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17/12/2020 | FRANCE | N°18LY04216

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 17 décembre 2020, 18LY04216


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le conservatoire national supérieur de musique et de danse a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la métropole de Lyon à lui verser une somme de 1 205 005,40 euros, à titre subsidiaire, de condamner conjointement et solidairement la métropole de Lyon et la société Veolia eau - compagnie générale des eaux, à défaut la seule société Veolia eau - compagnie générale des eaux, à lui verser cette indemnité et de mettre à la charge de la partie perdante le versement d'une somme de 20 0

00 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le conservatoire national supérieur de musique et de danse a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la métropole de Lyon à lui verser une somme de 1 205 005,40 euros, à titre subsidiaire, de condamner conjointement et solidairement la métropole de Lyon et la société Veolia eau - compagnie générale des eaux, à défaut la seule société Veolia eau - compagnie générale des eaux, à lui verser cette indemnité et de mettre à la charge de la partie perdante le versement d'une somme de 20 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n 1604165-1703857 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Lyon a condamné la société Veolia eau - compagnie générale des eaux à verser au conservatoire national supérieur de musique et de danse la somme de 954 752,17 euros ainsi que les sommes de 83 133,40 et 1 200 euros au titre des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 27 novembre 2018, la société Veolia eau - compagnie générale des eaux, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er à 3 du jugement n° 1604165-1703857 du 2 octobre 2018 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter toute demande présentée à son encontre ou, à titre subsidiaire, de réduire le préjudice invoqué par le conservatoire national supérieur de musique et de danse à de plus justes proportions ;

3°) de condamner le conservatoire national supérieur de musique et de danse ou tout autre succombant à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens ;

Elle soutient que :

- elle n'engage pas sa responsabilité en tant que concessionnaire du service public de distribution de l'eau potable en l'absence de preuve d'un défaut d'entretien de la canalisation à l'origine du glissement de terrain et de l'effondrement du mur de soutènement de la parcelle appartenant au conservatoire ;

- elle n'engage pas sa responsabilité en application de l'article 60 du contrat d'affermage le rendant responsable du bon fonctionnement du réseau d'eau potable ;

- elle n'engage pas sa responsabilité du fait d'un cas de force majeure ;

- les prétentions du conservatoire national de musique et de danse doivent être réduites à de plus justes proportions.

Par un mémoire, enregistré le 5 mars 2019, le conservatoire national supérieur de musique et de danse, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce que tout succombant lui verse la somme de 30 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, par la voie de l'appel incident ou provoqué, demande à la cour de condamner la société Veolia eau - compagnie générale des eaux ou la métropole de Lyon à lui verser la somme 1 380 281,40 euros.

Elle fait valoir que :

- la société Veolia eau -compagnie générale des eaux engage sa responsabilité en tant que concessionnaire du service public de distribution de l'eau potable dès lors que l'article 60 du contrat d'affermage la rend responsable du bon fonctionnement du réseau et que ses préjudices sont directement liés à une rupture de canalisation non provoquée par un cas de force majeure ;

- si la responsabilité de la société Veolia eau - compagnie générale des eaux ne devait pas être retenue, alors celle de la métropole, propriétaire de la canalisation à l'origine de ses dommages, serait nécessairement engagée ;

- le tribunal administratif a rejeté à tort ses demandes concernant des factures d'électricité, de gaz et de fioul et des dépens ont été omis ; son préjudice s'est aggravé tenant à la réalisation des travaux nécessaires à la réfection de la balme et du bâtiment sinistré dont le coût a dépassé le prévisionnel estimé par l'expert ou n'ont pas été prévus par lui.

Par un mémoire enregistré le 3 juin 2019, la métropole de Lyon, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la société Veolia eau - compagnie générale des eaux lui verse la somme de 3 000 euros au titre de ses frais exposés et non compris dans les dépens et demande, à titre subsidiaire, à être garantie par la société Veolia eau - compagnie générale des eaux de toutes condamnations prononcées à son encontre.

Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante sont infondés.

