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02/07/2020 | FRANCE | N°20LY01161

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 02 juillet 2020, 20LY01161


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes, de désigner un expert à ses frais et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 7611 du code de justice administrative.

Par une ordonnance du 21 juin 2018, le président de la 2ème chambr

e du tribunal administratif de Dijon a transmis au tribunal administratif de Lyon la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes, de désigner un expert à ses frais et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 7611 du code de justice administrative.

Par une ordonnance du 21 juin 2018, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Dijon a transmis au tribunal administratif de Lyon la demande de M. A....

Par un jugement n° 1804773 du 3 mars 2020, le tribunal administratif de Lyon a déchargé M. A... des cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 à hauteur respectivement de sommes de 6 866 euros et 7 147 euros, en droits et en pénalités (article 1er) et a rejeté le surplus de cette demande (article 2).

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 20 mars 2020, M. D... A..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 3 mars 2020 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- Le jugement est irrégulier en ce que le tribunal, qui a suivi les conclusions écrites du rapporteur public, jamais communiquées contradictoirement aux contribuables, a rendu une décision dénaturant les pièces produites en ne les examinant pas ;

- le jugement est irrégulier pour avoir méconnu les stipulations de l'article 6 de de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et pour avoir porté atteinte à l'égalité des armes, le rapporteur public pouvant conclure jusqu'à deux jours avant l'audience alors que " la défense " doit absolument conclure trois jours avant l'audience qu'il est impossible de procéder par une autre voie que des observations orales d'un avocat après la lecture du mémoire du rapporteur public ;

- le jugement est irrégulier pour n'avoir pas répondu à l'argument tiré de la contradiction de l'argumentation de l'administration, qui écrit qu'elle n'a pas à engager un débat avant l'envoi d'une proposition de rectification, tout en affirmant que ce débat avait eu lieu ;

- c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur le principe d'indépendance des procédures ;

- la proposition de rectification qui lui a été adressée est insuffisante car se référant à une proposition de rectification adressée à l'entreprise et insuffisamment motivée sur l'existence d'un débat oral et contradictoire ;

- l'administration n'établit ni l'existence et le montant des distributions, ni leur appréhension sur le fondement des dispositions de l'article 109 du code général des impôts et a méconnu le principe d'annualité de l'impôt ;

- à aucun moment de la motivation ne l'administration, ne figure la preuve que la société a les capacités financières pour permettre un remboursement effectif du compte courant d'associé ;

- l'absence de débit des remboursements d'annulation, qui ne sont pas des arrhes, ne peut constituer une preuve d'appréhension de ces crédits ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la seule circonstance qu'il ait été associé à 50 % de la SCI Julie de l'Orcène, que cette société ait disposé de liquidités et qu'elle ait versé une somme à l'EURL Safetymmo Invest ne suffit pas à établir que cette somme constitue un apport de M. A... ;

- il détient indirectement Station de Lux, ce qui se traduit comptablement par un compte n° 4672 et non un compte courant d'associé à proprement parlé et il justifie de l'origine et du caractère non imposable de la somme portée sur le compte courant d'associé au sein de la société Ssafetymmo Invest ;

- s'agissant de ses relations avec la SCI Pijama, la société Safetymmo a bien encaissé un chèque mais l'a restitué, ce qui ressort de la pièce n°14 ;

- l'administration n'établit pas le caractère délibéré des manquements ;

- il maintient sa demande de nomination d'un expert.

L'affaire a été dispensée d'instruction en application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative par ordonnance du 18 mai 2020.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bourrachot, président de chambre,

- les conclusions de M. Jean-Paul Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant M. A... et de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... est le gérant et unique associé de l'EURL Safetymmo Invest, qui est assujettie à l'impôt sur les sociétés et qui exerce une activité de marchand de biens, ainsi qu'à titre accessoire celle de prestations et travaux immobiliers. Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. Par une proposition de rectification du 20 juillet 2016 adressée à M. A... après un contrôle sur pièces, l'administration a estimé que les sommes indument portées au crédit de son compte courant d'associé dans l'EURL Safetymmo Invest constituaient des revenus distribués en application du 1 de l'article 109 du code général des impôts. M. A... a demandé au tribunal administratif de Dijon la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes. Par une ordonnance du 21 juin 2018, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Dijon a transmis au tribunal administratif de Lyon la demande de M. A.... Par un jugement du 3 mars 2020, le tribunal administratif de Lyon a déchargé M. A... des cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2013 et 2014 à hauteur respectivement de sommes de 6 866 euros et 7 147 euros, en droits et en pénalités (article 1er) et a rejeté le surplus de cette demande (article 2). M. A... relève appel de l'article 2 de ce jugement.

