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01/10/2020 | FRANCE | N°19LY00017

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 01 octobre 2020, 19LY00017


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Pont-de-Chéruy a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la communauté de communes Porte Dauphinoise Lyon Saint-Exupéry à lui verser la somme de 1 216 852 euros en réparation de son préjudice financier résultant de sa double contribution au service départemental d'incendie et de secours de l'Isère entre 2001 et 2015.

Par un jugement n° 1606589 du 31 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par

une requête et un mémoire, enregistrés les 3 janvier 2019 et 10 avril 2020, la commune de Po...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Pont-de-Chéruy a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la communauté de communes Porte Dauphinoise Lyon Saint-Exupéry à lui verser la somme de 1 216 852 euros en réparation de son préjudice financier résultant de sa double contribution au service départemental d'incendie et de secours de l'Isère entre 2001 et 2015.

Par un jugement n° 1606589 du 31 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 janvier 2019 et 10 avril 2020, la commune de Pont-de-Chéruy, représentée par la SELARL Cabinet d'avocats Philippe Petit et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 31 octobre 2018 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de condamner la communauté de communes Porte Dauphinoise Lyon Saint-Exupéry, devenue communauté de communes Lyon Saint-Exupéry en Dauphiné, à lui verser la somme de 1 216 852 euros ;

3°) de mettre à la charge de cette communauté de communes une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a jugé que la contribution de la commune au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) et celle payée par l'entremise de la communauté de communes n'ont pas le même objet ;

- la communauté de communes s'est acquittée auprès du SDIS, en toute illégalité pendant quinze exercices budgétaires successifs, de la contribution pour le compte de cinq communes sur six, l'excluant de fait, tout en opérant sur son budget un prélèvement via la fiscalité additionnelle ; un tel prélèvement s'apparente à de l'enrichissement sans cause et induit en tout cas une situation illégale au regard du principe d'égalité ; la communauté de communes aurait dû réduire à due concurrence la fiscalité additionnelle prélevée sur les contribuables de la commune afin d'éviter que ceux-ci ne paient deux fois la contribution au SDIS ;

- l'illégalité résulte également du fait que la communauté de communes ne pouvait pas prendre en charge les contributions de ses communes membres au SDIS de l'Isère ; elle a commis une faute en s'abstenant de restituer la compétence " incendie et secours " à ses communes membres ;

- la communauté de communes ne pouvait pas légalement exercer la compétence " incendie et secours " pour une partie seulement de ses communes membres ;

- la circonstance qu'elle n'a jamais contesté l'arrêté préfectoral du 22 janvier 1997 portant modification des statuts de la communauté de communes, ni même les délibérations approuvant les taux de fiscalité additionnelle votés chaque année, ni les budgets, est sans incidence sur son intérêt à agir dans le cadre du présent recours ;

- elle ne s'est pas exclue de la compétence " incendie et secours " transférée à la communauté de communes, car le transfert de son centre de secours devait s'opérer directement vers le SDIS et non vers l'EPCI ; elle n'a fait qu'appliquer la loi ;

- elle a subi un préjudice financier directement imputable à ces fautes et peut prétendre à la restitution des sommes indument versées à la communauté de communes de 2001 à 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2020, la communauté de communes Lyon Saint-Exupéry en Dauphiné (LYSED), représenté par le cabinet C... Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Pont-de-Chéruy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la commune de Pont-de-Chéruy n'a jamais contesté l'arrêté préfectoral du 22 janvier 1997 portant modification des statuts de la communauté de communes, les taux de fiscalité additionnelle votés chaque année, l'emploi des différentes ressources voté chaque année ;

- la commune a refusé l'intégration de sa compétence " incendie et secours " au sein de la communauté de communes malgré l'arrêté préfectoral du 22 janvier 1997 ; elle s'est elle-même exclue volontairement de cette compétence intercommunale laquelle était limitée aux sapeurs-pompiers volontaires ; les contributions versées au SDIS n'avaient donc pas le même objet que celles versées par la commune ;

- elle n'a commis aucune faute dans la perception de sa fiscalité additionnelle et dans ses dépenses en résultant ; le principe d'universalité et la règle de non affectation applicables à ses budgets annuels n'autorisent pas la commune à distinguer sa propre part de recettes ou de dépenses dans le budget intercommunal ; les budgets étant devenus définitifs, il n'est plus possible de les remettre en cause ;

- les contributions qu'elle a versées au SDIS chaque année l'ont été sur le fondement de l'arrêté du 22 janvier 1997 au titre de la compétence " incendie et secours " destinées à gérer les sapeurs-pompiers volontaires ;

- la commune tente de faire juger à nouveau des questions déjà jugées à plusieurs reprises par le tribunal administratif de Grenoble dans des décisions ayant la force de chose jugée.

Un mémoire présenté pour la communauté de communes Lyon Saint-Exupéry en Dauphiné, enregistré le 10 septembre 2020, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général des impôts ;

- la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... ;

- les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

- et les observations de Me A..., représentant la commune de Pont-de-Chéruy et celles de Me C... pour la communauté de communes " LYSED ".

