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25/08/2020 | FRANCE | N°18LY02711

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 25 août 2020, 18LY02711


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... J... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 28 juillet 2016 par laquelle le président de la communauté d'agglomération Clermont-Communauté lui a notifié son licenciement pour suppression d'emploi.

Par un jugement n° 1601684 du 14 mai 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 juillet 2018 et un mémoire enregistré le 18 décembre 2019, Mme J.

.., représentée par Me B... (G... et associés), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... J... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 28 juillet 2016 par laquelle le président de la communauté d'agglomération Clermont-Communauté lui a notifié son licenciement pour suppression d'emploi.

Par un jugement n° 1601684 du 14 mai 2018, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 17 juillet 2018 et un mémoire enregistré le 18 décembre 2019, Mme J..., représentée par Me B... (G... et associés), avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 14 mai 2018 ;

2°) d'annuler la décision du président de la communauté d'agglomération Clermont-Communauté du 28 juillet 2016 ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Clermont-Communauté une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont, à tort, refusé d'examiner le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont est entachée la décision litigieuse, en relevant que la délibération prononçant la suppression de poste n'avait pas été contestée ;

- la délibération du 17 janvier 2016 prononçant la suppression de son poste est illégale, dès lors qu'elle n'est pas suffisamment motivée et que la suppression n'est pas décidée dans l'intérêt du service ;

- la décision litigieuse n'est pas justifiée par l'intérêt du service et procède d'un détournement de pouvoir ;

- elle a été adoptée en méconnaissance de l'obligation préalable de reclassement.

Par deux mémoires en défense enregistrés le 12 août 2019 et le 22 janvier 2020, la communauté d'agglomération Clermont-Communauté, représentée par Me I... (H... avocats), avocat, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme J... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle expose que :

- le moyen tiré de l'illégalité de la délibération du 17 janvier 2016 est irrecevable, dès lors qu'il procède d'une cause juridique nouvelle en appel et que les moyens relatifs aux conditions d'édiction d'un acte réglementaire ne peuvent plus être invoqués, par voie d'exception, après l'expiration du délai de recours ;

- les autres moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 27 janvier 2020, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 17 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... F..., première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., avocat, représentant Mme J..., et de Me Bonicel-Bonnefoi, avocat, représentant la communauté d'agglomération Clermont-Communauté ;

Considérant ce qui suit :

1. Par contrat à durée indéterminée signé le 12 février 2010, Mme J... a été recrutée par la communauté d'agglomération Clermont-Communauté, depuis devenue la communauté urbaine puis la métropole Clermont Auvergne Métropole, comme directeur général adjoint en charge des transports, des déplacements et de la mobilité durable. Par décision du 28 juillet 2016, le président de la communauté d'agglomération a prononcé son licenciement, à la suite de la suppression de son emploi. Mme J... relève appel du jugement du 14 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont examiné le moyen tiré de l'erreur d'appréciation dont serait entachée la décision litigieuse, en retenant, notamment, que la légalité de la délibération procédant à la suppression du poste occupé par Mme J... n'était pas contestée. Par suite, Mme J... n'est pas fondée à soutenir que les premiers juges se seraient abstenus d'examiner ce moyen.

3. Si l'appelante reproche aux premiers juges d'avoir entaché ce raisonnement d'une erreur de droit, une telle circonstance n'est pas susceptible d'affecter que le bien-fondé du jugement attaqué et demeure sans incidence sur sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'illégalité, soulevée par la voie de l'exception, de la délibération du 17 juin 2016 qui procède à la suppression du poste de directeur général adjoint en charge de la mobilité et des transports :