2. Le jugement attaqué comporte le visa des pièces produites par le requérant. Cette mention fait foi jusqu'à preuve du contraire. Il ne résulte ni des pièces du dossier de premières, ni des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Lyon se serait conformé aux conclusions du rapporteur en n'analysant pas les pièces produites par le requérant et qu'il a visées.

3. Le rapporteur public, qui a pour mission d'exposer les questions que présente à juger le recours sur lequel il conclut et de faire connaître, en toute indépendance, son appréciation, qui doit être impartiale, sur les circonstances de fait de l'espèce et les règles de droit applicables ainsi que son opinion sur les solutions qu'appelle, suivant sa conscience, le litige soumis à la juridiction à laquelle il appartient, prononce ses conclusions après la clôture de l'instruction à laquelle il a été procédé contradictoirement. L'exercice de cette fonction n'est pas soumis au principe du caractère contradictoire de la procédure applicable à l'instruction. Il suit de là que, pas plus que la note du rapporteur ou le projet de décision, les conclusions du rapporteur public - qui peuvent d'ailleurs ne pas être écrites - n'ont à faire l'objet d'une communication préalable aux parties. Celles-ci ont en revanche la possibilité, après leur prononcé lors de la séance publique, de présenter des observations, soit oralement à l'audience, soit au travers d'une note en délibéré. Ainsi, les conclusions du rapporteur public permettent aux parties de percevoir les éléments décisifs du dossier, de connaître la lecture qu'en fait la juridiction et de saisir la réflexion de celle-ci durant son élaboration tout en disposant de l'opportunité d'y réagir avant que la juridiction ait statué.

4. La demande de décharge d'une imposition supplémentaire et des intérêts de retard, lesquels ne constituent pas une sanction, n'entre pas dans le champ d'application des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ces stipulations ne visent que les procès portant sur des droits ou obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale.

5. S'agissant de la demande de décharge des pénalités dont ont été assorties les impositions et, en tout état de cause, s'agissant de la demande de décharge de ces impositions et des intérêts dont elles ont été assorties, contrairement à ce que soutient le requérant, il avait la possibilité, après leur prononcé des conclusions du rapporteur public, de présenter des observations au travers d'une note en délibéré. Le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.

6. En raison du principe d'indépendance des procédures qui régit l'imposition des entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés et de leurs associés assujettis à l'impôt sur le revenu, un associé imposé dans la catégorie des revenus de capitaux immobiliers ne peut utilement soutenir, pour contester la régularité de sa propre procédure d'imposition, que l'existence et le montant des distributions procèderait d'une vérification de comptabilité irrégulière. Il en va ainsi alors même que l'entreprise assujettie à l'impôt sur les sociétés revêt la forme d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée.

7. Les moyens de M. A... dirigés contre la procédure d'imposition de l'EUR Safetymmo Invest doivent, dès lors, être écartés comme inopérants.

8. A la supposer établie, l'insuffisance de la motivation de la proposition de rectification adressée à l'EURL Safetymmo Invest sur l'existence d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification de comptabilité, lequel ne fonde pas les impositions établies au nom de M. A..., est sans incidence sur la régularité de la proposition de rectification qui a été adressée à ce dernier au regard des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, alors même que la seconde proposition de rectification faisait référence à la première.

9. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

10. Aux termes des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ".

11. L'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, en assimilant à une acceptation le silence conservé par le contribuable pendant le délai qui lui est imparti pour répondre à une proposition de rectification, et en lui attribuant dans ce cas la charge d'établir l'exagération de l'imposition, ne fait que tirer les conséquences des dispositions des articles L. 11, L. 54 B et L. 57 du livre des procédures fiscales. En revanche, en application des mêmes principes, lorsque le contribuable n'a pas accepté les rectifications qui lui ont été proposées, il appartient à l'administration d'établir le bien-fondé des impositions qu'elle a mises à la charge du contribuable.

12. Si l'administration fiscale a bien mis en oeuvre une procédure contradictoire, il ne résulte pas de l'instruction que M. A... aurait adressé au vérificateur des observations sur les rectifications que ce dernier envisageait. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'il incombe à l'administration d'établir le bien-fondé des impositions qu'elle a mises à sa charge.

13. Les autres moyens susvisés ont été écartés à bon droit par le jugement attaqué, dont il y a lieu d'adopter les motifs.

14. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il besoin de décider une expertise, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais d'instance exposés par M. A... soient mis à la charge de l'Etat qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme B..., présidente assesseure,

Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 2 juillet 2020.

N° 20LY01161 2

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. François BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SANCHEZ

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Date de la décision : 02/07/2020
Date de l'import : 28/07/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20LY01161
Numéro NOR : CETATEXT000042114828 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-07-02;20ly01161 ?
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