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12/11/2020 | FRANCE | N°19LY04519

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 12 novembre 2020, 19LY04519


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Du Nant et la SARL Garage Dunand, d'une part, et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France, d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 10 avril 2018 du préfet de l'Ain déclarant cessibles au profit de la société publique locale (SPL) Territoire d'innovation les parcelles nécessaires à la réalisation de la zone d'aménagement concerté " Ferney-Genève Innovation ".

Par des jugements n°s 1808769 et 1807633 du 9 octobre 2019, le trib

unal a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

I. Par une requête enregist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SCI Du Nant et la SARL Garage Dunand, d'une part, et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France, d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 10 avril 2018 du préfet de l'Ain déclarant cessibles au profit de la société publique locale (SPL) Territoire d'innovation les parcelles nécessaires à la réalisation de la zone d'aménagement concerté " Ferney-Genève Innovation ".

Par des jugements n°s 1808769 et 1807633 du 9 octobre 2019, le tribunal a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

I. Par une requête enregistrée le 10 décembre 2019, la SCI Du Nant et la SARL Garage Dunand, représentées par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1808769 et l'arrêté préfectoral du 10 avril 2018 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SPL Territoire d'innovation la somme de 5 000 euros au titre des frais du litige.

Elles soutiennent que :

- le tribunal a méconnu le principe d'égalité des armes garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en leur impartissant en plein mois d'août un délai de quinze jours seulement pour répliquer au mémoire en défense et en ne communiquant pas leur mémoire en réplique ;

- il n'a pas répondu au moyen, fondé, tiré de ce que la SPL Territoire d'innovation ne justifie pas d'une délégation précise pour mener la procédure en cause d'acquisition par voie d'expropriation ;

- il a insuffisamment motivé sa réponse au moyen, fondé, tiré de ce que le préfet de région ne pouvait régulièrement être consulté comme autorité environnementale ;

- il n'a pas répondu à l'ensemble des arguments invoqués à l'appui du moyen, fondé, tiré de l'absence d'utilité publique de l'opération d'expropriation.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 juin 2020, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Elle déclare s'en rapporter au mémoire en défense produit en première instance par le préfet de l'Ain et fait valoir en outre que :

- les moyens tirés de l'illégalité de la délibération approuvant le traité de concession et de la méconnaissance de l'article 6 de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 sont inopérants et en tout état de cause l'exigence d'autonomie résultant de la directive a été respectée ;

- les autres moyens soulevés par les appelantes ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 6 juillet 2020, la SPL Territoire d'innovation, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge des sociétés appelantes Du Nant et Garage Dunand, au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- les moyens tirés de l'illégalité de la délibération approuvant le traité de concession et de la méconnaissance de l'article 6 de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 sont inopérants et en tout état de cause l'exigence d'autonomie résultant de la directive a été respectée ;

- les autres moyens soulevés par les appelantes ne sont pas fondés.

Un mémoire enregistré le 9 octobre 2020 présenté pour la SCI Du Nant et la SARL Garage Dunand n'a pas été communiqué.

II. Par une requête enregistrée le 10 décembre 2019, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France, représenté par Me B..., demande à la cour

1°) d'annuler le jugement n° 1807633 et l'arrêté préfectoral du 10 avril 2018 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SPL Territoire d'innovation la somme de 5 000 euros au titre des frais du litige.

Il soutient que :

- le tribunal a méconnu le principe d'égalité des armes garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en leur impartissant en plein mois d'août un délai de quinze jours seulement pour répliquer au mémoire en défense et en ne communiquant pas leur mémoire en réplique ;

- il n'a pas répondu au moyen, fondé, tiré de ce que la SPL Territoire d'innovation ne justifie pas d'une délégation précise pour mener la procédure en cause d'acquisition par voie d'expropriation ;

- il a insuffisamment motivé sa réponse au moyen, fondé, tiré de ce que le préfet de région ne pouvait régulièrement être consulté comme autorité environnementale ;

- il n'a pas répondu à l'ensemble des arguments invoqués à l'appui du moyen, fondé, tiré de l'absence d'utilité publique de l'opération d'expropriation ;

- le préfet de l'Ain a commis une erreur manifeste d'appréciation en incluant ses parcelles cadastrées section AN n°s 310 et 311 dans l'emprise de la déclaration d'utilité publique ;

- l'absence de document d'arpentage, qui est une obligation constituant une garantie pour les propriétaires, entache d'irrégularité l'arrêté de cessibilité.

