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18/06/2020 | FRANCE | N°18LY02569

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 18 juin 2020, 18LY02569


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. H... G... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2016 par lequel le préfet du Rhône lui a retiré son agrément de policier municipal.

Par un jugement n° 1609395 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2018 et un mémoire non communiqué enregistré le 3 avril 2019, M. G..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jug

ement du tribunal administratif de Lyon du 2 mai 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2016 par le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. H... G... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2016 par lequel le préfet du Rhône lui a retiré son agrément de policier municipal.

Par un jugement n° 1609395 du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2018 et un mémoire non communiqué enregistré le 3 avril 2019, M. G..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 2 mai 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2016 par lequel le préfet du Rhône lui a retiré son agrément de policier municipal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, dès lors que le rapporteur public n'était pas impartial et qu'il s'est borné à procéder au renvoi à des conclusions prononcées devant une autre formation de jugement ;

- le signataire de l'acte n'avait pas compétence pour signer les décisions portant sur les agréments des policiers municipaux ;

- il n'a pas été suffisamment informé des modalités de la procédure contradictoire, le courrier du préfet du Rhône du 30 septembre 2016 étant ambigu ;

- il n'a pas eu communication du courrier du 10 octobre 2016 envoyé par le conseil de la commune et visé par l'arrêté litigieux ;

- la décision litigieuse est entachée d'erreurs de fait et d'erreur d'appréciation ;

- la décision est entachée de détournement de pouvoir ;

- le préfet s'est estimé, à tort, lié par la demande de la commune.

Par un mémoire non communiqué, enregistré le 31 juillet 2018, le ministre de l'intérieur déclare s'en remettre aux observations présentées par le préfet du Rhône.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2019, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 26 juin 2019, la commune de Mornant, représentée par Me B..., intervient au soutien de la défense et demande que soit mise à la charge de M. G... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi du 22 avril 1905 ;

- la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme I..., présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me E... pour M. G... et de Me B... pour la commune de Mornant ;

Considérant ce qui suit :

1. M. G..., né le 30 janvier 1969, a été agréé le 9 mars 2005 en qualité de policier municipal par le préfet du Rhône et a obtenu le 7 juillet 2005 l'agrément du procureur près le tribunal de grande instance de Lyon. M. G... relève appel du jugement du 2 mai 2018 du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2016 par lequel le préfet du Rhône lui a retiré son agrément de policier municipal.

Sur l'intervention de la commune de Mornant :

2. La commune de Mornant ayant intérêt au rejet de la requête d'appel de M. G..., son intervention en défense doit être admise.

Sur la régularité du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 7 du code de justice administrative : " Un membre de la juridiction, chargé des fonctions de rapporteur public, expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu'elles appellent ". L'article R. 732-1 du même code précise : " Après le rapport qui est fait sur chaque affaire par un membre de la formation de jugement ou par le magistrat mentionné à l'article R. 222-13, le rapporteur public prononce ses conclusions lorsque le présent code l'impose (...) ".

4. En premier lieu, M. Laval, rapporteur public dans l'affaire n° 1609395 en litige a également prononcé des conclusions dans les affaires n°s 1509354, 1507547, 1509343, 1700028 et 1701668 ayant opposé la commune de Mornant à M. G.... Cette seule circonstance n'est cependant pas de nature à affecter son impartialité.

5. En second lieu, il ressort des mentions du jugement attaqué que le rapporteur public a prononcé des conclusions lors de l'audience au cours de laquelle la demande de M. G... a été examinée. La circonstance, à la supposer établie, qu'il se serait également référé à ses précédentes conclusions rendues dans des instances antérieures dans une autre formation de jugement est sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité externe :

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision contestée a été signée par M. D... C..., qui avait reçu délégation à cet effet par un arrêté du préfet du Rhône du 26 septembre 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 30 septembre 2016. La délégation de signature concerne notamment les décisions relatives aux polices municipales telles qu'elles résultent de la loi n° 99-291 du 15 avril 1999. Cette loi, dans sa version en vigueur, a modifié dans son article 7 l'article L. 412-49 du code des communes qui porte sur le retrait d'agrément. La référence à la loi n° 99-291 du 15 avril 1999 est suffisante. Ces dispositions, suffisamment précises, donnaient légalement compétence à ce dernier pour signer l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige manque en fait et doit être écarté.

7. En second lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". L'article L. 122-1 du même code prévoit que : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix ". Enfin, l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 prévoit que : " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardés dans leur avancement à l'ancienneté ".

