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22/10/2020 | FRANCE | N°20LY01010

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 22 octobre 2020, 20LY01010


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1905741 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble de rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le

10 mars 2020, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1905741 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble de rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 10 mars 2020, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 décembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère du 23 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros, à verser à son conseil, en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet de l'Isère n'a pas respecté la procédure prévue par l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant albanais né en 1970, déclare être entré en France le 26 août 2013. Sa demande d'asile a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 7 novembre 2014. Le 4 mars 2015, l'intéressé a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français que le préfet de l'Isère a retiré le 30 juin suivant pour lui délivrer, à compter du 20 décembre 2015 jusqu'au 21 février 2018, un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison de son état de santé. Par un arrêté du 23 juillet 2019, le préfet lui a refusé le renouvellement de ce titre de séjour qu'il a assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et d'une décision fixant le pays de destination en cas d'éloignement forcé. M. B... relève appel du jugement du 10 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) " Aux termes de l'article L. 511-4 de ce code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".

3. D'une part, en vertu de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet délivre la carte de séjour temporaire prévu par le 11° de l'article L. 313-11 de ce code au vu d'un avis émis, dans les conditions fixées par arrêté ministériel, par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), au vu d'un rapport médical établi par un médecin de l'OFII et des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Selon l'article R. 313-23 du même code, ce rapport médical est établi à partir d'un certificat médical rédigé par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre. S'il l'estime utile, le médecin de l'office peut solliciter le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier et peut convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens nécessaires. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016, pris pour l'application de ces dispositions, indique que l'avis mentionne les " éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité.

4. Il ressort des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient M. B..., que l'avis du 17 juillet 2018 du collège des médecins de l'OFII a été émis au vu du rapport médical rédigé le 12 février 2018 par le Docteur Philippe Moulin et que ce collège de médecins comprenait, ainsi que le prévoit l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016, trois médecins-instructeurs à l'exclusion de celui ayant établi le rapport médical.

5. Par ailleurs, il résulte de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la convocation du demandeur ou la demande d'examens complémentaires n'est qu'une faculté pour le médecin qui établit le rapport médical ou le collège de médecins de l'OFII. Dès lors qu'il ne ressort pas des pièces des dossiers de première instance et d'appel que cette faculté aurait été mise en oeuvre à l'égard de M. B..., les rubriques de l'avis rendu le 17 juillet 2018 par le collège des médecins de l'OFII concernant la convocation à de tels examens, les conditions dans lesquelles ils se sont déroulés et l'indication que l'étranger a été conduit à justifier de son identité étaient sans objet. La circonstance que ces rubriques n'ont pas été renseignées est par suite sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté.

6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que par son avis émis le 17 juillet 2018, le collège des médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine.

7. Pour contester l'appréciation portée par le préfet au vu de cet avis émis par le collège des médecins de l'OFII, M. B..., qui souffre d'une cardiopathie ischémique tritronculaire, d'hypertension artérielle, de dyslipidémie et d'un diabète de type 2, produit plusieurs certificats médicaux, un courrier électronique d'une pharmacie albanaise, ainsi qu'un courrier du 17 janvier 2020 du ministère de la santé et de la protection sociale de la République d'Albanie, faisant état de ce que plusieurs des médicaments qui lui sont prescrits en France ne sont pas commercialisés en Albanie. Toutefois, ces pièces ne permettent pas d'établir que la substance active de l'ensemble de ces médicaments n'existerait pas dans ce pays ni que la prescription d'un traitement équivalent approprié à son état de santé ne pourrait pas être suivie. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

8. En deuxième lieu, si M. B... fait valoir qu'il vit en France depuis plusieurs années, qu'il apprend le français et qu'il a noué des relations amicales, les pièces qu'il produit ne sont pas de nature à justifier d'une intégration en France telle que les décisions en litige auraient porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et ce, alors que l'intéressé a vécu jusqu'à l'âge de quarante-trois ans dans son pays d'origine, où il n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé. Ainsi, les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ne méconnaissent pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

9. En dernier lieu, M. B..., dont la demande d'asile a été rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 7 novembre 2014, n'apporte à la cour aucun élément nouveau sur les risques encourus personnellement en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, et ce alors qu'il n'établit pas ne pas pouvoir effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Albanie, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée y compris ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des frais du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme D..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 octobre 2020.

2

N° 20LY01010


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01010
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-10-22;20ly01010 ?
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