Par un mémoire enregistré le 30 septembre 2020, la SPL Territoire d'innovation, représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge du syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- la demande et l'appel du syndicat sont irrecevables en l'absence d'habilitation précisant l'objet et la finalité du contentieux engagé ;

- les moyens tirés de l'illégalité de la délibération approuvant le traité de concession et de la méconnaissance de l'article 6 de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 sont inopérants et en tout état de cause l'exigence d'autonomie résultant de la directive a été respectée ;

- les autres moyens soulevés par le syndicat ne sont pas fondés.

Un mémoire enregistré le 9 octobre 2020 présenté pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les observations de Me A..., représentant la SCI Du Nant, la SARL Garage Dunand et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France et celles de Me E..., représentant la SPL Territoire d'innovation.

Considérant ce qui suit :

1. Il y a lieu de joindre, pour qu'il y soit statué par un même arrêt, les requêtes visées ci-dessus qui ont le même objet et ont fait l'objet d'une instruction commune.

2. Par une délibération du 20 novembre 2013, le conseil communautaire de la communauté de communes du Pays de Gex a créé sur le territoire de la commune de Ferney-Voltaire la zone d'aménagement concertée (ZAC) " Ferney-Genève Innovation " à vocation d'habitation et d'activités, d'une superficie de 65 hectares, et approuvé le dossier de création de la ZAC. La réalisation de cet aménagement a été confiée à la société publique locale (SPL) Territoire d'innovation par un traité de concession du 27 mars 2014. Deux enquêtes conjointes, l'une préalable à la déclaration d'utilité publique, l'autre parcellaire, ont été organisées du 8 février 2016 au 18 mars 2016. Par un arrêté du 22 juillet 2016, le préfet de l'Ain a déclaré d'utilité publique l'acquisition de terrains nécessaires au projet d'aménagement. La commission d'enquête ayant émis un avis défavorable sur l'emprise du projet, le préfet a prescrit une nouvelle enquête parcellaire à l'issue de la laquelle, par un arrêté du 10 avril 2018, il a déclaré cessibles au profit de la SPL Territoire d'innovation les parcelles nécessaires à la réalisation de la ZAC. La SCI Du Nant et la SARL Garage Dunand, d'une part, et le syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France, d'autre part, propriétaires de parcelles déclarées cessibles, ont demandé l'annulation de l'arrêté de cessibilité au tribunal administratif de Lyon. Par des jugements du 9 octobre 2019 dont ils relèvent appel, le tribunal a rejeté leurs demandes.

Sur la régularité des jugements attaqués :

3. D'une part, il ressort de l'examen des dossiers de première instance que les mémoires en défense produits par le préfet de l'Ain et la SPL Territoire d'innovation ont été communiqués les 23 mai et 30 juillet 2019 à l'avocat de la SCI du Nant et à de la SARL Garage du Nant d'une part et les 12 août et 30 juillet 2019 à l'avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France d'autre part. Les mémoires en réplique produits par les demandeurs, enregistrés respectivement les 19 et 22 août avant la clôture de l'instruction, fixée au 20 et au 26 août par des ordonnances du 16 juillet et du 12 août 2019, ne font pas état de difficultés particulières rencontrées pour répondre aux moyens soulevés par le préfet de l'Ain et la SPL Territoire d'innovation. Par suite, c'est sans méconnaître le principe du contradictoire de la procédure, garanti notamment par le paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que le tribunal a décidé de ne pas procéder à leur communication aux défendeurs au motif qu'ils n'apportaient pas d'éléments nouveaux.

4. D'autre part, le tribunal a répondu au point 4 du jugement n° 1808769 et au point 7 du jugement n° 1807633 au moyen soulevé devant lui par les demandeurs et tiré de ce que la convention de concession d'aménagement n'habilitait pas la SPL Territoire d'innovation à acquérir les biens en cause par la voie de l'expropriation. La pertinence de la réponse ainsi faite ne se rapporte pas à la motivation des jugements mais à leur bien-fondé.

Sur le bien-fondé des jugements attaqués :

En ce qui concerne l'illégalité, invoquée par la voie de l'exception, de l'arrêté du 22 juillet 2016 par lequel le préfet de l'Ain a déclaré d'utilité publique l'acquisition des terrains nécessaires à la réalisation de la ZAC " Ferney-Genève innovation " :

5. L'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de mener la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.

6. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de la région Rhône-Alpes, également préfet du Rhône, est, par application du III de l'article R. 122-6 du code de l'environnement, l'auteur de l'avis rendu en qualité d'autorité environnementale, qui a été préparé et formalisé par les services de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Rhône-Alpes. La déclaration d'utilité publique a quant à elle été instruite par les services de la direction des relations avec les collectivités locales de la préfecture de l'Ain. Dans ces conditions, l'avis ainsi émis par le préfet de région a été rendu par une autorité disposant d'une autonomie effective dans des conditions garantissant son objectivité.