4. Contrairement à ce que prétend en défense la communauté d'agglomération Clermont-Communauté, ce moyen, qui constitue un moyen de légalité interne, ne peut être considéré comme relevant d'une cause juridique nouvelle en appel, dès lors que Mme J... s'était prévalue de moyens relevant de cette même cause juridique en première instance. En outre, la délibération du 17 juin 2016, qui constitue une mesure d'organisation du service, revêt le caractère d'une décision règlementaire, dont l'illégalité peut, par voie d'exception, être soulevée sans condition de délai. Enfin, la décision de licenciement litigieuse constitue une mesure d'application de cette délibération, dont la légalité est subordonnée à celle de cette délibération. Ainsi, Mme J... est recevable à exciper, par voie d'exception, de l'illégalité de la délibération du 17 juin 2016 qui supprime le poste de directeur général adjoint en charge de la mobilité et des transports qu'elle occupait jusqu'alors.

5. Toutefois, en premier lieu, la délibération du 17 juin 2016 revêtant, comme indiqué précédemment, le caractère d'une décision règlementaire, elle n'avait pas à être motivée en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, Mme J..., qui n'invoque aucune disposition précise à l'appui de ce moyen, ne peut utilement soutenir que cette délibération ne serait pas suffisamment motivée.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier des motifs mêmes de cette délibération dont l'exactitude n'est pas contestée, qu'un nouvel organigramme des services a été élaboré en vue de l'évolution de la communauté d'agglomération en communauté urbaine à compter du 1er janvier 2017. Celui-ci, approuvé par le comité technique du 7 avril 2016, a prévu une nouvelle distribution des attributions entre les emplois fonctionnels de directeurs généraux adjoints, entraînant la suppression de deux de ces postes, dont celui jusqu'alors occupé par Mme J..., compte tenu de la scission des compétences relatives au tourisme et à la mobilité entre deux directions générales adjointes distinctes. Il ressort des organigrammes produits que cette nouvelle organisation a été effectivement mise en oeuvre ultérieurement. Par ailleurs, si, comme le fait valoir Mme J..., la communauté urbaine a conservé les compétences en matière de transports et que ce domaine serait présenté comme une priorité politique, il est constant qu'une direction dédiée à l'aménagement et à la mobilité existe dans ce nouvel organigramme. Enfin, il ne ressort nullement des pièces du dossier que cette réorganisation, et les suppressions de postes qui en découlent, seraient en lien avec la rupture de la mise à disposition dont Mme J... avait antérieurement fait l'objet auprès du syndicat mixte des transports en commun de l'agglomération clermontoise. En l'absence d'autres précisions, le moyen tiré de ce que cette délibération serait étrangère à l'intérêt du service et procèderait dès lors d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

En ce qui concerne les autres moyens de la requête :

7. En premier lieu, comme indiqué précédemment, le licenciement de Mme J... est fondé sur la suppression de son poste, décidée par délibération du 17 juin 2016 dans la perspective de l'évolution de la communauté d'agglomération en communauté urbaine. Il résulte des points 5 et 6 que cette délibération n'est pas entachée d'illégalité. Par ailleurs, si Mme J... invoque la rupture de la mise à disposition dont elle avait antérieurement fait l'objet auprès du syndicat mixte des transports en commun de l'agglomération clermontoise, en raison du refus du président de la communauté d'agglomération de consentir une mise à disposition à temps plein, elle n'établit ni même ne démontre que le maintien de son emploi de directeur général adjoint, même à temps partiel, n'était plus justifié dans l'attente de la mise en place du nouvel organigramme. Elle n'apporte aucun commencement de preuve tendant à démontrer la réalité de la concertation qui aurait, selon elle, existé entre la communauté d'agglomération et ce syndicat en vue de l'évincer de ses fonctions. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que le motif justifiant son licenciement procèderait d'une erreur d'appréciation.

