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01/04/2021 | FRANCE | N°19LY01290

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 01 avril 2021, 19LY01290


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SAS Artémis Group a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge, avec les pénalités et intérêts de retard y afférents, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 2 janvier 2014 au 30 juin 2015, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés concernant les exercices clos les 30 juin 2014 et 2015, des droits de retenue à la source au titre de l'exercice clos en 2015 et des cotisations supplémentaires de taxe s

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SAS Artémis Group a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge, avec les pénalités et intérêts de retard y afférents, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 2 janvier 2014 au 30 juin 2015, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés concernant les exercices clos les 30 juin 2014 et 2015, des droits de retenue à la source au titre de l'exercice clos en 2015 et des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015.

Par un jugement n° 1707458 du 5 février 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 5 avril 2019 et 5 mars 2021, la SAS Artémis Group, représentée par Me A... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 février 2019 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités susmentionnées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la facture LYHHF d'un montant de 10 000 euros correspond à une opération de trésorerie entre cette société mère et sa filiale ; de même, la retenue à la source prévue par le 2. de l'article 119 bis du code général des impôts établie sur cette base n'est pas justifiée ;

- les sommes en provenance de la société Artémis Sécurité constituent des avances de trésorerie qui ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.

Par un mémoire enregistré le 8 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les encaissements en provenance de la société Artémis Sécurité constituent des avances sur factures soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ;

- la facture LYHHF d'un montant de 10 000 euros ne correspond à aucune charge déductible ;

- les majorations pour manquement délibéré sont justifiées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure,

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Artémis Group, créée le 2 janvier 2014 et dont le capital est détenu à 95 % par la société de droit luxembourgeoise LYHHF, est une société holding qui réalise des prestations de service auprès de ses filiales, lesquelles ont principalement pour activité le gardiennage et la sécurité privée. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 2 janvier 2014 au 30 juin 2015, à l'issue de laquelle, par une proposition de rectification du 26 juillet 2016, l'administration lui a notifié, dans le cadre d'une procédure contradictoire, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 2 janvier 2014 au 30 juin 2015, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos les 30 juin 2014 et 2015, des droits de retenue à la source au titre de l'exercice clos en 2015 et des cotisations supplémentaires de taxe sur les salaires au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015. La SAS Artémis Group relève appel du jugement du 5 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des majorations dont elles ont été assorties.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la remise en cause de la déduction d'une charge et l'application d'une retenue à la source relative à une facture " LYHHF " d'un montant de 10 000 euros :

2. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

3. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 26 juillet 2016 que l'administration a constaté que le 30 juin 2015, la SAS Artémis Group a comptabilisé au débit du compte " 62260000 Honoraire " une charge de 10 000 euros sous le libellé " fact. à percevoir LYHHF " et a inscrit la même somme au crédit du compte " 408100 fournisseur facture non parvenue ". En l'absence de toute production de justificatif, l'administration a remis en cause le caractère déductible de ces frais et a réintégré la somme de 10 000 euros dans les résultats de la société au titre de l'exercice clos en 2015. L'administration a également considéré qu'il s'agissait d'une distribution et a donc appliqué une retenue à la source sur le fondement du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts.

4. La requérante fait valoir que cette somme ne peut correspondre en réalité qu'à une opération de trésorerie avec sa société mère luxembourgeoise qui ne dispose d'aucun salarié. Toutefois, elle n'apporte pas plus en appel qu'en première instance d'éléments relatifs notamment aux difficultés économiques et financières de sa société mère, permettant de justifier que le versement de cette somme constituerait une avance de trésorerie. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a considéré que cette dépense n'a pas été engagée dans l'intérêt direct de l'exploitation de la société requérante, l'a réintégrée à son résultat imposable et a appliqué la retenue à la source sur le fondement du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée exigible sur les avances sur factures versées par la société Artémis Security :

5. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. -Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. (...) " et aux termes de l'article 269 du même code : " 2. La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services... lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits ". Il résulte de ces dispositions que, dans le cas de versement d'un acompte, la taxe sur la valeur ajoutée devient exigible sans que la livraison ou la prestation ait encore été effectuée, à la condition que les biens ou les services soient désignés avec précision au moment du versement de l'acompte.

6. Il résulte de l'instruction que l'administration a assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée des acomptes versés à la SAS Artémis Group par sa filiale, la société Artémis Security qui ont été constatés pour les deux exercices litigieux, à concurrence de 50 000 euros pour l'exercice clos en 2014 et de 543 500 euros au titre de l'exercice clos en 2015. Ces acomptes étaient inscrits au crédit du compte 419 " avances et acomptes reçus sur commandes " ou du compte 411 " clients ". L'administration a également relevé que les intitulés des opérations correspondantes portées sur les relevés bancaires mentionnaient " avances sur factures ". La requérante soutient que ces encaissements ne concernaient pas des prestations de service, mais des avances sur trésorerie non assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée, qui ont été mal comptabilisées et qui ont été réaffectées par des écritures d'opérations diverses en compte-courant d'associé de la société Artémis Security. Toutefois, la circonstance que le 15 janvier 2014, elle a signé avec sa filiale une convention de trésorerie ne suffit pas à établir que les sommes litigieuses constitueraient des opérations de trésorerie. Il en est de même de l'extrait du compte courant d'associé de la société Artémis Security produit par la requérante qui ne permet pas à lui seul d'établir que les rémunérations portées sur ce compte seraient en lien avec les sommes litigieuses. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la requérante, il lui était possible de percevoir des avances sur facture au cours de l'année 2014 pour des prestations de services réalisées après le 1er janvier 2015, date de début de son activité. Enfin, en se bornant à relever comme en première instance l'existence d'une disproportion entre les charges comptabilisées au bilan d'un montant inférieur à 5 000 euros pour l'exercice clos en 2014 et l'avance de 50 000 euros pour ce même exercice, la requérante n'établit pas que les avances litigieuses concerneraient des prestations de service sans réalité. Ainsi, la SAS Artémis Group n'est pas fondée à soutenir que les sommes litigieuses ne devaient pas être regardées comme des avances sur factures dont l'encaissement rendait immédiatement exigible la taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions précitées de l'article 269 du code général des impôts.

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

7. Les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que l'application de la majoration pour manquement délibéré n'est ni motivée, ni justifiée en l'absence de preuve de l'existence d'une intention délibérée d'éluder l'impôt doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.

8. Il résulte de ce qui précède que la SAS Artémis Group n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Artémis Group est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Artémis Group et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2021 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme B..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er avril 2021.

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N° 19LY01290

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01290
Date de la décision : 01/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Questions communes.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : FIDAL SOCIETE D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-04-01;19ly01290 ?
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