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Pont-de-Chéruy (38) relève appel du jugement du 31 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté de communes dont elle est membre, créée en 1993 et successivement dénommée Porte dauphinoise de Lyon Satolas, Porte dauphinoise de Lyon Saint-Exupéry puis Lyon Saint-Exupéry en Dauphiné, à lui verser une somme de 1 216 852 euros en réparation de son préjudice financier résultant selon elle de sa double contribution au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Isère entre 2001 et 2015.

2. Aux termes de l'article L. 1424-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi du 3 mai 1996 relative aux services d'incendie et de secours : " Il est créé dans chaque département un établissement public, dénommé " service départemental d'incendie et de secours ", qui comporte un corps départemental de sapeurs-pompiers, composé dans les conditions prévues à l'article 5 et organisé en centres d'incendie et de secours. (...) Ont également la qualité de service d'incendie et de secours les centres d'incendie et de secours qui relèvent des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale disposant d'un corps communal ou intercommunal de sapeurs-pompiers. / Les centres d'incendie et de secours comprennent des centres de secours principaux, des centres de secours et des centres de première intervention. ". Les articles L. 1424-13 et L. 1424-14 de ce code prévoient que les sapeurs-professionnels ou volontaires, relevant d'un corps communal ou intercommunal à la date de la promulgation de la loi du 3 mai 1996, et s'agissant des sapeurs-pompiers volontaires, desservant un centre de secours principal ou un centre de secours, sont transférés au corps départemental dans un délai ne pouvant excéder cinq ans à compter de la promulgation de la loi. L'article L. 1424-17 du même code précise que les biens affectés, à la date de la promulgation de la loi du 3 mai 1996, par les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et le département au fonctionnement des services d'incendie et de secours et nécessaires au fonctionnement du SDIS sont mis, à titre gratuit, à la disposition de celui-ci.

3. Par un arrêté du 22 janvier 1997, soit postérieurement à la promulgation de la loi du 3 mai 1996 relative aux services d'incendie et de secours, le préfet de l'Isère a modifié les statuts de la communauté de communes de Porte dauphinoise de Lyon Satolas afin d'y inclure la compétence " incendie et secours ". Il résulte des dispositions citées au point 2, que cette compétence, et ainsi d'ailleurs que le sous-préfet de Vienne en avait informé le président de la communauté de communes par un courrier du 13 mars 1997, était limitée au transfert des compétences résiduelles laissées à ses communes membres par la loi du 3 mai 1996 soit, en particulier, la gestion des sapeurs-pompiers volontaires relevant uniquement des centres de première intervention de son territoire.

4. Aux termes de l'article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales ; " Les modalités de calcul des contributions des communes, des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour la gestion des services d'incendie et de secours et du département au financement du service départemental d'incendie et de secours sont fixées par le conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours, dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article L1424-29. / Les contributions des communes, des établissements publics de coopération intercommunale et du département au budget du service départemental d'incendie et de secours constituent des dépenses obligatoires. (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que la contribution au budget du SDIS d'une commune, compétente en matière de gestion des services d'incendie et de secours à la date de la promulgation de la loi du 3 mai 1996, et qui a conservé cette compétence jusqu'à son transfert au SDIS, constitue une dépense obligatoire pour elle et ne saurait lorsque cette commune est membre d'un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) faire l'objet d'un transfert à cet établissement. Il suit de là que la communauté de communes ne pouvait légalement, au titre de la compétence " incendie et secours " inscrite dans ses statuts en 1997, supporter en lieu et place de cinq de ses six communes membres la contribution au budget du SDIS de l'Isère de 2001 à 2015.

6. La commune de Pont-de-Chéruy soutient qu'elle a, au titre de cette même période, contribué deux fois au budget du SDIS de l'Isère, par le versement de sa propre contribution, auquel elle était tenue, et par sa participation au budget de fonctionnement de la communauté de communes dont une partie était reversée au budget du SDIS au titre de la contribution des cinq autres communes membres. Toutefois, il résulte de l'instruction que la communauté de communes Lyon Saint-Exupéry en Dauphiné est un EPCI à fiscalité additionnelle percevant directement des contribuables le produit des contributions directes locales, calculé à partir des taux d'imposition votés par l'assemblée délibérante chaque année. La commune de Pont-de-Chéruy, qui fait au demeurant valoir le préjudice subi par les contribuables de son territoire, ne démontre pas l'existence d'un préjudice financier propre.

7. Ainsi, la commune de Pont-de-Chéruy n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

8. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions des parties présentées au titre des frais du litige doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Pont-de-Chéruy est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté de communes Lyon Saint-Exupéry en Dauphiné sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Pont-de-Chéruy et à la communauté de communes Lyon Saint-Exupéry en Dauphiné.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

M. Rivière, premier conseiller,

Mme B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er octobre 2020.

2

N° 19LY00017


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00017
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Coopération - Finances des organismes de coopération.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Absence ou existence du préjudice - Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : CABINET PHILIPPE PETIT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-10-01;19ly00017 ?
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