En application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées de ce que la cour était susceptible de soulever le moyen d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions d'appel provoqué du conservatoire national supérieur de musique et de danse dirigées contre la métropole de Lyon dès lors que sa situation n'est pas aggravée à l'issue de l'appel principal.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire ;

- le décret n 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gayrard, président assesseur,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteur public,

- les observations de Me Renaud, avocat de la société Veolia eau ;

- les observations de Me A..., avocat du conservatoire national supérieur de musique et de danse ;

- et les observations de Me Rey, avocat de la métropole de Lyon.

Considérant ce qui suit :

1. Le conservatoire national supérieur de musique et de danse de Lyon, établissement public national à caractère administratif, est l'affectataire, selon arrêté ministériel du 7 juillet 1983, d'une parcelle cadastrée section A n° 120 appartenant à l'Etat et sise 3 quai Chauveau à Lyon comprenant un terrain d'environ 4,5 hectares et des bâtiments situés au bas de la montée de l'Observance sur la colline de Fourvière. Le 4 décembre 2013 en soirée a eu lieu un glissement de terrain sur cette montée entrainant une première coulée de boue sur la parcelle, l'affouillement du mur de soutènement et l'évacuation du bâtiment dit Varèse suivi, le 6 décembre suivant, de l'écroulement du mur de soutènement avec un nouvel apport de végétaux et de boue. Par ordonnance du 4 janvier 2014, une expertise a été diligentée par le tribunal administratif de Lyon ; l'expert a remis son rapport le 10 juillet 2015. Par requête enregistrée le 7 juin 2016, sous le n° 1604165, le conservatoire national supérieur de musique et de danse a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la métropole de Lyon et/ou la société Veolia eau - compagnie générale des eaux à lui verser la somme de 1 205 005,40 euros en réparation de ses préjudices. Des riverains, M. et Mme D..., ont également recherché la responsabilité de la métropole de Lyon sous une requête n° 1703857. Par jugement du 2 octobre 2018, joignant les deux requêtes, le tribunal administratif de Lyon a notamment condamné la société Veolia eau -compagnie générale des eaux à verser au conservatoire national supérieur de musique et de danse la somme de 954 752,17 euros, a mis à sa charge les frais d'expertise d'un montant de 85 133,40 euros et a rejeté le surplus des conclusions des parties. Par sa requête enregistrée le 27 novembre 2018, la société Veolia eau -compagnie générale des eaux demande l'annulation des articles 1er à 3 de ce jugement et au rejet des demandes dirigées contre elle. Par mémoire enregistré le 5 mars 2019, le conservatoire national supérieur de musique et de danse a présenté des conclusions d'appel incident et provoqué tendant, d'une part, à la condamnation de Veolia eau -compagnie générale des eaux à verser la somme de 1 380 281,40 euros et, d'autre part, à la condamnation de la métropole de Lyon à la même somme.

Sur la responsabilité :

2. En cas de dommage accidentel causé à des tiers par un ouvrage public, la victime peut en demander réparation, même en l'absence de faute, au propriétaire ou, le cas échéant, au gestionnaire dudit ouvrage. Il appartient toutefois à ladite victime de rapporter la preuve du lien de causalité direct et certain entre l'ouvrage ou le travail public et le dommage dont elle demande réparation. Les personnes mises en cause doivent alors, pour dégager leur responsabilité, établir la preuve que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure. Dans l'hypothèse d'une délégation de service public limitée à l'exploitation de l'ouvrage public en cause, comme c'est le cas en matière d'affermage, si la responsabilité des dommages imputables à son fonctionnement relève en principe du délégataire, sauf stipulations contractuelles contraires, celle résultant de dommages imputables à son existence, à sa nature et à son dimensionnement, appartient à la personne publique propriétaire et délégante.

3. Il n'est pas sérieusement contesté que le glissement de terrain à l'origine des dégâts causés à l'ensemble immobilier dont le conservatoire national supérieur de musique et de danse est l'affectataire a pour origine la rupture d'une canalisation d'eau potable appartenant à la métropole de Lyon et exploitée par la société Veolia eau - compagnie générale des eaux selon traité d'affermage du 6 octobre 1970. Ce contrat stipule dans son article 9 que le délégataire assure l'entretien normal de tous les ouvrages à ses frais. Les stipulations du 3° de l'article 24 ter prévoient que les travaux de renouvellement des canalisations de distribution vétustes ou présentant une usure anormale sont à la charge du délégataire, les autres travaux de renouvellement restant à la charge du délégant, le 4° de l'article 24 quinquiès précisant que le délégataire assume également les travaux d'entretien comprenant la surveillance générale des réseaux et la recherche et réparation de fuites et ruptures, le délégant assurant les travaux de remplacement de canalisation sur une longueur supérieure à 12 mètres. Enfin, l'article 60 rappelle que le délégataire est responsable du bon fonctionnement du service et assume la responsabilité civile des dommages pouvant résulter de l'exploitation des ouvrages affermés ainsi que les risques de détérioration par phénomènes naturels de ces mêmes ouvrages.

