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15/10/2020 | FRANCE | N°19LY01409

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 15 octobre 2020, 19LY01409


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de leur accorder la décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 à raison de la plus-value réalisée lors de la cession de la société Exalia finance ;

Par un jugement n°1709163 du 5 février 2019, le tribunal administratif de Lyon prononcé la décharge de ces impositions et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de just

ice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 avr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de leur accorder la décharge de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 à raison de la plus-value réalisée lors de la cession de la société Exalia finance ;

Par un jugement n°1709163 du 5 février 2019, le tribunal administratif de Lyon prononcé la décharge de ces impositions et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 avril 2019 le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 février 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme B...

Il soutient que :

- la société Exalia finance ne peut être qualifiée de holding animatrice, de sorte que la plus-value litigieuse n'est pas éligible à l'abattement prévu par le 2° du II de l'article 150-0 bis du code général des impôts ;

- à supposer qu'elle puisse être regardée comme une holding animatrice, elle ne pourrait alors être regardée comme exerçant cette activité à titre prépondérant ;

- les titres n'ont pas été détenus pendant une durée de huit ans ;

Par un mémoire enregistré le 10 septembre 2019, M. et Mme B..., représentés par Me A..., concluent au rejet de la requête.

Ils soutiennent qu'aucun des moyens invoqués par le ministre de l'action et des comptes publics n'est fondé.

Par une ordonnance du 11 mars 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 avril 2020. En application de l'article 16 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, cette clôture a été reportée de plein droit jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la fin de l'état d'urgence sanitaire, elle-même fixée au 10 juillet 2020 par l'article 1 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... étaient, jusqu'à sa cession le 17 septembre 2013, les uniques associés de la société Exalia finance, qui avait pour objet, en substance, la prise de participation dans la société SEPS et ses filiales ainsi que l'acquisition et la gestion de titres de sociétés. La plus-value réalisée à cette occasion, d'un montant de 9 579 691 euros, a été imposée après application de l'abattement de 65 % prévu par l'article 150-0 D du code général des impôts. Estimant que cette cession devait bénéficier d'une exonération totale d'imposition à l'impôt sur le revenu en application de l'article 150-0 D bis du même code dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n°2011-1977 du 28 décembre 2011, auquel renvoyait l'article 150-0 D ter dans sa rédaction applicable au cours de l'année de cession des titres, M. et Mme B... ont déposé une réclamation à l'encontre de leur imposition primitive, laquelle est demeurée sans réponse. Les intéressés ont alors saisi le tribunal administratif de Lyon qui a prononcé la décharge de l'imposition en litige par un jugement du 5 février 2019. Le ministre de l'action et des comptes publics interjette appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 150-0 D bis du code général des impôts, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n°2011-1977 du 28 décembre 2011 : " I. - 1. Les gains nets (...) retirés des cessions à titre onéreux d'actions (...) sont réduits d'un abattement d'un tiers pour chaque année de détention au-delà de la cinquième, lorsque les conditions prévues au II sont remplies / (...) II. - Le bénéfice de l'abattement prévu au 1 du I est subordonné au respect des conditions suivantes : / 1° Les titres ou droits cédés doivent avoir été détenus de manière continue depuis plus de huit ans ; / 1° bis Les titres ou droits détenus par le cédant, directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire du conjoint, de leurs ascendants et descendants ou de leurs frères et soeurs, doivent avoir représenté, de manière continue pendant les huit années précédant la cession, au moins 10 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ; / 2° La société dont les actions, parts ou droits sont cédés : (...) / b) Exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, à l'exception de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier, ou a pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités précitées. Cette condition s'apprécie de manière continue pendant les cinq années précédant la cession (...) ". Aux termes de l'article 150-0 D ter du même code, dans sa rédaction au cours de l'année d'imposition en litige : " I.- L'abattement prévu à l'article 150-0 D bis, dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, s'applique dans les mêmes conditions, à l'exception de celles prévues au V du même article, aux gains nets réalisés lors de la cession à titre onéreux d'actions, de parts ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts, si les conditions suivantes sont remplies : / 1° La cession porte sur l'intégralité des actions, parts ou droits détenus par le cédant dans la société dont les titres ou droits sont cédés (...) ".

3. Une société holding qui a pour activité principale, outre la gestion d'un portefeuille de participations, la participation active à la conduite de la politique du groupe et au contrôle de ses filiales et, le cas échéant et à titre purement interne, la fourniture de services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers, est animatrice de son groupe et doit, par suite, être regardée comme une société exerçant une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière au sens des dispositions du b du 2° du II de l'article 150-0 D bis du code général des impôts, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, de laquelle elles sont issues.

4. Pour refuser de faire droit à la réclamation de M. et Mme B..., l'administration soutient que la société Exalia finance ne peut pas être regardée comme une société animatrice de groupe, de sorte que la cession litigieuse n'ouvrirait pas droit à l'abattement prévu par les dispositions précitées.

