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09/07/2020 | FRANCE | N°19LY04635

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 09 juillet 2020, 19LY04635


Vu la procédure suivante

Procédure contentieuse antérieure

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2019, par lequel le préfet de la Nièvre l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné l'Angola comme pays à destination duquel il serait reconduit d'office.

Par un jugement n° 1902655 du 2 décembre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 décembre 2019, M. E..., représ

enté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon ...

Vu la procédure suivante

Procédure contentieuse antérieure

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 5 septembre 2019, par lequel le préfet de la Nièvre l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné l'Angola comme pays à destination duquel il serait reconduit d'office.

Par un jugement n° 1902655 du 2 décembre 2019, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 décembre 2019, M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 2 décembre 2019 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le contrôle à l'issue duquel l'arrêté litigieux a été pris a méconnu les dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il n'a pas été mis en mesure de déposer une demande d'asile préalablement à l'arrêté litigieux ;

- le préfet, qui n'a pas cité les dispositions du 7° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du 7° du I de l'article L. 511-1 du même code, ne justifie pas qu'il constitue une menace pour l'ordre public et n'était pas en droit d'invoquer ce motif pour fonder son arrêté ;

- la décision ne fixe pas le pays de renvoi et méconnaît par conséquent l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- subsidiairement, si une telle décision devait être regardée comme existant, l'arrêté serait alors entaché d'une erreur de fait en désignant l'Angola comme pays de renvoi ;

Par un mémoire enregistré le 2 mars 2020, le préfet de la Nièvre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé ;

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 janvier 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bourrachot, président ;

Considérant ce qui suit :

1. Le requérant se présente sous le nom de M. E..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 20 décembre 1984 et déclare être entré en France le 31 août 2019. Ayant été interpellé le 5 septembre 2019, les services de police ont constaté qu'il n'avait pas de droit au séjour. Ayant relevé ses empreintes digitales, ils ont également constaté en consultant le fichier visabio que l'intéressé s'était vu refuser la délivrance d'un visa par les autorités portugaises le 5 novembre 2014, sous l'identité de Carlos Joao Antonio, ressortissant angolais. Par arrêté du même jour, le préfet de la Nièvre a fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, sur le fondement du 1° de l'article L.511-1 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile. M. E... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 7411 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013 (...) / Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile (...) / La délivrance de cette attestation ne peut être refusée au motif que l'étranger est démuni des documents et visas mentionnés à l'article L. 2111. Elle ne peut être refusée que dans les cas prévus aux 5° et 6° de l'article L. 7432. (...) ".

3. Aux termes de l'article R. 7412 du même code : " Lorsque l'étranger présente sa demande auprès (...) des services de police ou de gendarmerie (...), la personne est orientée vers l'autorité compétente. (...) ".

4. Aux termes de l'article L. 7434 du même code : " Sans préjudice des articles L. 5561 et L. 7432, lorsque l'étranger sollicitant l'enregistrement d'une demande d'asile a fait l'objet, préalablement à la présentation de sa demande, d'une mesure d'éloignement prise en application du livre V, celle-ci, qui n'est pas abrogée par la délivrance de l'attestation prévue à l'article L. 7411, ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de l'office, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet, d'irrecevabilité ou de clôture, ou, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d'asile contre une décision de rejet, avant la notification de la décision de la cour ".

5. Il ressort clairement du procès-verbal de l'audition du 5 septembre 2019, qui a suivi l'interpellation de M. E... le même jour, que ce dernier a manifesté son intention de demander l'admission au séjour au titre de l'asile en France. En présence d'une telle demande, formulée antérieurement à l'intervention de la mesure d'éloignement, il appartenait aux services de police de l'orienter vers l'autorité préfectorale afin qu'il puisse la déposer. Ainsi, contrairement à ce que soutient le préfet de la Nièvre, la demande du requérant n'entrait pas dans les prévisions de l'article L. 7434 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui concerne le cas où la demande d'asile est présentée postérieurement à l'intervention de la mesure d'éloignement. Par suite, le préfet de la Nièvre n'était pas en droit de prononcer à l'encontre de l'intéressé une obligation de quitter le territoire.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D..., avocat du requérant, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat de la somme de 1 000 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 2 décembre 2019 et l'arrêté du préfet de la Nièvre en date du 5 septembre 2019 sont annulés.

Article 2 : L'État versera à Maître D... la somme de 1 000 euros, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt en sera adressée au préfet de la Nièvre et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nevers.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme A..., présidente assesseure,

Mme B..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2020.

2

N° 19LY04635


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04635
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : ROTHDIENER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-07-09;19ly04635 ?
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