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14/01/2021 | FRANCE | N°19LY01753

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 14 janvier 2021, 19LY01753


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL CD a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes, ainsi que la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2012 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1702227 du 19 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a réduit

le rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant en droits de 1 703 euros et des pé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SARL CD a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes, ainsi que la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2012 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1702227 du 19 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a réduit le rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant en droits de 1 703 euros et des pénalités correspondantes, pour la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2012 (article 1er) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 2).

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 mai 2019 et le 27 février 2020, la SARL CD, représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes ainsi que la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes mis à sa charge pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SARL CD soutient que :

- le jugement a omis de répondre à l'ensemble des moyens développés ;

- la proposition de rectification du 13 décembre 2014 est insuffisamment motivée ;

- la vérification de comptabilité est irrégulière, dès lors qu'elle n'a pas demandé à ce qu'elle se déroule au cabinet de son expert-comptable, ce qui entraîne l'irrégularité des redressements, même notifiés par voie de taxation d'office, la situation de taxation d'office ayant été révélée par le contrôle irrégulier ;

- s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, elle n'a obtenu qu'un règlement partiel des loyers et redevances dus par son locataire-gérant, de sorte que le montant des rappels est erroné ;

- s'agissant de l'impôt sur les sociétés, elle disposait de déficits reportables au 30 septembre 2006 qui doivent être imputés sur ses résultats des exercices litigieux ;

- les intérêts de retard et majorations sont en conséquence contestés dans leur intégralité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 novembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la proposition de rectification est correctement motivée et la procédure mise en oeuvre parfaitement régulière, et une éventuelle irrégularité de la vérification de comptabilité est en tout état de cause sans incidence, dès lors qu'à défaut de souscription des déclarations de résultat et de chiffre d'affaires, la société était en situation de taxation d'office avant le contrôle ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée sont fondés, faute de preuve que le montant réel des encaissements serait inférieur à celui retenu ;

- la société n'est pas fondée à demander le report et l'imputation d'un déficit qui aurait été constaté à la fin de l'exercice clos le 30 septembre 2006, à défaut de produire sa comptabilité et d'avoir déposé ses déclarations dans les délais légaux ;

- les intérêts de retard sont dus et les majorations de 40 % sont également dues faute de dépôt des déclarations légales dans les trente jours suivant une mise en demeure.

En application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction est intervenue trois jours francs avant l'audience.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., premier conseiller,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL CD est propriétaire d'un fonds de commerce de " bar, ambiance musicale " à Saint-Etienne, qu'elle donnait en location-gérance à la SARL KNM. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2012, à l'issue de laquelle lui ont été notifiés des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2012, assortis des intérêts de retard et d'une majoration de 40 %, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2011 et 2012, du fait des exercices clos au 30 septembre, assorties d'intérêts de retard et d'une majoration de 40 %. Par un jugement du 19 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a réduit le rappel de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant en droits de 1 703 euros et des pénalités correspondantes à ce montant pour la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2012 (article 1er) et a rejeté le surplus des demandes de la SARL CD (article 2). Cette dernière demande à la cour d'annuler l'article 2 de ce jugement et de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés maintenues à sa charge, soit 13 571 euros en droits et pénalités au titre de la taxe sur la valeur ajoutée et 12 155 euros au titre de l'impôt sur les sociétés, en droits et pénalités.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Lyon a expressément répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits devant lui par la requérante. En particulier, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'ont pas omis de répondre au moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de vérification de comptabilité, le motif critiqué par la SARL CD étant de surcroît surabondant. Par suite, la SARL CD n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, il résulte du premier alinéa de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales, applicable en cas de mise en oeuvre de la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 du même livre, que les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination doivent être portées à la connaissance du contribuable par voie de notification.

4. En l'espèce, la notification adressée à la SARL CD, laquelle ne peut utilement se prévaloir des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales applicables aux seules procédures de rectification contradictoires, comporte les bases servant au calcul des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie, et porte à la connaissance de la contribuable les modalités de détermination de ces impositions pour les périodes qu'elle identifie. Elle est, ainsi, suffisamment motivée au regard de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : / (...) 2° à l'impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n'ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 68 ; / 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ". Selon le premier alinéa de l'article L. 68 du même livre, la procédure de taxation d'office prévue au 2° précité de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure.

6. Lorsque la situation d'imposition d'office d'un contribuable n'a pas été révélée par la vérification de comptabilité dont celui-ci a fait l'objet, les irrégularités qui ont pu entacher cette vérification sont sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition.