7. Une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier, les inconvénients d'ordre social, la mise en cause de la protection et de la valorisation de l'environnement, et l'atteinte éventuelle à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente.

8. L'opération projetée de réalisation d'un nouveau quartier mixte de logements et d'activités au sud de la commune de Ferney-Voltaire constitue la déclinaison française du projet stratégique de développement entre la commune suisse du Grand-Saconnex et la commune de Ferney-Voltaire, élaboré dans une logique transfrontalière dans un but de rééquilibrage des programmes de logements et d'activités, en cohérence avec les objectifs du projet d'agglomération franco-valdo-genevois dont la charte a été signée en 2007. Le projet de ZAC permet une organisation spatiale structurée de la commune de Ferney-Voltaire, dont l'extension urbaine génère une croissance démographique significative. Il favorise la mixité sociale et contribue au développement économique par la création de logements sociaux et de nouveaux espaces à vocation d'activités. Ce projet contribue enfin à la limitation des trajets domicile-travail et permet une amélioration de l'offre de transports en commun. Cette opération qui répond ainsi à une finalité d'intérêt général ne peut être réalisée sans procéder aux expropriations litigieuses. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la délibération du 23 juin 2016 par laquelle le conseil communautaire a levé les réserves émises par la commission d'enquête, que des mesures compensatoires ont été prévues pour limiter les incidences du projet sur les terres agricoles. Dès lors, les inconvénients allégués par les appelants, qui tiendraient notamment au coût du projet, aux atteintes portées à la propriété privée et à ses conséquences sur l'environnement et l'activité agricole, au demeurant limitées, ne sont pas de nature à lui retirer son caractère d'utilité publique. Il ne saurait être remis en cause par l'invocation, d'une part, des dispositions de l'article L. 212-1 du code de l'environnement, dès lors que la déclaration d'utilité publique des acquisitions de terrains nécessaires à un aménagement n'est pas une décision "dans le domaine de l'eau", ni, d'autre part, par la voie de l'exception, du moyen tiré de l'illégalité de l'arrêté du 28 octobre 2015 du préfet de l'Ain autorisant la destruction d'espèces protégées et de leurs habitats au regard des dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du même code.

9. Il résulte de ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité de l'arrêté du 22 juillet 2016 à l'appui de leurs requêtes dirigées contre l'arrêté du 10 avril 2018.

En ce qui concerne l'arrêté du 10 avril 2018 par lequel le préfet de l'Ain a déclaré cessibles pour cause d'utilité publique au profit de la SPL Territoire d'innovation les terrains appartenant aux requérants et situés dans le périmètre de la ZAC " Ferney-Genève innovation " :

S'agissant du moyen tiré de l'absence d'habilitation de l'aménageur à acquérir les biens par la voie de l'expropriation :

10. L'article 2 du traité de concession signé le 27 mars 2014 stipulait expressément que l'acquisition de la propriété des biens pour la réalisation de la ZAC était comprise dans les missions de la SPL Territoire d'innovation. Par suite, l'arrêté du 10 avril 2018 a pu légalement déclarer cessibles à son profit les parcelles nécessaires à la réalisation de l'opération d'aménagement.

S'agissant des autres moyens soulevés dans la requête 19LY04522 :

11. Il appartient au juge, lorsqu'il se prononce sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente. Il lui appartient également, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, de s'assurer, au titre du contrôle sur la nécessité de l'expropriation, que l'inclusion d'une parcelle déterminée dans le périmètre d'expropriation n'est pas sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique.

12. Comme il a été dit au point 8, le projet contesté présente un caractère d'utilité publique. Il ressort des pièces du dossier que l'incorporation d'un segment de la parcelle cadastrée section AN n° 217 dans le périmètre de l'expropriation était justifiée par les besoins de l'élargissement de la voirie. Son expropriation était par suite nécessaire à la réalisation de la ZAC.