8. Il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 30 septembre 2016, le préfet du Rhône a informé M. G... des différents griefs qui lui étaient reprochés par le maire de la commune de Mornant, de ce qu'il envisageait de lui retirer son agrément en qualité d'agent de police municipale, de sa possibilité dans un délai de quinze jours à compter de la réception du courrier de présenter des observations, et de son droit à être assisté d'un conseil. Les indications dans ce courrier étaient suffisantes pour que M. G... puisse présenter des observations ce qu'il a d'ailleurs fait par un courrier du 14 octobre 2016. Par ailleurs, M. G... a été reçu en entretien le 18 octobre 2016, et il n'établit ni ne soutient que la communication de son dossier lui aurait été refusée. Par suite, et alors même qu'il n'aurait pas été destinataire ou informé d'un courrier du conseil de la commune du 10 octobre 2016, pièce qui ne fait pas partie de son dossier M. G... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Rhône aurait méconnu les garanties offertes par les dispositions précitées de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ou celles de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905.

En ce qui concerne la légalité interne :

9. Aux termes de l'article R. 511-2 du code de la sécurité intérieure : " Les fonctions d'agent de police municipale ne peuvent être exercées que par des fonctionnaires territoriaux recrutés à cet effet (...) Ils sont (...) agréés par le représentant de l'Etat dans le département et le procureur de la République, puis assermentés. Cet agrément et cette assermentation restent valables tant qu'ils continuent d'exercer des fonctions d'agents de police municipale. (...)

L'agrément peut être retiré ou suspendu par le représentant de l'Etat ou le procureur de la République après consultation du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale. (...). D'autre part, aux termes de l'article R. 515-8 du même code, inséré dans le chapitre relatif à la déontologie des agents de police municipale : " L'agent de police municipale est tenu, dans la limite de ses attributions, d'exécuter les tâches relevant de la compétence du maire que celui-ci lui confie en matière de prévention et de surveillance du bon ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques. ". L'article R. 515-20 de ce code dispose également que " L'agent de police municipale est tenu de se conformer aux instructions du maire et, le cas échéant, des agents de police municipale chargés de son encadrement, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public (...) ".

10. Il résulte de ces dispositions que l'agrément accordé à un policier municipal peut légalement être retiré lorsque l'agent ne présente plus les garanties d'honorabilité auxquelles est subordonnée sa délivrance. L'honorabilité d'un agent de police municipale, nécessaire à l'exercice de ses fonctions, dépend notamment de la confiance qu'il peut inspirer, de sa fiabilité et de son crédit.

11. Le retrait d'agrément prononcé par le préfet est fondé sur le fait que " l'intéressé a reconnu n'avoir pas respecté certaines consignes données et avoir tenu des propos déplacés à l'égard d'une collègue ". Il ressort des pièces du dossier que M. G... a eu un comportement agressif auprès d'habitants, d'associations, de collègues, de gendarmes et a tenu des propos déplacés envers une collègue. Ces faits ne sont pas sérieusement contestés par l'intéressé qui se borne à se prévaloir de son ancienneté, des conditions difficiles d'exercice de ses missions et de la circonstance postérieure qu'il n'a pas rencontré de difficultés dans l'exercice de ses nouvelles fonctions auprès de mineurs. Même s'il n'est pas établi que le requérant aurait refusé à plusieurs reprises de porter l'uniforme, les autres agissements qui lui sont reprochés sont de nature, à eux seuls à remettre en cause la confiance nécessaire au bon accomplissement de sa mission tant en ce qui concerne ses collègues et ses supérieurs, que le maire et l'autorité judiciaire. Compte tenu de ces faits, et dès lors que M. G... ne présentait plus les garanties d'honorabilité requises pour occuper les fonctions d'autorité auxquelles il avait été nommé, le préfet du Rhône n'a pas entaché sa décision d'erreur d'appréciation.

12. Il ne ressort pas des pièces du dossier et de la teneur de la décision litigieuse que le préfet aurait méconnu l'étendue de sa compétence.

13. En dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

Sur les autres moyens :

14. Il appartient au requérant, tant en première instance qu'en appel, d'assortir ses moyens des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Il suit de là que le juge d'appel n'est pas tenu d'examiner un moyen que l'appelant se borne à déclarer reprendre en appel, sans l'assortir des précisions nécessaires. En se bornant à soutenir qu'à titre subsidiaire, il reprend l'intégralité de ses moyens de première instance et à les joindre à sa requête, M. G... n'énonce pas précisément les moyens de première instance non évoqués en appel qu'il entend reprendre. Il ne met ainsi pas la Cour en mesure de se prononcer sur les erreurs que le tribunal administratif aurait pu commettre en écartant ces moyens.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que demande M. G... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées aux mêmes fins par la commune de Mornant, qui en, sa qualité d'intervenante, n'est pas partie à l'instance, doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la commune de Mornant est admise.

Article 2 : La requête de M. G... est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Mornant tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... G..., au préfet du Rhône et à la commune de Mornant.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2020 à laquelle siégeaient :

Mme F... A..., présidente de chambre,

Mme J..., présidente-assesseure,

M. Pierre Thierry, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 juin 2020.

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N° 18LY02569


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-025 Police. Personnels de police.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SAUMET

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Date de la décision : 18/06/2020
Date de l'import : 15/07/2020

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18LY02569
Numéro NOR : CETATEXT000042114223 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-18;18ly02569 ?
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