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24/09/2020 | FRANCE | N°18LY04049

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 24 septembre 2020, 18LY04049


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme D... et Nathalie C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 20 mai 2016 par laquelle le maire de la commune de Meyzieu a refusé d'intervenir pour leur permettre de disposer effectivement de leur emplacement de huit mètres linéaires sur le marché alimentaire du samedi, de condamner la commune de Meyzieu à leur verser la somme de 9 000 euros au titre de leur manque à gagner et la somme de 2 000 euros au titre de leur préjudice moral, assorties des intérêts et de leu

r capitalisation, et d'enjoindre à la commune de Meyzieu de prendre toute...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme D... et Nathalie C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 20 mai 2016 par laquelle le maire de la commune de Meyzieu a refusé d'intervenir pour leur permettre de disposer effectivement de leur emplacement de huit mètres linéaires sur le marché alimentaire du samedi, de condamner la commune de Meyzieu à leur verser la somme de 9 000 euros au titre de leur manque à gagner et la somme de 2 000 euros au titre de leur préjudice moral, assorties des intérêts et de leur capitalisation, et d'enjoindre à la commune de Meyzieu de prendre toutes les dispositions propres à leur assurer la jouissance des huit mètres linéaires dont ils peuvent disposer sur le marché alimentaire du samedi, sous astreinte.

Par un jugement n° 1605522 du 12 septembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 14 novembre 2018 et un mémoire enregistré le 13 mai 2020, M. et Mme C..., représentés par Me A..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 septembre 2018 en tant qu'il rejette leur demande à fin d'annulation de la décision du 20 mai 2016 ;

2°) d'annuler la décision du maire de la commune de Meyzieu du 20 mai 2016 ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Meyzieu de leur attribuer un emplacement de huit mètres ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Meyzieu une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier, faute de répondre à l'ensemble de leurs moyens ;

- la décision contestée n'est pas suffisamment motivée ;

- le maire n'a pas procédé à un examen effectif de leur situation ;

- la commission des marchés n'a pas été consultée alors que l'arrêté contesté modifie le périmètre de leur emplacement et celui de M. J... qui occupe l'emplacement voisin ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de fait dès lors que les véhicules de secours peuvent circuler même s'ils utilisent leur emplacement de huit mètres et M. J... son emplacement de cinq mètres ;

- la décision contestée méconnaît les dispositions des articles 5 et 9 de l'arrêté du 13 mars 2015 portant réglementation générale des marchés de détail de la commune et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par mémoires enregistrés le 9 janvier 2019 et le 17 août 2020, la commune de Meyzieu, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de M. et Mme C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de légalité interne soulevés par les requérants ne sont pas recevables et que leurs autres moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'arrêté du 13 mars 2015 portant règlementation générale des marchés de détail de la commune de Meyzieu ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les conclusions de Mme H...,

- et les observations de Me F..., représentant M. et Me C... et celles de Me G..., représentant la commune de Meyzieu.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C..., exploitants d'une charcuterie à l'enseigne " Nath ", bénéficiaient depuis 2007 d'un emplacement de six mètres linéaires sur le marché alimentaire du samedi matin de la commune de Meyzieu. Devant de la commission des marchés pour la distribution des nouveaux abonnements réunie le 19 mars 2015, M. et Mme C... ont sollicité l'attribution d'un emplacement de huit mètres linéaires. Dans son avis du 19 mars 2015, la commission des marchés s'est prononcée favorablement sur cette demande, sous réserve que la configuration des lieux le permette. Lors du marché du 11 avril 2015, M. et Mme C... ont constaté que le commerçant voisin, attributaire à l'issue de la réunion de la commission des marchés du 19 mars précédent d'un emplacement de cinq mètres, empiétait, pour les besoins du stationnement de sa remorque, d'environ 1,25 mètres sur leur emplacement. Ils ont demandé au maire de Meyzieu, par un courrier du 29 mars 2016, d'intervenir pour faire respecter leur autorisation. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 12 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande d'annulation de la décision du 20 mai 2016 du maire refusant de faire droit à leur demande.

