La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/10/2020 | FRANCE | N°19LY00767

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 01 octobre 2020, 19LY00767


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce que lui soit reconnu le bénéfice de 3 000,57 heures supplémentaires non comptabilisées par l'administration et d'enjoindre à cette autorité d'instruire et de déterminer les conditions de récupération de ces heures supplémentaires subsidiairement de l'indemniser, outre intérêts légaux, du surplus de ces heures supplémentai

res qui ne pourraient alimenter son compte épargne-temps, dans le délai d'un mois ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce que lui soit reconnu le bénéfice de 3 000,57 heures supplémentaires non comptabilisées par l'administration et d'enjoindre à cette autorité d'instruire et de déterminer les conditions de récupération de ces heures supplémentaires subsidiairement de l'indemniser, outre intérêts légaux, du surplus de ces heures supplémentaires qui ne pourraient alimenter son compte épargne-temps, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par jugement n° 1603185 lu le 19 décembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 25 février 2019 et un mémoire enregistré le 2 septembre 2020 (non communiqué), M. B... C... représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 décembre 2018 ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de faire droit à sa demande, présentée le 27 décembre 2015, tendant à ce que lui soit reconnu le bénéfice de 3 000,57 heures supplémentaires non comptabilisées par l'administration ;

3°) d'enjoindre à l'État d'instruire et de déterminer les conditions de récupération de ces heures supplémentaires, subsidiairement, de l'indemniser, outre intérêts légaux, du surplus de ces heures supplémentaires qui ne pourraient alimenter son compte épargne-temps ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il a inversé la charge de la preuve quant au calcul de ses repos compensateurs au regard des critères établis par l'administration pour les agents en régime hebdomadaire ;

- le tribunal a méconnu les dispositions applicables au repos compensateur en considérant qu'ils constituent obligatoirement la contrepartie d'heures supplémentaires ou de dépassements horaires, alors même que lesdits repos sont calculés au regard du cycle de travail effectué ;

- le jugement est irrégulier en raison de la non prise en compte des repos compensateurs ; son régime de travail correspond à la définition du régime hebdomadaire avec des amplitudes horaires élargies et il exerce des fonctions de permanence, les nuits, les week-ends et les jours fériés, de sorte que ses fonctions lui permettent de bénéficier de repos compensateurs tout au long de l'année.

Par mémoire enregistré le 11 mai 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête de M. C... en soutenant que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifié portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

- la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité ;

- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale ;

- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État et dans la magistrature ;

- le décret n° 2002-1279 du 23 octobre 2002 portant dérogations aux garanties minimales de durée du travail et de repos applicables aux personnels de la police nationale ;

- l'arrêté du ministre de l'intérieur du 3 mai 2002 pris pour l'application dans la police nationale des articles 1er, 4, 5 et 10 du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., gardien de la paix, en fonction à la permanence de nuit du service central de documentation criminelle de la sous-direction de la police technique et scientifique à Écully, relève appel du jugement lu le 19 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur refusant de faire droit à sa demande, présentée le 27 décembre 2015, tendant à ce que lui soit reconnu le bénéfice de 3 000,57 heures supplémentaires non comptabilisées par l'administration.

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'absence de motivation de la décision en litige doit être écarté par les motifs retenus par le tribunal et qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.

3. En second lieu et d'une part, aux termes de l'article 19 de la loi du 21 janvier 1995 susvisée : " /(...)/ En raison du caractère particulier de leurs missions (...), les personnels actifs de la police nationale constituent dans la fonction publique une catégorie spéciale. / Le statut spécial de ces personnels peut déroger au statut général de la fonction publique afin d'adapter l'organisation des corps et des carrières aux missions spécifiques de la police nationale. / Compte tenu de la nature de ces missions, les personnels actifs de la police nationale sont soumis à des obligations particulières de disponibilité (...) ". Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 3 mai 2002 pris pour l'application dans la police nationale des articles 1er, 4, 5 et 10 du décret du 25 août 2000 susvisé relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'État : " Afin de leur permettre d'assurer sans interruption l'exécution des missions de sécurité et de paix publiques, de police judiciaire et de renseignement et d'information qui leur sont conférées par la loi du 21 janvier 1995 susvisée, les fonctionnaires (...) sont soumis, dans des conditions fixées par un arrêté du ministre de l'intérieur, à l'un ou l'autre des deux régimes de travail suivants : - le régime hebdomadaire, calqué sur la semaine civile ; - le régime cyclique, dont le déroulement, opéré de manière continue, par équipes successives, de jour et de nuit, en horaires décalés, dimanches et jours fériés compris, ne correspond pas à la semaine civile. / Le travail cyclique, dans la police nationale, est organisé selon plusieurs cycles adaptés, au cas par cas, à la nature et aux caractéristiques de la mission à accomplir ". Aux termes de l'article 3 du même arrêté : " Conformément aux dispositions de l'article 1er du décret du 25 août 2000 (...) : - la durée annuelle du travail effectif des personnels de la police nationale qui relèvent du régime hebdomadaire est fixée à 1 607 heures, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées ; - la durée annuelle du travail effectif, hors heures supplémentaires, des personnels de la police nationale qui relèvent de l'un des cycles de travail mentionnés au quatrième alinéa de l'article 2 du présent arrêté peut être inférieure à 1 607 heures (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'en vertu des dispositions précitées qui permettent d'astreindre les fonctionnaires du service actif de la police nationale à un cycle de travail dérogatoire, non hebdomadaire, que M. C... effectue son service par cycle de 5 semaines comportant une obligation de service de 35 jours, soit 118 heures de travail réparties en 7 nuits de 14 heures et 2 jours de 10 heures par semaine, en moyenne sur le cycle, soit 94 jours de travail par an dont 2 jours fériés, pour une moyenne annuelle de 1 250 heures 44 de travail. Compte tenu de l'organisation ainsi mise en place, le cycle de travail n'aboutit pas au dépassement du plafond annualisé de 1 607 heures.

