préfet n'a pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels les décisions attaquées ont été prises. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli. Il n'est pas davantage établi que le préfet aurait méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ni commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle et familiale des requérants.

Sur les décisions fixant le délai de départ volontaire :

7. En premier lieu, les décisions attaquées, qui comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent, sont suffisamment motivées.

8. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et Mme D... ont été privés de la possibilité de porter utilement à la connaissance de l'administration des informations pertinentes tenant à leur situation personnelle avant l'adoption des décisions attaquées. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces décisions ont été prises en méconnaissance du droit d'être entendu qu'ils tiennent du principe général du droit de l'Union européenne tel qu'il est notamment exprimé à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

9. En troisième lieu, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le préfet du Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. et Mme D... avant d'adopter les décisions attaquées.

10. En dernier lieu, il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation dont seraient entachées les décisions attaquées au regard de la situation personnelle des intéressés, qui reprennent ce qui a été développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation des obligations de quitter le territoire français, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux précédemment évoqués.

Sur les décisions fixant le pays de destination :

11. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que les décisions fixant le pays de destination devraient être annulées en conséquence de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire ne peut qu'être écarté.

12. Il suit de là que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et à Mme H... F... épouse D.... Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 18 mars 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 8 avril 2021.

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N° 19LY03568


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme EVRARD
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : SCP ROBIN VERNET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 08/04/2021
Date de l'import : 04/05/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19LY03568
Numéro NOR : CETATEXT000043410791 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-08;19ly03568 ?
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