5. En premier lieu, si les procès-verbaux d'assemblées générales ordinaires des associés de la société Exalia Finance datés du 19 juillet 2010, du 18 octobre 2010 et du 20 janvier 2011, ne font que " prendre acte " des évènements survenus et des décisions prises pour la gestion de la société SEPS et de sa filiale, la société Safexis Europe, il ressort en revanche clairement des différents rapports trimestriels de gérance des 30 décembre 2009, 30 juin 2010, 30 juin 2011, 30 octobre 2011 et 31 mars 2012 que la société Exalia Finance participait activement à la conduite de la politique de la SEPS. Ces documents relatent notamment la décision par la société Exalia finance de ne pas conserver un bail commercial bénéficiant à la société Safexis Europe, la décision de recruter du personnel pour cette société, la décision de changer de manufacturier pour certains produits, la décision de ne pas donner suite à des contacts établis pour ajouter un produit en catalogue ou encore la conduite à tenir dans le cadre du contentieux qui a opposé la société Safexis Europe avec la société Technivap. Cette participation active est corroborée par la circonstance que M. B... était à la fois le gérant de la société Exalia Finance et de sa filiale, la société SEPS.

6. En deuxième lieu, si l'administration fait valoir que la société Exalia finance, contrôlée par M. B..., ne détenait qu'une participation minoritaire de 49,96 %, il résulte de l'instruction que la société SEPS était contrôlée à même hauteur par la société A3F, contrôlée par M. D..., et que ces deux personnes codirigeaient le groupe depuis l'origine. La société Exalia finance et la société A3F ont conclu avec la société SEPS, le 8 décembre 2009, une convention d'administration et de gestion, qui les qualifiait explicitement d' " holdings animatrices ". La convention prévoyait que les sociétés Exalia finance et A3F décideraient des politiques d'investissement et des politiques commerciales réalisées au sein du groupe et s'engageaient à lui fournir un ensemble de services lui permettant d'être dégagée des tâches juridiques, financières, de direction générale et commerciale, de prévision budgétaire, assurant plus globalement toutes les prestations relevant de la direction générale et commerciale, de la gestion, de l'administration et de l'animation du marketing de la SEPS. La société SEPS s'engageait pour sa part à suivre les décisions prises dans ces domaines par les sociétés A3F et Exalia Finance. Si l'administration fait valoir que la société Exalia finance n'a facturé aucune prestation de service à la société SEPS au cours des exercices vérifiés, cette seule circonstance ne suffit pas à lui retirer la qualification de holding animatrice dès lors qu'il résulte par ailleurs de l'instruction qu'elle conduit la politique du groupe, ainsi qu'il a été dit au point 5.

7. En troisième lieu, l'administration fait valoir que la société Exalia Finance disposait au cours des années 2009 à 2013 d'importantes liquidités en partie investies en valeurs mobilières de placement, à concurrence, suivant les exercices, de 68,4 % à 76,43 % de l'actif brut, ce qui tendrait à établir le caractère essentiellement financier de cette holding. Toutefois, ce faisant, l'administration se borne à comparer, d'une part, la valeur comptable de ses participations dans ses activités opérationnelles et, d'autre part, la valeur de ses liquidités, alors qu'il est constant que les liquidités dont elle disposait provenaient elles-mêmes de l'activité opérationnelle du groupe, dont les participations n'avaient donné lieu à aucune cession depuis 2007. Il est également constant que les liquidités ont été investies dans des valeurs mobilières liquides et peu risquées pour lui permettre de disposer des fonds à tout moment en cas de besoins financiers. Compte tenu de ces éléments, l'ensemble de l'activité de la société Exalia Finance doit être regardée comme ayant eu pour objet prépondérant d'animer les sociétés opérationnelles du groupe.

8. En quatrième lieu, l'administration fait valoir que les titres de la société Exalia finance ont été souscrits le 4 juillet 2007 avant d'être cédés le 17 septembre 2013, de sorte que les titres n'auraient été détenus que durant six ans. Toutefois, il est constant que cette société a été créée par apport de titres de la société SEPS, détenue par M. B... depuis le 3 octobre 1979. Par conséquent, les titres cédés doivent être regardés comme ayant été détenus de manière continue depuis plus de huit ans, au sens des dispositions précitées.

9. Il résulte de ce qui précède, et alors que les autres conditions ne sont pas contestées, que la société Exalia Finance doit être regardée comme une société holding ouvrant droit au profit de son gérant, M. B..., au bénéfice des abattements prévus par l'article 150-0 D bis du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n°2011-1977 du 28 décembre 2011, auquel renvoyait l'article 150-0 D ter dans sa rédaction applicable au cours de l'année 2013 en litige. Par conséquent, le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a prononcé la décharge des impositions litigieuses.

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme B... au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à M. et Mme C... B....

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

M. Besse, président assesseur,

Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 octobre 2020.

2

N° 19LY01409


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Plus-values de cession de droits sociaux, boni de liquidation.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CABINET JURIDIQUE ET FISCAL SORET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 15/10/2020
Date de l'import : 05/11/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 19LY01409
Numéro NOR : CETATEXT000042451340 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-10-15;19ly01409 ?
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