5. D'autre part, aux termes de l'article 3 du décret du 25 août 2000 susvisé : " I. L'organisation du travail doit respecter les garanties minimales ci-après définies. / (...) / La durée quotidienne du travail ne peut excéder dix heures. / Les agents bénéficient d'un repos minimum quotidien de onze heures. / L'amplitude maximale de la journée de travail est fixée à douze heures. / Le travail de nuit comprend au moins la période comprise entre 22 heures et 5 heures ou une autre période de sept heures consécutives comprise entre 22 heures et 7 heures. / (...) ". Aux termes de l'article 4 de ce même décret, dans sa version alors applicable : " Le travail est organisé selon des périodes de référence dénommées cycles de travail. Les horaires de travail sont définis à l'intérieur du cycle, qui peut varier entre le cycle hebdomadaire et le cycle annuel de manière que la durée du travail soit conforme sur l'année au décompte prévu à l'article 1er. / Des arrêtés ministériels (...) définissent les cycles de travail auxquels peuvent avoir recours les services. Ces arrêtés déterminent notamment la durée des cycles, les bornes quotidiennes et hebdomadaires, les modalités de repos et de pause. / (...) / Pour les agents relevant d'un régime de décompte horaire des heures supplémentaires, celles-ci sont prises en compte dès qu'il y a dépassement des bornes horaires définies par le cycle de travail. Elles font l'objet d'une compensation horaire dans un délai fixé par arrêté (...) À défaut, elles sont indemnisées ". Aux termes de l'article 1er du décret du 23 octobre 2002 portant dérogations aux garanties minimales de durée du travail et de repos applicables aux personnels de la police nationale, dans sa rédaction applicable au litige : " Pour l'organisation du travail des fonctionnaires actifs des services de la police nationale, il est dérogé aux garanties minimales mentionnées au I de l'article 3 du décret du 25 août 2000 susvisé, lorsque les tâches de sécurité et de paix publiques, de police judiciaire et de renseignement et d'information, qui leur sont confiées, l'exigent ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " En contrepartie des sujétions résultant de l'article 1er (...), les agents bénéficient soit d'une compensation indemnitaire, soit d'une dérogation à la durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures, soit de repos compensateurs, égaux ou équivalents aux services excédentaires accomplis, accordés à titre individuel et dans des conditions fixées par un arrêté du ministre de l'intérieur ".

6. Enfin, aux termes de l'article 4 de l'arrêté susvisé du 3 mai 2002 : " Conformément aux dispositions de l'alinéa 5 de l'article 4 du décret du 25 août 2000 (...), pour les personnels de la police nationale relevant d'un régime de décompte horaire des heures supplémentaires effectuées, celles-ci sont prises en compte dès dépassement des bornes horaires définies par le cycle de travail auquel ils sont soumis (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que la détermination de jours de repos supplémentaires s'opère au regard des services accomplis en excédent du régime correspondant au cycle de travail de l'agent. Dans l'hypothèse d'assujettissement à un cycle particulier comportant une amplitude journalière dérogatoire avec repos compensateurs et durée annuelle de service inférieure aux 1 607 heures de droit commun, les jours de repos supplémentaires ne peuvent être acquis qu'en cas de dépassement des heures prévues par le cycle de travail.

8. Or, il ressort des pièces du dossiers que si M. C... relève d'un cycle de travail comprenant 7 nuits de 14 heures, une telle sujétion résulte du régime cyclique de travail de nuit au service central de documentation criminelle, au sein de la sous-direction de la police technique et scientifique à Écully et ne constitue ainsi pas des heures supplémentaires, ni même une permanence, au sens des dispositions précitées du décret du 23 octobre 2002 ou de l'arrêté du 3 mai 2002 alors qu'une telle sujétion est compensée par l'assujettissement à un nombre d'heures de service annuel inférieur au plafond de 1 607 heures.

9. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions de la requête à fin d'injonction doivent, dès lors, être également rejetées.

10. Les disposition de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. C... sollicite le versement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er octobre 2020.

N° 19LY00767


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00767
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : CABINET COLL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-10-01;19ly00767 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award