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04/06/2020 | FRANCE | N°18LY03464

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 04 juin 2020, 18LY03464


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) La Closerie des lilas a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 et des intérêts de retard correspondants.

Par un jugement n°1606105 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 septem

bre 2018, la SCI La Closerie des lilas demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière (SCI) La Closerie des lilas a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 et des intérêts de retard correspondants.

Par un jugement n°1606105 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 septembre 2018, la SCI La Closerie des lilas demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 juillet 2018 ;

2°) de lui accorder la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- quand bien-même elle a fait l'objet d'une auto-liquidation, elle ne peut pas être regardée comme ayant bénéficié d'un droit à déduction et remplit ainsi les conditions prévues par l'article 268 du code général des impôts pour bénéficier du régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ;

- l'administration a méconnu sa propre doctrine, référencée BOI-TVAIMM-10-20-10 ;

- l'administration a illégalement fondé l'imposition sur sa propre doctrine ;

- l'administration ne peut lui opposer un changement de définition du bien immobilier postérieure à l'acquisition du bien.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par la SCI La Closerie des lilas n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., substituant Me C..., représentant la SCI La Closerie des Lilas ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du 7° de l'article 257 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée " Les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles. / (...) 1. Sont notamment visés : a) Les ventes et les apports en société de terrains à bâtir, des biens assimilés à ces terrains par le A de l'article 1594-0 G (...) ". Aux termes de cet article 1594-0 G : " Sous réserve de l'article 691 bis, sont exonérés de taxe de publicité foncière ou de droits d'enregistrement : / A. I. Lorsqu'elles entrent dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, les acquisitions : / 1° De terrains nus ou recouverts de bâtiments destinés à être démolis (...) ". Aux termes de l'article 285, en vigueur à la date du 29 juin 2007 : " Pour les opérations visées au 7° de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est due : (...) / 3° Par l'acquéreur (...) lorsque la mutation (...) porte sur un immeuble qui, antérieurement à ladite mutation (...), n'était pas placé dans le champ d'application du 7° de l'article 257. (...) " Aux termes du premier alinéa de l'article 246 de l'annexe II au code général des impôts, en vigueur à la même date : " Pour l'application du 3° de l'article 285 du code général des impôts, tout terrain à bâtir ou tout bien assimilé à ce terrain par le I du A de l'article 1594-0 G du même code, dont la mutation précédente ou l'apport en société précédent n'a pas été soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, est considéré comme n'ayant pas été placé antérieurement dans le champ d'application du premier alinéa du 7° de l'article 257 de ce code. "

2. Aux termes de l'article 268 du code général des impôts : " S'agissant de la livraison d'un terrain à bâtir, ou d'une opération mentionnée au 2° du 5 de l'article 261 pour laquelle a été formulée l'option prévue au 5° bis de l'article 260, si l'acquisition par le cédant n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d'imposition est constituée par la différence entre : / 1° D'une part, le prix exprimé et les charges qui s'y ajoutent ; / 2° D'autre part, selon le cas : / a) soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l'acquisition du terrain ou de l'immeuble ; (...) ". En application du 2° du 5 de l'article 260 de ce code, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons d'immeubles achevés depuis plus de cinq ans. Toutefois, le 5° bis de l'article 260 du même code prévoit que, sur leur demande, les personnes qui réalise une telle opération peuvent, sur leur demande, acquitter la taxe sur la valeur ajoutée.

3. Il résulte des dispositions précitées que le régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge s'applique aux livraisons d'immeubles achevés depuis plus de cinq ans pour lesquels le cédant a demandé à appliquer la taxe sur la valeur ajoutée et dont l'acquisition par ce dernier n'a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée lors de son acquisition. La circonstance que l'immeuble en cause ait initialement été acquis en vue d'être démoli est sans incidence sur l'application de ce régime de taxe sur la valeur ajoutée. Doit être assimilée à une opération n'ouvrant pas droit à déduction l'acquisition d'un terrain comportant un immeuble à démolir et dont la taxe sur la valeur ajoutée a été acquittée sur la marge, par l'acquéreur, en application du 3° de l'article 285 du code général des impôts alors en vigueur.