4. D'une part, contrairement à ce que soutient la société Veolia eau -compagnie générale des eaux, il ressort des stipulations mentionnées au point précédent que sa responsabilité du fait des dommages causés par les ouvrages publics affermés n'est pas limitée au manquement dans son obligation d'entretien mais porte sur le fonctionnement même de l'ouvrage. Si la société Veolia eau -compagnie générale des eaux fait valoir qu'au vu de sa rupture brutale, la canalisation en cause devait faire l'objet de travaux de renouvellement incombant au maitre d'ouvrage, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que si cette canalisation en fonte était ancienne et présentait une corrosion graphitique constituant un facteur favorable à sa rupture, elle ne présentait toutefois aucune fuite et n'avait donc pas à être renouvelée alors qu'au demeurant, la société Veolia eau -compagnie générale des eaux ne soutient, ni même n'allègue, que cet ouvrage aurait fait l'objet d'un signalement de sa part au titre de son obligation de surveillance générale du réseau.

5. D'autre part, le glissement de terrain à l'origine des désordres causés à l'ensemble immobilier dont le conservatoire national supérieur de musique et de danse est l'affectataire a pour origine le fonctionnement de la canalisation qui a déversé de grandes quantités d'eau dans les sols, et ne découle nullement de l'existence de l'ouvrage ou même de ses caractéristiques intrinsèques. Dès lors qu'en application de l'article 60 du traité d'affermage la société Veolia eau -compagnie générale des eaux est responsable du bon fonctionnement du réseau d'eau potable, il engage sa responsabilité pour les dommages résultant de l'exploitation des ouvrages publics affermés, ledit article visant expressément l'hypothèse de la détérioration des ouvrages par phénomènes naturels, sans distinction comme le soutient la société Veolia eau -compagnie générale des eaux, des détériorations progressives ou brutales, et ce quelle qu'en soit la cause. Par suite, la société Veolia eau -compagnie générale des eaux engage sa responsabilité à l'égard du conservatoire national supérieur de musique et de danse, tiers à l'ouvrage public en cause, du fait des dommages imputables à la rupture de la canalisation.

6. Enfin, la société Veolia eau -compagnie générale des eaux soutient que la rupture de la canalisation relève d'un cas de force majeure en l'absence de cause déterminée. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que quatre hypothèses sont envisageables dont un mouvement localisé de terrain ou un phénomène de tassement différé, de roulements de charroi sur la chaussée ou encore de vibrations, qui relèvent pour l'essentiel de causes naturelles. En raison de la configuration des lieux, de précédents mouvements de terrain se sont produits à proximité en 1988 et 1989 amenant la ville de Lyon à exiger de la société Veolia eau -compagnie générale des eaux une surveillance accrue des canalisations dans ce secteur selon procès-verbal du 2 février 1989. Même si elle ne présentait pas de fuite, la canalisation en cause était ancienne et corrodée, favorisant le risque de rupture. Dès lors, l'évènement n'a pas revêtu un caractère imprévisible et ne constitue donc pas un cas de force majeure de nature à exonérer la société Veolia eau -compagnie générale des eaux de sa responsabilité.

7. Il découle de ce qui précède que la société Veolia eau -compagnie générale des eaux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a retenu sa responsabilité et l'a condamnée à réparer les conséquences dommageables découlant de la rupture de la canalisation, ouvrage public dont elle devait assurer le bon fonctionnement.

