La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/01/2020 | FRANCE | N°19LY01905

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 30 janvier 2020, 19LY01905


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... F... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 8 août 2018 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1900581 du 9 avril 2019, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions et a enjoint au préfet de l'Isère de délivrer à Mme F... un titre de séjour temporai

re portant la mention " vie privée et familiale ".

Procédure devant la cour

Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... F... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 8 août 2018 par lesquelles le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1900581 du 9 avril 2019, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions et a enjoint au préfet de l'Isère de délivrer à Mme F... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ".

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 20 mai 2019, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 avril 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme F... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- le motif tiré de la fraude à la reconnaissance de paternité et à la nationalité française de l'enfant E..., qui ne prive l'intéressée d'aucune garantie, doit être substitué au motif du refus de séjour tiré du défaut d'entretien et d'éducation par le prétendu père de l'enfant ;

- à l'occasion de sa demande de titre de séjour, Mme F... a d'abord déclaré que ses deux enfants étaient de nationalité nigériane ; elle n'a jamais eu de vie commune avec le père du jeune E... ; M. A..., qui a reconnu un autre enfant dans les mêmes circonstances suspectes, ne contribue pas à l'entretien et à l'éducation de cet enfant, avec lequel il n'a pas de contact ; l'ensemble de ces éléments établit le caractère frauduleux de la reconnaissance de sa paternité ;

- il a effectué un signalement au procureur de la République ; l'absence de décision de l'autorité judiciaire ne fait pas obstacle à ce qu'il puisse établir l'existence d'une fraude ;

- en conséquence de cette fraude, Mme F... ne peut se prévaloir du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire enregistré le 3 janvier 2020, Mme B... F..., représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'État d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient :

- qu'aucun des moyens invoqués par le préfet n'est fondé ;

- qu'elle s'en rapporte aux moyens développés et pièces produites en première instance s'agissant de la légalité des décisions en litige.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Josserand-Jaillet, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme F..., de nationalité nigériane, née le 16 mars 1983, déclare être entrée en France le 13 octobre 2011. Elle a présenté le 28 octobre 2011 une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 27 mars 2012, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 13 juin 2013. Le 5 décembre 2012, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Elle a sollicité, le 28 octobre 2014, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 6 mars 2015, le préfet de l'Isère lui a opposé un refus, assorti de l'obligation de quitter le territoire français sans délai et d'une décision fixant le pays de destination. Par jugement n° 1502229 du 6 juillet 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé celles de ces décisions portant obligation de quitter le territoire sans délai et fixant le pays de destination. Le 8 décembre 2015, le préfet de l'Isère a pris à l'encontre de l'intéressée un nouveau refus de titre de séjour, assorti de l'obligation de quitter le territoire français sans délai et d'une décision fixant le pays de destination. Par un arrêt n° 16LY01552 du 14 décembre 2017, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement n° 1507700 du 29 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions du 8 décembre 2015. Par des décisions du 8 août 2018, le préfet de l'Isère a retiré le titre de séjour temporaire qu'il avait délivré à l'intéressée, a rejeté sa nouvelle demande de titre de séjour formée sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé son pays d'origine pour destination. Le préfet de l'Isère relève appel du jugement n° 1900581 du 9 avril 2019 par lequel le tribunal administratif a annulé ces décisions du 8 août 2018.

2. Pour refuser à Mme F... le titre de séjour qu'elle sollicitait en qualité de parent d'enfant français, le préfet de l'Isère a relevé que le père déclaré de son fils E..., né le 4 mai 2014, n'avait jamais eu de vie commune avec elle, ne contribuait pas à l'entretien et à l'éducation de l'enfant et n'entretenait aucun lien avec celui-ci. Le tribunal administratif, après avoir relevé que le préfet de l'Isère ne demandait pas dans ses écritures contentieuses de substituer un autre motif à celui sur lequel il avait ainsi fondé ses décisions, a sanctionné ce motif pour annuler celles-ci.

3. Toutefois, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué, le juge peut procéder à la substitution demandée.

4. Le préfet, à hauteur d'appel, fait valoir que la nationalité française de l'enfant E... n'est pas établie dès lors que la reconnaissance de sa paternité par M. A... est frauduleuse et a été effectuée dans le seul but de permettre à Mme F... d'obtenir un titre de séjour en application du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il demande que le motif tiré de la fraude soit substitué au motif principal initial des décisions en litige.

5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; (...) ".

6. Si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil, et s'impose donc en principe à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient néanmoins au préfet, s'il est établi, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, tant que la prescription prévue par les articles 321 et 335 du code civil n'est pas acquise, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée par la personne se présentant comme père ou mère d'un enfant français.