8. En deuxième lieu, et pour ces mêmes motifs, le moyen tiré d'un détournement de procédure ne peut davantage être retenu.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont (...) occupés (...) par des fonctionnaires régis par le présent titre (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu que les emplois civils permanents de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics à caractère administratif soient en principe occupés par des fonctionnaires et qu'il n'a permis le recrutement d'agents contractuels qu'à titre dérogatoire et subsidiaire, dans les cas particuliers énumérés par la loi, que ce recrutement prenne la forme de contrats à durée déterminée ou de contrats à durée indéterminée. Par suite, un agent contractuel ne peut tenir de son contrat le droit de conserver l'emploi pour lequel il a été recruté. Lorsque l'autorité administrative entend affecter un fonctionnaire sur cet emploi ou supprimer cet emploi dans le cadre d'une modification de l'organisation du service elle peut, pour ce motif, légalement écarter l'agent contractuel de cet emploi.

11. Il résulte toutefois d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés dont l'emploi est supprimé que les règles du statut général de la fonction publique qui imposent de donner, dans un délai raisonnable, aux fonctionnaires en activité dont l'emploi est supprimé une nouvelle affectation correspondant à leur grade, qu'il incombe à l'administration, avant de pouvoir prononcer le licenciement d'un agent contractuel recruté en vertu d'un contrat à durée indéterminée, de chercher à reclasser l'intéressé. La mise en oeuvre de ce principe implique que l'administration, lorsqu'elle entend pourvoir par un fonctionnaire l'emploi occupé par un agent contractuel titulaire d'un contrat à durée indéterminée ou supprimer cet emploi dans le cadre d'une modification de l'organisation du service, propose à cet agent un emploi de niveau équivalent, ou, à défaut d'un tel emploi et si l'intéressé le demande, tout autre emploi, que l'agent contractuel ne peut être licencié, sous réserve du respect des règles relatives au préavis et aux droits à indemnité, que si le reclassement s'avère impossible, faute d'emploi vacant, ou si l'intéressé refuse la proposition qui lui est faite.

12. Il est, en l'espèce, constant qu'aucun des postes de directeurs généraux adjoints n'était vacant à la date de la décision en litige, sans que Mme J... n'établisse qu'à cette même date, une vacance prochaine était d'ores et déjà connue. Par ailleurs, et contrairement à ce qu'elle prétend, la communauté d'agglomération n'était pas tenue de lui proposer un reclassement dans une entité distincte disposant d'une personnalité juridique propre, telle que le centre hospitalier universitaire, la commune de Clermont-Ferrand ou la société publique locale destinée à gérer l'office du tourisme. Si elle invoque également deux postes de directeurs relatifs aux projets de mobilité et aux grands projets opérationnels, ces postes, dont elle ne démontre pas le caractère équivalent au sien, n'ont été créés que postérieurement à la décision litigieuse. Au surplus, à défaut de poste vacant de niveau équivalent à celui qu'elle occupait jusqu'alors, la communauté d'agglomération lui a proposé, sans y avoir été tenue en l'absence de demande en ce sens de l'intéressée, un poste de directeur du tourisme et des relations internationales, qu'elle a refusé. Dans ces conditions, Mme J... n'est pas fondée à soutenir que la communauté d'agglomération aurait méconnu l'obligation de reclassement lui incombant.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme J... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Clermont Communauté, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme J.... Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 700 euros au titre des frais exposés par la communauté d'agglomération Clermont-Communauté, depuis devenue la métropole Clermont Auvergne Métropole.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme J... est rejetée.

Article 2 : Mme J... versera à la métropole Clermont Auvergne Métropole une somme de 700 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... J... et à la métropole Clermont Auvergne Métropole.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2020 à laquelle siégeaient :

Mme E... A..., présidente de chambre,

M. Pierre Thierry, premier conseiller,

Mme C... F..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 25 août 2020.

2

N° 18LY02711


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement.

Fonctionnaires et agents publics - Agents contractuels et temporaires - Fin du contrat - Licenciement.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : DMMJB AVOCATS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 25/08/2020
Date de l'import : 05/09/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18LY02711
Numéro NOR : CETATEXT000042283105 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-25;18ly02711 ?
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