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01/04/2021 | FRANCE | N°20LY01972

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 01 avril 2021, 20LY01972


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1907090 du 17 février 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2020, Mme E

..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêt...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1907090 du 17 février 2020, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2020, Mme E..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 juin 2019 du préfet du Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.

Mme E... soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le refus de titre de séjour ainsi que l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont à tout le moins entachés d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination méconnait le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard des risques encourus en cas de retour en Azerbaïdjan.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme D..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., née en 1966 à Bakou en Azerbaïdjan (ex-URSS), déclare être entrée en France le 5 juin 2014. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 8 décembre 2015. Elle a alors sollicité un titre de séjour en raison de son état de santé et s'est vue délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable du 9 mai 2016 au 8 mai 2017, dont l'intéressée a demandé le renouvellement. Par un arrêté du 11 juin 2019, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme E... relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

3. Le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé, dans son avis du 9 janvier 2018, que si l'état de santé de Mme E... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut d'une telle prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour remettre en cause l'appréciation portée par le préfet, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII, l'appelante fait valoir qu'elle souffre d'un stress post-traumatique avec éléments psychotiques, lié aux persécutions qu'elle a vécues en Azerbaïdjan puis en Russie, qu'elle suit un traitement médicamenteux lourd et qu'elle a préalablement obtenu la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé sur le fondement d'un avis favorable du médecin de l'Agence régionale de santé. Cette circonstance est toutefois sans incidence sur la légalité du refus de renouvellement de ce titre de séjour. En outre le certificat médical établi le 1er juillet 2019, qui rappelle l'histoire familiale et personnelle que l'intéressée a elle-même décrite et atteste de ses troubles psychiques, indique qu'elle est prise en charge au centre médico-psychologique de Tassin depuis le 16 février 2016, que les soins qui lui ont été proposés se poursuivent sous forme de consultations mensuelles, médicales, médico-infirmières ou infirmières et que sa pathologie s'est améliorée. Ce certificat médical, pas plus d'ailleurs que les certificats médicaux rédigés en 2015, antérieurement à la délivrance du titre de séjour dont elle a demandé le renouvellement, ne comportent d'élément de nature à établir qu'une absence de prise en charge médicale, à la date de la décision contestée, pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni n'établissent une possible aggravation de son état en cas de retour en Azerbaïdjan ou en Russie.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

5. Mme E... fait valoir qu'elle vit en France depuis 2014, qu'elle est dépourvue d'attaches familiales en Azerbaïdjan ou en Fédération de Russie, où elle a vécu de lourds traumatismes, et qu'elle a tout mis en oeuvre pour réussir son intégration en France. S'il ressort des pièces du dossier que l'intéressée a bénéficié d'un accompagnement médical et social depuis son arrivée en France et a ainsi pu suivre des formations et obtenir un contrat de travail à durée déterminée d'insertion, Mme E... est entrée en France à l'âge de quarante-huit ans après avoir vécu vingt-deux ans en Azerbaïdjan, son pays natal, et vingt-six ans en Fédération de Russie, et n'établit pas disposer d'attaches personnelles en France. Il s'ensuit qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, le préfet du Rhône n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Il n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni davantage entaché ces décisions d'une erreur manifeste d'appréciation.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants. "

7. Si Mme E... soutient qu'elle a dû fuir en 1988 son pays natal, l'Azerbaïdjan, en raison de ses origines arméniennes, elle n'apporte à la cour aucun élément de nature à établir l'existence de risques personnels et actuels qu'elle encourrait en cas de retour dans ce pays. Elle n'établit pas davantage l'existence de tels risques en cas de retour en Fédération de Russie alors d'ailleurs que la CNDA, qui a examiné sa situation à l'égard de ce pays, a rejeté définitivement sa demande d'asile le 8 décembre 2015. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. En dernier lieu, ainsi que l'a jugé le magistrat désigné du tribunal administratif, les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas utilement invocables à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.

9. Il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... E... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 4 mars 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evrard, présidente de la formation de jugement,

Mme A..., première conseillère,

Mme D..., première conseillère.

Rendu public par la mise à disposition du greffe, le 1er avril 2021.

2

N° 20LY01972


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme EVRARD
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : DELBES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 01/04/2021
Date de l'import : 13/04/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20LY01972
Numéro NOR : CETATEXT000043350640 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-01;20ly01972 ?
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