2. Aux termes de l'article L. 2224-18 du code général des collectivités territoriales : " (...) Le régime des droits de place et de stationnement sur les halles et les marchés est défini conformément aux dispositions d'un cahier des charges ou d'un règlement établi par l'autorité municipale après consultation des organisations professionnelles intéressées ". L'article 4 de l'arrêté du 13 mars 2015 susvisé portant réglementation générale des marchés de détail de la commune de Meyzieu dispose : " La commission des marchés est consultée avant prise de décision notamment dans les cas suivants : (...) - Pour la modification du périmètre des marchés ou des emplacements ". Aux termes de l'article 9 de cet arrêté : " L'abonnement procure à son titulaire un emplacement déterminé. Le maire a toute compétence pour modifier l'attribution de l'emplacement pour des motifs d'intérêt général. Les abonnés ne peuvent ni prétendre à l'obtention d'une indemnité ; ni s'opposer à ces modifications (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du compte-rendu de la réunion de la commission des marchés du 19 mars 2015 et du courrier du 26 mai 2015 adressé par le maire aux requérants, que M. et Mme C... ont été attributaires sur le marché alimentaire du samedi matin de l'emplacement qu'ils sollicitaient, leur permettant de déballer sur une longueur de huit mètres, sous réserve que la configuration des lieux le permette "au regard du mobilier urbain (trottoirs, poteaux) et de la bande pompiers où seulement des stands mobiles sont tolérés". Cet emplacement est situé entre celui de cinq mètres, attribué à M. J..., au nord, et une voie réservée aux pompiers, au sud. Lors du marché du 11 avril 2015, il a été constaté que l'emplacement de M. et Mme C... ne permettait effectivement que d'occuper une longueur de 6,75 mètres, étant limité par l'espace réservé aux pompiers d'un côté, et surtout par la flèche de la remorque de M. J... de l'autre. Ainsi, le périmètre effectif de l'emplacement attribué à M. et Mme C... diffère de celui qui leur a été proposé au vu d'un plan et qu'ils ont été autorisés à occuper à l'issue de la réunion de la commission des marchés du 19 mars 2015. Si une réserve était alors émise concernant la configuration des lieux et les impératifs de sécurité liés à la présence d'un espace destiné aux pompiers, et s'il résulte de l'article 9 de l'arrêté du 13 mars 2015 que le maire peut modifier l'attribution de l'emplacement pour des motifs d'intérêt général, le fait que la remorque du commerçant voisin dépasse de l'emplacement qui lui a été attribué ne constitue ni un motif de sécurité ni un motif d'intérêt général justifiant que le maire réduise de fait, en refusant d'intervenir, l'emplacement attribué aux requérants, alors même que le commerçant voisin occupait déjà auparavant cet emplacement et bénéficiait d'un ordre de priorité plus favorable que les requérants pour choisir son emplacement. Dès lors, la décision du 20 mai 2016 contestée, par laquelle le maire de Meyzieu a refusé d'intervenir pour permettre aux requérants de disposer de leur emplacement de huit mètres linéaires a pour effet principal de modifier le périmètre de leur emplacement ainsi que celui de l'emplacement voisin et devait donc être précédé de la saisine préalable de la commission des marchés.

4. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

5. Il ressort des pièces du dossier que le défaut de consultation de la commission des marchés sur la modification du périmètre de certains emplacements du marché a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise. Par suite, la décision contestée qui est entachée d'illégalité doit être annulée.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. et Mme C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande d'annulation.

Sur les conclusions à fins d'injonction :

7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. La juridiction peut également prescrire d'office l'intervention de cette nouvelle décision. ".

8. Compte tenu de ses motifs, le présent arrêt implique seulement que le maire de la commune de Meyzieu procède au réexamen de la situation de M. et Mme C.... Il y a lieu de lui enjoindre de procéder à ce réexamen et de lui allouer pour ce faire un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. et Mme C..., qui n'ont pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, versent à la commune de Meyzieu une somme au titre des frais liés au litige. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à ce titre une somme de 2 000 euros à la charge de la commune de Meyzieu à verser à M. et Mme C....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1605522 du 12 septembre 2018 du tribunal administratif de Lyon est annulé en tant qu'il rejette la demande d'annulation de la décision du maire de la commune de Meyzieu du 20 mai 2016.

Article 2 : La décision du maire de la commune de Meyzieu du 20 mai 2016 est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au maire de la commune de Meyzieu de réexaminer la situation de M. et Mme C... un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : La commune de Meyzieu versera la somme de 2 000 euros à M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., Mme I... C... et à la commune de Meyzieu.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

M. E..., président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 septembre 2020.

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N° 18LY04049


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04049
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

49-04-02-04 Police. Police générale. Tranquillité publique. Marchés et foires.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Jean-Louis d'HERVE
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : FRERY

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-09-24;18ly04049 ?
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