13. Aux termes de l'article R. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Au vu du procès-verbal prévu à l'article R. 131-9 et des documents qui y sont annexés, le préfet du département où sont situées les propriétés ou parties de propriétés dont la cession est nécessaire les déclare cessibles, par arrêté. (...) ". Aux termes de l'article R. 132-2 du même code : " Les propriétés déclarées cessibles sont désignées conformément aux prescriptions de l'article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière. L'identité des propriétaires est précisée conformément aux prescriptions du premier alinéa de l'article 5 ou du premier alinéa de l'article 6 de ce décret, sans préjudice des cas exceptionnels mentionnés à l'article 82 du décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955 pris pour l'application du décret du 4 janvier 1955. ". Aux termes de l'article 7 du décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un service chargé de la publicité foncière doit indiquer, pour chacun des immeubles qu'il concerne, la nature, la situation, la contenance et la désignation cadastrale (section, numéro du plan et lieu-dit). Le lieu-dit est remplacé par l'indication de la rue et du numéro pour les immeubles situés dans les parties agglomérées des communes urbaines. / Lorsqu'il réalise ou constate une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, l'acte ou la décision doit désigner l'immeuble tel qu'il existait avant la division et chacun des nouveaux immeubles résultant de cette division, sauf en cas de lotissement effectué dans le cadre de la législation sur les lotissements ou s'il s'agit d'immeubles situés dans les communes où le cadastre n'est pas rénové. La constitution sur une fraction de parcelle d'un droit d'usufruit, d'un droit de superficie ou d'un bail emphytéotique est considérée comme un changement de limite de propriété. / Lorsque, sans réaliser ou constater une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, il ne concerne qu'une ou plusieurs fractions d'un immeuble, l'acte ou la décision judiciaire doit comporter à la fois la désignation desdites fractions et celle de l'ensemble de l'immeuble. La désignation de la fraction est faite conformément à un état descriptif de division, ou, éventuellement, à un état modificatif, établi dans les conditions fixées par décret, et préalablement publié ; elle doit mentionner le numéro du lot dans lequel la fraction est comprise, et, sous réserve des exceptions prévues audit décret, la quote-part dans la propriété du sol afférente à ce lot. Les dispositions du présent alinéa ne sont pas applicables lorsque l'acte ou la décision concerne soit une servitude, soit un droit d'usage ou d'habitation, soit un bail de plus de douze années. Elles sont également sans application lorsque l'acte ou la décision entraîne la suppression de la division de l'immeuble. / Les mêmes indications doivent obligatoirement figurer dans tout bordereau, extrait, expédition ou copie, déposé en vue de l'exécution de la formalité. / S'il s'agit d'immeubles situés dans les communes où le cadastre a été rénové, et faisant l'objet d'une mutation par décès, d'un acte ou d'une décision judiciaire translatif, déclaratif ou constitutif d'un droit réel susceptible d'hypothèque, la désignation est faite conformément à un extrait cadastral ayant moins de six mois de date au jour de la remise au service chargé de la publicité foncière, et, en cas de changement de limite, d'après les documents d'arpentage établis spécialement en vue de la conservation du cadastre. Cet extrait ou ces documents doivent être remis au service chargé de la publicité foncière à l'appui de la réquisition de la formalité ".

14. Il résulte des dispositions combinées citées au point précédent que lorsqu'un arrêté de cessibilité déclare cessibles des parties de parcelles, ce qui implique de modifier les limites des terrains concernés, un document d'arpentage doit être préalablement réalisé afin que l'arrêté de cessibilité désigne les parcelles concernées conformément à leur numérotation issue de ce document. Le défaut d'accomplissement de cette obligation, qui constitue alors une garantie pour les propriétaires concernés par la procédure d'expropriation, entache d'irrégularité l'arrêté de cessibilité.

15. Ainsi qu'il a été dit au point 12, l'arrêté du 10 avril 2018 ne prévoit la cession que d'une partie, représentant 282 m2, de la parcelle cadastrée section AN n° 217 appartenant au syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France. Il ressort des pièces du dossier que l'expropriant a fait réaliser le 8 décembre 2017 un document d'arpentage désignant la parcelle concernée par l'expropriation conformément à sa numérotation issue de ce document.

16. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la SPL Territoire d'innovation dans le dossier n° 19LY04522, que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, qui sont suffisamment motivés et ne sont pas entachés d'omission des premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments, de statuer sur les moyens dont ils étaient saisis, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Leurs requêtes doivent être rejetées, y compris leurs conclusions présentées au titre des frais du litige. Il a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de la SPL Territoire d'innovation les frais qu'elle a exposés à ce même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la SCI du Nant, de la SARL Garage Dunant et du syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées par la SPL Territoire d'innovation au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI du Nant, à la SARL Garage Dunant, au syndicat des copropriétaires de l'immeuble l'Orée de France, à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la société publique locale Territoire d'innovation.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme C..., président assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique le 12 novembre 2020.

2

N° 19LY04519, 19LY04522


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04519
Date de la décision : 12/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Expropriation pour cause d'utilité publique - Règles générales de la procédure normale - Acte déclaratif d'utilité publique.

Expropriation pour cause d'utilité publique - Règles générales de la procédure normale - Arrêté de cessibilité.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : CARNOT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-11-12;19ly04519 ?
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