4. La SCI La Closerie des lilas, qui exerce une activité de construction vente, a acquis le 29 juin 2007, auprès d'un particulier, un ensemble immobilier comprenant deux parcelles. Une de ces parcelles, sur laquelle était édifiée une villa, a été regardée comme relevant de l'acquisition d'un terrain recouvert de bâtiments destinés à être démolis au sens de l'article 1594-0 G du code général des impôts. Son acquisition ainsi a été assimilée à une opération concourant à la livraison d'un immeuble neuf au sens du 7° de l'article 257 du code général des impôts, dans sa version alors applicable et a par conséquent été regardée comme imposable à la taxe sur la valeur ajoutée. La taxe applicable à cette opération a ainsi été acquittée sur la marge, par l'acquéreur, en application de l'article 268 et du 3° de l'article 285, alors en vigueur, du code général des impôts.

5. Cet immeuble a été cédé par la SCI La Closerie des lilas sans avoir été démoli, par acte du 27 novembre 2014. Bien que cette opération soit en principe exonérée en application du 2° du 5 de l'article 261 du code général des impôts, la requérante a opté pour l'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée en application du 5 bis de l'article 260 du même code. La taxe a été acquittée sur la marge en application de l'article 268 du code général des impôts.

6. La SCI La Closerie des lilas a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a estimé, en application de la documentation référencée BOI-TVA-IMM-10-20-10 prise pour l'application de l'article 268 du code général des impôts que la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge était inapplicable aux opérations, telles que celle de l'espèce, dans le cadre desquelles un immeuble acquis comme terrain à bâtir était ensuite cédé comme un immeuble bâti depuis plus de cinq ans et avait ainsi " changé de qualification juridique ". La SCI La Closerie des lilas interjette appel du jugement par lequel, après avoir estimé que la rectification était illégalement fondée sur la doctrine, le tribunal administratif de Lyon a substitué à cette base légale celle de l'article 268 du code général des impôts et rejeté sa demande.

7. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que, d'une part, contrairement à ce que soutient le ministre en se prévalant de sa doctrine, laquelle ne saurait légalement fonder une imposition, la circonstance que le bien litigieux ait été initialement acquis en vue de sa démolition ne saurait par elle-même faire obstacle à l'application du régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge au sens de l'article 268 du code général des impôts dès lors que la cession concerne un bien achevé depuis plus de cinq ans et que, d'autre part, les circonstances que le bien cédé ait été acquis par le cessionnaire sous le régime de la marge et que ce dernier ait alors lui-même acquitté la taxe en application de l'article 285 alors en vigueur du code général des impôts ne font pas davantage obstacle à ce que cette cession soit également taxée sous le régime de la marge. A ce titre, si l'administration fait valoir que la taxe acquittée lors de l'acquisition de l'immeuble, d'un montant de 248 004 euros, a été enregistrée en comptabilité de la société requérante sur le compte de taxe sur la valeur ajoutée déductible de l'exercice clos en 2007, cette écriture ne peut qu'être regardée comme une erreur comptable dès lors qu'il résulte de l'instruction que cette taxe sur la valeur ajoutée a bien été collectée et acquittée par la société requérante. Par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que ces livraisons devaient être imposées sur le prix de vente total des terrains à bâtir cédés.

8. Il résulte de ce qui précède que la SCI La Closerie des lilas est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à la SCI La Closerie des lilas au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 10 juillet 2018 est annulé.

Article 2 : La SCI La Closerie des lilas est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 et des intérêts de retard correspondants.

Article 3 : L'Etat versera à la SCI La Closerie des lilas la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI La Closerie des lilas et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 14 mai 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme A..., présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 juin 2020.

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N° 18LY03464


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY03464
Date de la décision : 04/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-02-09 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Calcul de la taxe.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SIMON L.V.

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-06-04;18ly03464 ?
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