7. En l'espèce, la SARL CD ne conteste pas avoir été mise en demeure les 20 février 2012 et 18 février 2013 de déposer ses déclarations de résultats professionnels au titre des exercices respectivement clos les 30 septembre 2011 et 30 septembre 2012, sur le fondement du 2° de l'article L. 66 et de l'article L. 68 précités du livre des procédures fiscales, puis avoir été mise en demeure le 2 octobre 2013 de souscrire une déclaration annuelle de chiffre d'affaires au titre des mêmes exercices. La circonstance que le délai imparti par cette dernière mise en demeure ait expiré au cours de la vérification de comptabilité ensuite opérée n'a pas eu pour effet de faire regarder la situation de taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée comme révélée par le contrôle. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de vérification, au motif qu'elle se serait en partie déroulée sans débat contradictoire dans les locaux du comptable, est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition d'office établie à l'encontre de la SARL CD.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

8. En application des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales, il incombe à la SARL CD, dès lors que les impositions litigieuses ont été établies d'office, d'apporter la preuve de leur caractère exagéré.

S'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

9. Aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Le 1 de l'article 266 du même code prévoit que : " La base d'imposition est constituée : / a. Pour les livraisons de biens, les prestations de services et les acquisitions intracommunautaires, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ". Le c) du 2 de l'article 269 du même code dispose enfin que, pour les prestations de services, la taxe est exigible lors de l'encaissement des acomptes, du prix ou de la rémunération.

10. Il résulte de l'instruction que la SARL CD a donné un fonds de commerce en location gérance à la SARL KNM en contrepartie notamment d'une redevance mensuelle de 2 300 euros hors taxes, le locataire-gérant prenant également à sa charge la taxe sur la valeur ajoutée au taux alors en vigueur de 19,6%. Pour procéder aux rappels litigieux, l'administration fiscale a retenu que la SARL CD avait perçu pour chacun des exercices clos au 30 septembre 2011 et au 30 septembre 2012 l'intégralité des redevances contractuellement prévues, soit 27 600 euros hors taxes et avait en conséquence collecté à cette occasion 5 410 euros de taxe sur la valeur ajoutée pour chaque exercice, cette somme étant réduite à 3 707 euros pour l'exercice clos au 30 septembre 2012 du fait de la décharge partielle prononcée par les premiers juges. Il est constant que les loyers acquittés par la SARL KNM soit ont été encaissés sur un compte appartenant à la SARL Delali, qui a le même gérant que la SARL CD, laquelle est dépourvue de compte bancaire, soit ont transité par un administrateur de biens. En se bornant à produire une copie de chèques établis par la SARL KNM à la SARL Delali, pour un montant total inférieur à celui retenu par l'administration, la SARL CD n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'existence d'impayés de la part du locataire-gérant pour le surplus de loyers appelés. S'agissant en outre de la période correspondant à l'exercice clos au 30 septembre 2012, la preuve d'un encaissement moindre n'est pas davantage rapportée par la production de chèques établis par la SARL Delali à la SARL KNM, dont rien ne démontre qu'il s'agirait de remboursements des redevances versées, étant observé que la requérante reconnaît elle-même avoir encaissé, par l'intermédiaire de la société Delali, plus de 30 000 euros au cours de cette période et n'explique pas pour quel motif elle aurait été tenue de restituer au locataire une partie des loyers versés. Si la SARL CD produit enfin en cause d'appel un arrêt de la cour d'appel de Lyon condamnant la SARL KNM à lui payer une somme de 94 683,88 euros au titre d'un arriéré de redevances de location-gérance, arrêté au 30 septembre 2015, il ressort des motifs de cet arrêt que la résiliation du bail de location-gérance a été ordonnée au vu d'un arriéré de loyers ne portant que sur la période d'avril à août 2012, que des versements ont repris à compter de septembre 2012, et que la condamnation prononcée correspond au seul arriéré né à compter de la cessation totale du versement des redevances à la fin de l'année 2012. Il suit de là que la SARL CD n'est pas fondée à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2012.

S'agissant des contributions supplémentaires d'impôt sur les sociétés :

11. En premier lieu, il résulte du I de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige, qu'un déficit subi pendant un exercice est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice ou, s'il n'est pas suffisant, au cours des exercices suivants.

12. La SARL CD reprend en appel, sans apporter de justification supplémentaire, le moyen tiré de ce qu'elle serait en droit d'imputer sur le résultat des exercices vérifiés des déficits antérieurs remontant à l'exercice clos au 30 septembre 2006. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon au point 10 du jugement déféré.

13. En second lieu, les prétentions de la SARL CD relatives à la déductibilité éventuelle de certaines charges ne sont pas assorties des précisions suffisantes permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

Sur les pénalités :

14. La demande de la SARL CD tendant à la décharge des pénalités n'est formée que par voie de conséquence de la demande tendant à la décharge des droits et n'est assortie d'aucun moyen propre. Elle doit dès lors être rejetée en conséquence du rejet des demandes tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL CD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de ses demandes de décharge.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à SARL CD la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête SARL CD est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL CD et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme A..., présidente assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2021.

2

N° 19LY01753


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01753
Date de la décision : 14/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Report déficitaire.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Mathilde LE FRAPPER
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : POMEON

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-01-14;19ly01753 ?
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