Sur les préjudices :

8. Il résulte de l'instruction que le glissement de terrain consécutif à la rupture de canalisation a provoqué l'effondrement du mur de soutènement et des coulées de boue et de débris divers ont envahi la parcelle et le bâtiment Varèse. Le conservatoire a fait procéder à la conception et la réalisation de mesures conservatoires, a délocalisé son activité dans divers lieux puis dans deux bâtiments dits Ardèche et Saône mis à disposition gratuitement par l'Etat, et enfin a fait préparer et réaliser les travaux de remise en ordre de la balme et du bâtiment Varèse.

9. En premier lieu, le conservatoire national supérieur de musique et de danse demande le paiement des frais liés aux mesures conservatoires prises après le glissement de terrain comprenant l'élagage d'arbres, l'enlèvement de boues et débris, le drainage du terrain, le bétonnage d'éléments fragilisés, la mise en sécurité des lieux et enfin la définition même de ces mesures. En l'absence de toute contestation sur ce chef de préjudice, il y a lieu de reprendre le chiffrage retenu par le tribunal administratif de Lyon, soit la somme de 188 760,89 euros.

10. En deuxième lieu, le conservatoire demande à être indemnisé des frais exposés pour la poursuite de son activité en extérieur comprenant la location de salles ou de préfabriqués ainsi que des déplacements fréquents de personnel ou d'instruments de musique. Il demande ensuite le remboursement des frais occasionnés par l'occupation des bâtiments Ardèche et Saône portant sur des travaux de remise aux normes et de rénovation de ces locaux désaffectés depuis 2011, des prestations de nettoyage ou encore des frais d'électricité, de gaz et de fioul. Sur ce dernier point, le conservatoire reproche au tribunal administratif de Lyon d'avoir écarté ces factures alors que l'expert les avaient bien intégrées dans ses préjudices. Toutefois, si le conservatoire justifie avoir repris un abonnement EDF début 2014 pour le bâtiment Varèse afin de maintenir l'alimentation de centrales de traitement d'air, il n'a pas produit, tant en première instance qu'en appel, les factures correspondantes ainsi que celles antérieures au glissement de terrain afin de justifier d'un surcoût lié au paiement des frais d'électricité des bâtiments Ardèche et Saône. Le conservatoire ne justifie pas davantage qu'il aurait maintenu un chauffage à gaz ou à fioul pour le bâtiment Varèse et ainsi ne justifie pas davantage d'un surcoût lié à l'approvisionnement à sa charge des bâtiments Ardèche et Saône. Si la société Veolia eau -compagnie générale des eaux conteste sommairement la prise en compte des frais de personnel technique, de sécurité, de techniciens, d'accordeur, de transports de piano ou encore de prestations de nettoyage, elle n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé en se bornant à renvoyer aux écritures de la métropole de Lyon en première instance sans les produire à l'appui de sa requête. En tout état de cause, il y a lieu d'écarter le moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Lyon. Il découle de ce qui précède que ce dernier n'a pas inexactement évalué les préjudices subis par le conservatoire national supérieur de musique et de danse dans l'externalisation de son activité en retenant la somme de 141 882,73 euros.

11. En troisième lieu, le conservatoire national supérieur de musique et de danse demande le remboursement des frais de remise en état du terrain et du bâtiment Varèse pour un montant de 735 624,34 euros comprenant le coût des études, des travaux et leur suivi, outre des prestations de nettoyage. Alors que le tribunal administratif de Lyon a repris les estimations du coût des travaux et de maitrise d'oeuvre issues du rapport d'expertise pour un montant de 552 367,20 euros, le conservatoire fait valoir que l'exécution des marchés afférents aux travaux de remise en ordre a dépassé ce montant prévisionnel avec un montant de 677 756,34 euros. En principe, les dommages subis du fait du glissement de terrain doivent être évalués à la date où, leur cause ayant pris fin et leur étendue étant connue, il pouvait être procédé aux travaux destinés à les réparer. Toutefois, en l'espèce, c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a retenu la date à laquelle l'expert désigné par le tribunal administratif a déposé son rapport dès lors que si celui-ci a bien défini la nature et l'étendue des travaux nécessaires à la remise en ordre du terrain et du bâtiment, il indiquait expressément que les montants des travaux, établis sur un seul devis de la société alpine de géotechnique d'avril 2015, restaient à parfaire, l'étude géotechnique n'étant pas encore aboutie, et alors que les consultations pour les travaux n'étaient pas encore lancées. Dans ces conditions, le conservatoire national supérieur de musique et de danse est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif ne lui a octroyé que la somme de 610 235,20 euros au titre des travaux et prestations de remise en ordre du terrain et du bâtiment Varèse. Il y a lieu de réformer le jugement sur ce point et de retenir la somme, non contestée par les autres parties et dûment justifiée par les pièces contractuelles produites, de 735 624,34 euros.

