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13/10/2020 | FRANCE | N°19LY00543

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 13 octobre 2020, 19LY00543


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes distinctes, la première étant présentée pour M. B... I..., Mmes G... et J... I... ainsi que MM. A... et C... I... et la seconde étant présentée pour M. B... I..., les consorts I... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir le certificat d'urbanisme du 19 décembre 2017 par lequel le maire de Saint-Jean-de-Muzols a déclaré non réalisable le projet de construction d'une maison d'habitation sur un terrain situé route de Lyon.

Par un jugement n° 1

801273 et 1801278 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon, après les...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes distinctes, la première étant présentée pour M. B... I..., Mmes G... et J... I... ainsi que MM. A... et C... I... et la seconde étant présentée pour M. B... I..., les consorts I... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler pour excès de pouvoir le certificat d'urbanisme du 19 décembre 2017 par lequel le maire de Saint-Jean-de-Muzols a déclaré non réalisable le projet de construction d'une maison d'habitation sur un terrain situé route de Lyon.

Par un jugement n° 1801273 et 1801278 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon, après les avoir jointes, a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête, et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 février 2019 et 20 avril 2020, M. B... I..., Mmes G... et J... I... et MM. A... et C... I..., représentés par la SELARL Helios Avocats, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 décembre 2018 ;

2°) d'annuler le certificat d'urbanisme négatif du 19 décembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au maire de Saint-Jean-de-Muzols de procéder au réexamen de la demande dans un délai d'un mois, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) subsidiairement, de constater l'enclavement de la parcelle AB 03 et de reconnaître à ses propriétaires le droit à une servitude de passage depuis la parcelle AB 05 ;

5°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la commune de Saint-Jean-de-Muzols au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le maire de Saint-Jean-de-Muzols, qui a renoncé à exercer sa propre appréciation en se fondant seulement sur l'avis défavorable du conseil départemental, a entaché sa décision d'incompétence négative ;

- le certificat d'urbanisme attaqué est insuffisamment motivé ;

- les distances indiquées dans l'avis défavorable du conseil départemental de l'Ardèche sont inexactes ;

- le tribunal ne pouvait retenir l'existence de deux autres accès permettant de desservir leur terrain, qui est enclavé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2020, la commune de Saint-Jean-de-Muzols, représentée par la SELARL Lex Publica, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'accès projeté présente un risque pour la sécurité des usagers ;

- en tout état de cause, la méconnaissance de l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme pourrait être substituée au motif tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- la demande d'injonction de procéder à une nouvelle instruction du certificat d'urbanisme devra être rejetée ; en tout état de cause, l'astreinte de 500 euros par jour de retard n'est aucunement justifiée.

La clôture de l'instruction a été fixée au 17 juillet 2020 par une ordonnance du 18 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F... E..., première conseillère ;

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me D..., substituant Me H..., pour les consorts I... ;

Considérant ce qui suit :

1. Les consorts I... relèvent appel du jugement du 13 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du certificat d'urbanisme du maire de Saint-Jean-de-Muzols déclarant non réalisable le projet de construction d'une maison d'habitation sur un terrain situé route de Lyon.

Sur la légalité du certificat d'urbanisme négatif du 19 décembre 2017 :

2. Pour rejeter les demandes de première instance dirigées contre le certificat d'urbanisme négatif du 19 décembre 2017, le tribunal s'est fondé sur un motif, invoqué par la commune dans ses écritures de première instance, tiré de la présence, d'une part, d'une construction, jouxtant l'accès au terrain, qui affecte la visibilité sur la route départementale, et d'autre part, de deux autres accès à proximité immédiate de l'accès projeté, en retenant que le maire de Saint-Jean-de-Muzols aurait pris la même décision d'opposition en se fondant sur le seul motif tiré de la méconnaissance par le projet des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

3. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que la visibilité au niveau de l'accès projeté, qui présente une avancée permettant aux automobilistes de se positionner sans empiéter sur la voie, est suffisante, malgré la voûte et le garde-corps du pont ainsi que la présence d'une construction sur la parcelle cadastrée section AB n° 06 bordant la route départementale 96, pour assurer une insertion sécurisée des véhicules sur la voie publique. Si la commune de Saint-Jean-de-Muzols fait valoir que la multiplication des intersections de voies sur un linéaire d'une trentaine de mètres constitue un risque pour la sécurité des usagers nécessairement aggravé par la création d'un nouvel accès sur la route départementale 96, la voie publique est rectiligne à cet endroit et la vitesse des véhicules y est limitée à 70 kilomètres par heure. Un arrêt de bus situé en face du projet, les nombreuses intersections et les accès multiples à des terrains privés à proximité conduiront encore les automobilistes à réduire leur vitesse à l'endroit où débouche l'accès au terrain du projet contesté. Par ailleurs, sa fréquentation sera nécessairement limitée, s'agissant de la desserte d'une habitation individuelle. Dans ces conditions, le maire a fait une inexacte application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme cité au point 3 en fondant le certificat d'urbanisme négatif sur les risques que l'accès au projet serait de nature à engendrer pour la sécurité des usagers de la voie publique qui le dessert.

5. La commune de Saint-Jean-de-Muzols sollicite, à titre subsidiaire, que soit substitué au motif tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2, un motif tiré de la méconnaissance de l'article UD 3 du règlement du plan local d'urbanisme, aux termes duquel : " (...) Le nombre des accès sur les voies publiques peut être limité dans l'intérêt de la sécurité. En particulier, lorsque le terrain est desservi par plusieurs voies, les constructions peuvent n'être autorisées que sous réserve que l'accès soit établi sur la voie où la gêne pour la circulation sera la moindre. Cette gêne sera appréciée, notamment en fonction des aménagements qui pourraient être réalisés sur l'une ou l'autre voie ". Toutefois, le terrain d'assiette du projet, en l'état enclavé, n'est pas desservi par plusieurs voies. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande de substitution de motifs.

6. Il appartient à la cour, saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres motifs invoqués par le maire.

7. Aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que, saisi pour l'instruction de la demande de permis, le service gestionnaire du réseau a indiqué dans son avis du 1er décembre 2017 que l'alimentation en électricité de la parcelle d'assiette du projet nécessite un raccordement au réseau public de distribution qui ne constitue pas un simple branchement, compte tenu de la distance entre le réseau public et la parcelle. Toutefois, comme l'ont fait valoir les requérants devant le tribunal, il existe sur les parcelles contigües au terrain d'assiette du projet, des constructions existantes nécessairement raccordées au réseau d'électricité, en particulier la parcelle AB n°1 dont ils sont propriétaires. Alors que la commune ne défend pas en appel la légalité de ce motif de refus, il n'apparaît pas établi qu'un simple branchement ne permettrait pas le raccordement de leur projet au réseau public d'électricité. Dans ces conditions, le maire de Saint-Jean-de-Muzols, quand bien-même il a exercé sa propre appréciation, ne pouvait légalement déclarer non réalisable le projet des requérants en se fondant sur les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme citées au point précédent.

9. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît susceptible de fonder l'annulation du certificat d'urbanisme négatif du 19 décembre 2017.

10. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts I... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes et à demander l'annulation de ce jugement ainsi que celle de l'arrêté du maire de Saint-Jean-de-Muzols du 19 décembre 2017.

Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :

11. Le présent arrêt implique nécessairement que l'autorité compétente statue à nouveau sur la demande de certificat d'urbanisme. Dès lors, il y a lieu d'enjoindre au maire de la commune de Saint-Jean-de-Muzols de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Saint-Jean-de-Muzols demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge des consorts I..., qui ne sont pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Jean-de-Muzols le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par les requérants.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon 13 décembre 2018 et l'arrêté du maire de Saint-Jean-de-Muzols du 19 décembre 2017 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de Saint-Jean-de-Muzols de réexaminer la demande de certificat d'urbanisme de M. B... I... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Saint-Jean-de-Muzols versera aux consorts I... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... I... et à la commune de Saint-Jean-de-Muzols.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. François Pourny, président de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme F... E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.

2

N° 19LY00543

fp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00543
Date de la décision : 13/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : HELIOS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-10-13;19ly00543 ?
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