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17/12/2020 | FRANCE | N°19LY01511

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 17 décembre 2020, 19LY01511


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 2 mars 2018 par laquelle le recteur de l'académie de Lyon a refusé d'accorder à son fils, M. A... B..., des aménagements aux épreuves anticipées du baccalauréat 2018, d'enjoindre au recteur de l'académie de Lyon d'accorder des aménagements à son fils pour les épreuves du baccalauréat 2019 ou de réexaminer sa situation, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une

somme de 2 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 2 mars 2018 par laquelle le recteur de l'académie de Lyon a refusé d'accorder à son fils, M. A... B..., des aménagements aux épreuves anticipées du baccalauréat 2018, d'enjoindre au recteur de l'académie de Lyon d'accorder des aménagements à son fils pour les épreuves du baccalauréat 2019 ou de réexaminer sa situation, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1804989 du 14 février 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 avril 2019 et un mémoire enregistré le 3 septembre 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1804989 du 14 février 2019 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée du recteur de l'académie de Lyon du 2 mars 2018 ainsi que la décision du 4 mai 2018 rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions contestées refusant d'accorder à son fils les aménagements sollicités pour les épreuves anticipées du baccalauréat sont entachées d'une erreur d'appréciation ;

- elles constituent une discrimination fondée sur le handicap ;

- elles sont entachées d'une rupture d'égalité entre la situation de M. A... B... et celles d'autres élèves dyslexiques qui se sont vus accorder des aménagements ;

- le recteur s'est cru lié à tort par l'avis du médecin désigné par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ;

- la décision de refus est insuffisamment motivée en fait.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2020, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de l'éducation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Cottier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... B..., père du jeune A... B..., né le 24 août 2001, scolarisé au titre de l'année 2017-2018 en classe de première sciences et technologies de l'industrie et du développement durable au lycée Descartes à Saint-Genis-Laval et atteint de dyslexie et de dysorthographie, a sollicité, le 9 novembre 2017, des aménagements des conditions d'examen de son fils pour les épreuves anticipées de la session 2018 du baccalauréat. Après avoir consulté le médecin désigné par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, le recteur de l'académie de Lyon a, par une décision du 2 mars 2018, refusé de faire droit à cette demande d'aménagement. M. B... relève appel du jugement du 14 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ainsi que celle du 4 mai 2018 du recteur de l'académie de Lyon rejetant son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 112-4 du code de l'éducation : " Pour garantir l'égalité des chances entre les candidats, des aménagements aux conditions de passation des épreuves orales, écrites, pratiques ou de contrôle continu des examens ou concours de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur, rendus nécessaires en raison d'un handicap ou d'un trouble de la santé invalidant, sont prévus par décret. Ces aménagements peuvent inclure notamment l'octroi d'un temps supplémentaire et sa prise en compte dans le déroulement des épreuves, la présence d'un assistant, un dispositif de communication adapté, la mise à disposition d'un équipement adapté ou l'utilisation, par le candidat, de son équipement personnel ". Aux termes de l'article D. 112-1 de ce code : " Afin de garantir l'égalité de leurs chances avec les autres candidats, les candidats aux examens ou concours de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur qui présentent un handicap tel que défini à l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles bénéficient des aménagements rendus nécessaires par leur situation, dans les conditions définies aux articles D. 351-27 à D. 351-32 en ce qui concerne l'enseignement scolaire. Ces aménagements portent sur tous les examens ou concours de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur organisés par le ministre chargé de l'éducation et le ministre chargé de l'enseignement supérieur ou par des établissements sous tutelle ou services dépendant de ces ministres. Ils peuvent porter sur toutes les formes d'épreuves de ces examens ou concours, quel que soit le mode d'évaluation des épreuves et, pour un diplôme, quel que soit son mode d'acquisition. Ils peuvent, selon les conditions individuelles, s'appliquer à tout ou partie des épreuves ". Selon l'article D. 351-27 du même code : " Les candidats aux examens ou concours de l'enseignement scolaire qui présentent un handicap peuvent bénéficier d'aménagements portant sur : 1° Les conditions de déroulement des épreuves, de nature à leur permettre de bénéficier des conditions matérielles ainsi que des aides techniques et humaines appropriées à leur situation ; 2° Une majoration du temps imparti pour une ou plusieurs épreuves, qui ne peut excéder le tiers du temps normalement prévu pour chacune d'elles.. (...) ". Aux termes de l'article D. 351-28 de ce même code : " Les candidats sollicitant un aménagement des conditions d'examen ou de concours adressent leur demande à l'un des médecins désignés par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. La demande doit être formulée au plus tard à la date limite d'inscription à l'examen ou au concours concerné, sauf dans le cas où le handicap est révélé après cette échéance. Le médecin rend un avis, qui est adressé au candidat et à l'autorité administrative compétente pour ouvrir et organiser l'examen ou le concours, dans lequel il propose des aménagements. L'autorité administrative décide des aménagements accordés et notifie sa décision au candidat ". Selon l'article L. 114 du code de l'action sociale et des familles, " C... un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution C... un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