12. En quatrième lieu, le conservatoire national supérieur de musique et de danse soutient que des travaux supplémentaires non prévus par l'expert ont dû être réalisés concernant le confortement du mur de soutènement côté parcelle du conservatoire pour garantir une meilleure stabilité du talus pour un montant de 49 526 euros et la reprise de trois galeries pour un montant de 127 750 euros. Toutefois, les premiers travaux sont liés à la reconstruction du mur de soutènement et à la nature du talus de déblais composé de limons à galets en limite de stabilité sur la moitié sud et à du rocher très fracturé sur la moitié nord et pour les seconds, aucune explication n'est donnée sur l'origine des désordres des trois galeries alors que, lors de l'expertise, celles-ci avaient été inspectées et l'expert avait relevé un bon état général de la structure des différents rameaux de l'ensemble des galeries. Par suite, le conservatoire national supérieur de musique et de danse n'établissant pas l'existence d'un lien de causalité direct et certain avec les désordres engendrés par le glissement de terrain survenus les 4 et 6 décembre 2013, sa demande tendant à en obtenir le remboursement des travaux précités ne peut qu'être rejetée.

13. En dernier lieu, le conservatoire national supérieur de musique et de danse demande à être défrayé de frais de suivi du sinistre comprenant des frais d'huissier pour les constats initiaux du sinistre le 11 décembre 2013, lesquels ne constituent pas des dépens contrairement à ce que soutient la société Veolia eau -compagnie générale des eaux, des frais exposés pour l'édiction de l'arrêté de péril imminent et des frais d'avocat exposés pour le suivi de l'expertise. Si, pour ce dernier poste, le conservatoire national supérieur de musique et de danse soutient que les frais y afférents sont de 27 048 euros au lieu de la somme de 13 008 euros retenue par le jugement attaqué, il n'apporte aucun justificatif de nature à établir un tel montant. Par suite, il y a lieu d'en rester à l'évaluation faite par le tribunal administratif de frais d'un montant total de 13 873,35 euros.

14. Il découle de tout ce qui précède que les préjudices subis par le conservatoire national supérieur de musique et de danse sont fixés à la somme de 1 080 141,31 euros. Il y a lieu, par suite, de réformer l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Lyon du 2 octobre 2018 sous le n° 1604165-1703857 et de condamner la société Veolia eau -compagnie générale des eaux à verser au conservatoire la somme précitée.

Sur les frais d'expertise :

15. Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 85 133,40 euros selon ordonnance du 22 septembre 2015, sont laissés à la charge de la société Veolia eau -compagnie générale des eaux.

Sur les frais d'instance :

16. Il y a lieu de condamner la société Veolia eau -compagnie générale des eaux à verser au conservatoire national supérieur de musique et de danse la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la métropole de Lyon.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Veolia eau - compagnie générale des eaux est rejetée.

Article 2 : La somme que la société Veolia eau - compagnie générale des eaux a été condamnée à verser au conservatoire national supérieur de musique et de danse est portée au montant de 1 080 141,31 euros.

Article 3 : Le jugement n° 1604165-1703857 du 2 octobre 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 83 133,40 euros, sont laissés à la charge de la société Veolia eau - compagnie générale des eaux.

Article 5 : La société Veolia eau - compagnie générale des eaux versera au conservatoire national supérieur de musique et de danse la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7: Le présent arrêt sera notifié à la société Veolia eau - compagnie générale des eaux, au conservatoire national supérieur de la musique et de la danse et à la métropole de Lyon.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.

N° 18LY04216 2


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Personnes responsables - Collectivité publique ou personne privée.

Travaux publics - Différentes catégories de dommages - Dommages causés par l'existence ou le fonctionnement d'ouvrages publics.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : DPA DUCROT AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Date de la décision : 17/12/2020
Date de l'import : 09/01/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18LY04216
Numéro NOR : CETATEXT000042712482 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-17;18ly04216 ?
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