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25/08/2020 | FRANCE | N°19LY04455

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 25 août 2020, 19LY04455


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 31 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office, l'a assigné à résidence et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1907200 du 6 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a reje

té cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 décembre 2019...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 31 octobre 2019 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office, l'a assigné à résidence et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1907200 du 6 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 décembre 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 6 novembre 2019 ainsi que les décisions du préfet de l'Isère du 31 octobre 2019 ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour et dans l'attente de lui délivrer un récépissé et de supprimer l'inscription de non-admission au fichier d'information Schengen ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les décisions sont insuffisamment motivées ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ; il est présent en France depuis six années où il s'est intégré et où la demande d'asile de son épouse est en cours d'instruction ; cette décision ne tient pas compte de la décision de réadmission de son épouse en Espagne qui si elle était exécutée, provoquerait un éclatement de la cellule familiale ; la France était compétente pour examiner la demande d'asile de sa compagne puisque cette dernière n'a pas été réadmise en Espagne dans le délai de six mois après l'arrêté du 17 décembre 2018 ;

- la décision lui refusant un délai de départ volontaire a été prise en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant pour les mêmes motifs que ceux présentés à l'appui de ces moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire ;

- la décision lui interdisant le retour durant deux ans sur le territoire a été prise en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant pour les mêmes motifs que ceux présentés à l'appui de ces moyens dirigés contre l'obligation de quitter le territoire ;

- la décision l'assignant à résidence est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire.

Le préfet de l'Isère n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... D..., première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant arménien, a fait l'objet d'un arrêté du 31 octobre 2019 du préfet de l'Isère l'obligeant à quitter sans délai le territoire français, fixant le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé et lui interdisant de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Par un arrêté du même jour, le préfet a assigné l'intéressé à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. C... relève appel du jugement du 6 novembre 2019, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de ces arrêtés du préfet de l'Isère du 31 octobre 2019.

2. En premier lieu, le moyen selon lequel le préfet a insuffisamment motivé ses décisions doit être écarté par adoption des motifs circonstanciés retenus par le premier juge.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., né en 1991, est entré en France en 2013 dans des conditions indéterminées. Il a déposé une demande d'asile le 14 mars 2013 qui a fait l'objet d'une décision de rejet, le 31 octobre 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le 22 décembre 2014. Le requérant n'a pas exécuté une première décision du 5 mars 2015 par laquelle le préfet de l'Isère, après lui avoir refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui avait fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours, après le rejet par le tribunal administratif en août 2015 du recours formé contre ces mesures. Il n'a pas davantage exécuté deux autres obligations de quitter le territoire du 26 octobre 2015 et du 30 mars 2016. M. C... se prévaut de l'ancrage de sa vie privée en France, de son intégration et de ses attaches familiales. Toutefois, il se maintient irrégulièrement depuis plus de six ans en France sans déférer aux mesures d'éloignement qui ont été prises à son encontre. Si le requérant fait valoir que la décision l'obligeant à quitter le territoire le séparerait de son jeune enfant et de sa compagne qui a introduit une demande d'asile en France, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la date de la décision en litige, la personne qu'il désigne comme sa compagne s'est présentée comme célibataire et sans enfant aux services préfectoraux lors du dépôt de sa demande d'asile avant de faire l'objet d'un arrêté de réadmission en Espagne le 17 décembre 2018 . De plus il n' apporte aucun élément sur ses liens avec cette personne et la naissance d'un enfant. En outre, M. C... a passé la majorité de son existence en Arménie, pays qu'il a quitté alors qu'il était âgé de vingt-deux ans. Dans ces circonstances, la décision du préfet de l'Isère lui faisant obligation de quitter le territoire n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît ainsi pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'apparaît pas davantage entachée d'une violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ni d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

5. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 4, c'est sans méconnaître les stipulations précitées des article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant que le préfet a estimé que l'intéressé pouvait, à la date des décisions en litige, être éloigné sans délai sur le fondement du 3° de l'article L. 511-1-1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et faire l'objet d'une mesure d'interdiction du territoire d'une durée de deux ans.

6. En quatrième et dernier lieu, il résulte de ce qui est dit aux points 2 à 5 ci-dessus que M. C... n'est pas fondé à invoquer l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour demander l'annulation, par voie de conséquence, de la décision l'assignant à résidence.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application, au bénéfice de son avocat, des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

Mme F... G..., présidente de chambre ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme E... D..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 25 août 2020.

2

N° 19LY04455

dm


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04455
Date de la décision : 25/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-25;19ly04455 ?
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