4. La décision attaquée du 2 mars 2018 mentionne que la situation d'A... B..., examinée par le médecin désigné par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées en application des dispositions de l'article D. 351-27 à D. 351-31 du code de l'éducation, ne relève pas d'une situation de handicap ou d'un trouble de la santé invalidant au sens de l'article L. 112-4 du code de l'éducation, dont les dispositions sont reproduites dans la décision, lui permettant de bénéficier des aménagements des conditions d'examen sollicités. Ainsi, cette décision contient l'exposé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, alors même que l'avis du médecin désigné par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées n'y était pas annexé. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation en fait doit être écarté.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment des termes de la décision attaquée du 2 mars 2018, que le recteur de l'académie de Lyon a tenu compte de l'avis du médecin désigné par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées dans l'examen qu'il a fait de la situation d'A... B..., sans pour autant s'estimer à tort lié par cet avis. Le moyen tiré de ce que le recteur aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit, dès lors, être écarté.

6. En troisième lieu, M. B... fait valoir, d'une part, que son fils A..., pour lequel un plan d'accompagnement personnalisé, tel que prévu par les dispositions de l'article L. 311-7 du code de l'éducation, a été mis en place à compter du 25 novembre 2016 en raison de la dyslexie et de la dysorthographie dont il est atteint, avait bénéficié, en 2016, d'une majoration du temps imparti pour les épreuves du brevet des collèges et s'est vu accorder un aménagement pour passer les épreuves finales du baccalauréat au titre de l'année 2019, d'autre part, que l'orthophoniste chargée du suivi de son fils a estimé que des adaptations scolaires étaient alors indispensables et, enfin, que les pathologies dont il est affecté présentent un caractère durable. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, le 12 février 2018, le médecin désigné par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées a estimé, au vu des éléments qui lui étaient soumis, que la situation du jeune A... B... ne justifiait pas, à cette date, la mise en place d'aménagements particuliers. Au demeurant, à la suite du recours gracieux formé par M. B... à l'encontre de la décision du 2 mars 2018, le recteur de l'académie de Lyon a sollicité l'avis d'un second médecin désigné par cette commission, lequel a, le 25 avril 2018, porté la même appréciation sur la situation du candidat. Les éléments d'ordre médical fournis à l'appui de la demande d'aménagement des conditions d'examen adressée au médecin de la commission, renseignés par le requérant lui-même, en sa qualité de médecin généraliste, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le médecin désigné par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. Il ressort en outre des bulletins scolaires, produits au dossier, que les difficultés rencontrées par le jeune A... B... au titre de l'année 2017-2018 sont liées non pas à ses troubles mais à un manque de travail et de sérieux. La circonstance que, postérieurement à la décision attaquée, A... B... a bénéficié d'aménagements des conditions d'examen au titre des épreuves finales de la session 2019 du baccalauréat, au vu notamment d'un bilan orthophonique actualisé au 9 novembre 2018, ne suffit pas à remettre en cause l'analyse portée par le recteur à la date de la décision contestée. Au surplus, les notes du candidat aux épreuves anticipées de français et d'histoire-géographie du baccalauréat en 2018 ont été supérieures à la moyenne de celles qu'il avait obtenues dans ces matières au cours de l'année scolaire. Enfin, le fait que son frère, également atteint de dyslexie, ou d'autres élèves souffrant de cette pathologie se soient vus accorder des aménagements n'est pas, en lui-même, de nature à révéler une rupture d'égalité entre les candidats. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le recteur de l'académie de Lyon a pu, sans entacher sa décision d'une erreur d'appréciation ni d'une violation du principe d'égalité des candidats à l'examen, estimer que la gravité du trouble dont souffre A... B... n'était pas suffisante pour lui accorder un aménagement des conditions d'examen lors des épreuves anticipées du baccalauréat en 2018. Pour les mêmes motifs, la décision contestée n'est pas davantage entachée d'une discrimination à raison du handicap.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à M. A... B... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Lyon.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 17 décembre 2020.

2

N° 19LY01511


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01511
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-01-04-03 Enseignement et recherche. Questions générales. Examens et concours. Droits des candidats.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : BOUHALASSA

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-17;19ly01511 ?
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