7. Jusqu'à sa dernière demande de titre de séjour, rejetée par l'arrêté du 8 août 2018, Mme F... avait mentionné que ses enfants, dont le jeune E..., sont ressortissants du Nigeria et ne s'était jusqu'alors pas prévalue de la qualité de mère d'un enfant français. Elle n'a invoqué cette qualité que dans sa demande devant le tribunal administratif dirigée contre les décisions du 8 décembre 2015, en faisant alors valoir que son fils E..., né en France le 4 mai 2014, a été reconnu le 18 mars 2014 par M. D... A..., ressortissant français né en Côte-d'Ivoire, qui possède la nationalité française. Toutefois, à l'exception du versement à l'intéressée d'une somme de cent euros par mandat payé le 16 février 2016, aucune pièce du dossier ne révèle une contribution de M. A... à l'entretien et à l'éducation de l'enfant non plus qu'un lien affectif. Le préfet fait valoir, sans être contredit par les pièces du dossier, que M. A..., résidant en région parisienne, n'a jamais eu de vie commune avec Mme F..., résidant depuis 2012 à Nice puis dans la région grenobloise sans que l'intéressée produise d'élément de nature à établir leur rencontre autrement que le 18 mars 2014, date de la déclaration, commune, de paternité. Si Mme F... produit un témoignage, daté du 26 septembre 2018, faisant état de visites de M. A..., ce document se borne à reproduire des déclarations de Mme F... au témoin sans que celui-ci ait constaté les faits allégués, au demeurant non circonstanciés. Il ressort également des pièces du dossier que l'enfant E... a été accompagné à l'établissement scolaire qu'il fréquentait pour l'année 2017/2018 par sa mère et M. F..., présenté comme son compagnon et père de deux de ses autres enfants, de nationalité nigériane et demandeur d'un titre de séjour, sans qu'apparaisse d'élément montrant un intérêt de M. A... pour l'enfant non plus qu'aucune participation financière de sa part. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, nonobstant l'état de la procédure judiciaire en cours sur la filiation, l'ensemble de ces faits révèlent, ainsi que le soutient le préfet de l'Isère, que la reconnaissance par M. A... de l'enfant de Mme F... n'a été effectuée que pour permettre à celle-ci de bénéficier d'un titre de séjour et qu'elle présente ainsi un caractère frauduleux. Par suite, l'intéressée ne saurait se prévaloir de ce qu'elle est la mère d'un enfant français pour solliciter l'application du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Ce motif est de nature à fonder légalement la décision de refus d'un titre de séjour. Il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Mme F... n'étant privée d'aucune garantie procédurale liée au motif substitué, il y a lieu de faire droit à la substitution demandée.

9. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens invoqués par Mme F....

10. L'arrêté en litige, qui comporte l'énoncé des éléments de fait et de droit qui en constituent le fondement, dans une mesure permettant au destinataire d'en connaître et discuter utilement les motifs, et au juge de l'excès de pouvoir de statuer en toute connaissance de cause, est suffisamment motivé.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

11. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Ces stipulations ne sauraient, en tout état de cause, s'interpréter comme comportant pour un État l'obligation générale de respecter le choix, par un demandeur de titre de séjour, d'y établir sa résidence privée et de permettre son installation ou le regroupement de sa famille sur son territoire.

12. Aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

13. Mme F..., entrée en France le 13 octobre 2011, est la mère de trois enfants qui y sont nés, le 2 décembre 2011, le 4 mai 2014 et le 29 juin 2018 et d'une enfant mineure résidant au Nigeria. Il ressort des pièces du dossier que, si Mme F... justifie être hébergée depuis le 8 juin 2018 à l'établissement public départemental " Le Charmeyran ", à Grenoble, avec son compagnon, M. F..., et père des deux enfants, Blessings et Elisabeth, nés en 2011 et 2018, tous de nationalité nigériane, celui-ci est également demandeur d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il n'est dans ces conditions fait état d'aucun obstacle à ce que cette vie familiale, récente, se poursuive dans le pays d'origine commun. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la durée et des conditions de son séjour en France et du jeune âge de ses enfants, le refus de titre de séjour en litige ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis. Cette même décision n'implique pas la séparation d'un ou des enfants d'avec Mme F.... Dès lors, ce refus ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, il ne méconnaît pas l'intérêt supérieur des enfants de l'intéressée, qui est de vivre avec elle, garanti par l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant. Il n'est pas plus entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'il est susceptible de comporter pour sa situation personnelle.

14. Si Mme F... invoque une violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont l'application ne figure pas parmi les motifs de la décision en litige, ce moyen est en tout état de cause dépourvu de toute précision permettant d'en apprécier la portée.

15. L'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " et aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) ".

16. Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues notamment à l'article L. 313.11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Ainsi qu'il vient d'être dit, Mme F... ne remplissait pas les conditions posées par les dispositions du 6° et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de l'Isère n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

17. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ".

18. Mme F..., de nationalité nigériane, s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour le 8 août 2018. A cette date, elle était ainsi dans le cas prévu par les dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme F... n'est pas fondée à se prévaloir de l'illégalité de ce refus.

19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ".

20. Pour les raisons indiquées ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour, Mme F... n'est pas fondée à soutenir que, étant mère d'un enfant français, les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile s'opposent à son éloignement.

21. En troisième lieu, pour les motifs mentionnés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant et n'est pas plus entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :

22. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " Ce dernier texte énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

23. En premier lieu, pour les motifs indiqués plus haut, Mme F... n'est pas fondée à se prévaloir de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

24. En second lieu, l'existence de risques auxquels l'intéressée serait exposée en cas de retour dans le pays dont elle possède la nationalité n'est pas établie. Ainsi qu'il a été dit au point 13, il ne ressort pas des pièces du dossier que le retour de l'intéressée dans ce pays méconnaisse l'intérêt supérieur de ses enfants, garanti par l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.

25. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions en litige.

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante verse une somme à Mme F... au titre des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1900581 du tribunal administratif de Grenoble du 9 avril 2019 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de Mme F... sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B... F....

Copie en sera adressée au préfet de préfet de l'Isère et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

M. Josserand-Jaillet, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 janvier 2020.

N° 19LY01905


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01905
Date de la décision : 30/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: M. Daniel JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : MARCEL

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-01-30;19ly01905 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award