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28/01/2020 | FRANCE | N°18LY01629

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 28 janvier 2020, 18LY01629


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. O... B..., M. E... B..., et Mme F... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 15 mars 2016 par lequel le maire de la commune d'Onnion a délivré à M. et Mme A... un permis de construire un chalet et un garage indépendant.

Par un jugement n° 1602806 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 4 mai 2018 et le 2 août 2019,

M. et Mme A..., représentés par Me H..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. O... B..., M. E... B..., et Mme F... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 15 mars 2016 par lequel le maire de la commune d'Onnion a délivré à M. et Mme A... un permis de construire un chalet et un garage indépendant.

Par un jugement n° 1602806 du 8 mars 2018, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 4 mai 2018 et le 2 août 2019, M. et Mme A..., représentés par Me H..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 8 mars 2018 et de rejeter la demande de M. B... ;

2°) dans le dernier état de leurs écritures, de mettre à la charge de M. O... B..., la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande de M. O... B... est irrecevable ; M. B... n'avait pas qualité pour agir au nom de l'indivision ; c'est à tort que le tribunal a estimé que M. B... avait entendu introduire une action en son seul nom ; enfin, M. B... est dépourvu d'intérêt pour agir au sens de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;

- le projet ne méconnaît pas l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme puisqu'il s'insère au sein d'un ensemble de neuf constructions formant un groupe de constructions implantées à moins de trente mètres les unes des autres, à flanc de montagne, en bordure de la forêt et en impasse de la voie communale qui les dessert ;

- ils disposent en vertu de l'arrêté du 10 décembre 2010, par lequel le maire d'Onnion ne s'est pas opposé à la déclaration préalable de travaux valant division en vue de construire, de la cristallisation des règles d'urbanisme applicables pour une durée de cinq années, ce qui exclut que puisse être invoquées à l'encontre du projet les dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés le 9 juillet et le 26 août 2019, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. O... B..., représenté par Me G..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise solidairement à la charge de M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande est recevable en qualité de voisin immédiat du projet et dès lors qu'un litige est en cours sur l'enclavement de ses parcelles voisines par le projet ; la circonstance que les autres propriétaires indivis aient renoncé à contester le permis en litige n'est pas de nature à rendre irrecevable sa demande ;

- le projet méconnaît l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme ; les parcelles d'assiette du projet ont déjà fait l'objet de certificats d'urbanisme négatifs et ont été classées par le plan local d'urbanisme ( PLU) adopté le 3 juin 2019 par le conseil municipal de la commune en zone agricole.

La clôture de l'instruction a été fixée au 6 septembre 2019 en application des dispositions des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme L... K..., première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me D... pour M. et Mme A..., en présence de Me J... substituant Me G..., avocat de M. B..., qui n'a pas souhaité formuler d'observations ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 8 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, à la demande de M. O... B..., annulé l'arrêté du 15 mars 2016 par lequel le maire de la commune d'Onnion leur a délivré un permis de construire une maison d'habitation et un garage sur la parcelle cadastrée section A n° 4900, classée en zone NAc au lieu-dit Borbon.

Sur le bien-fondé du jugement du 8 mars 2018 :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de M. B... :

2. Les requérants soutiennent que c'est à tort que le tribunal n'a pas fait droit aux fins de non-recevoir soulevées en première instance et tirées de ce que M. O... B... ne justifiait pas de sa qualité pour agir au nom de l'indivision B..., que son action ne pouvait être considérée comme une action personnelle et qu'il ne justifiait pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir.

3. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable : " Une personne (...) n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire (...) que si la construction (...) ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (...) ". Aux termes de l'article 815-2 du code civil : " Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence. (...) Lorsque des biens indivis sont grevés d'un usufruit, ces pouvoirs sont opposables à l'usufruitier dans la mesure où celui-ci est tenu des réparations. ".

4. Pour admettre que M. O... B... justifiait de sa qualité à agir ainsi que d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire délivré à M. et Mme A..., le jugement attaqué a relevé d'une part, que M. O... B... pouvait, du fait de sa qualité de nu-propriétaire, introduire une action personnelle et demander l'annulation d'un permis de construire délivré à un tiers pour l'édification d'une construction située à proximité du bien immobilier dont il est nu-propriétaire indivis, sans avoir à obtenir le consentement des autres indivisaires. D'autre part, les premiers juges ont relevé sa situation de voisin immédiat, qu'il avait versé au dossier des documents cartographiques permettant d'apprécier l'importance du projet et qu'il soutenait que le projet aurait pour effet d'enclaver totalement ses parcelles. De tels éléments et alors que M. O... B... a assigné depuis 2014 Mme A... pour faire reconnaître par les juges judiciaires un droit de passage au bénéfice de ses parcelles étaient de nature à établir tant la qualité que l'intérêt pour agir de M. O... B.... Dans ces conditions, M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que la demande tendant à l'annulation du permis de construire du 15 mars 2016 n'était pas recevable.

En ce qui concerne le bien-fondé du motif d'annulation du permis de construire :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 122-5 alors en vigueur du code de l'urbanisme : " L'urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants, sous réserve de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d'installations ou d'équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées. ".

6. Au sens de ces dispositions, un groupe de constructions traditionnelles ou d'habitations doit s'entendre comme un groupe de plusieurs bâtiments qui, bien que ne constituant pas un hameau, se perçoivent, compte tenu de leur implantation les uns par rapport aux autres, notamment de la distance qui les sépare, de leurs caractéristiques et de la configuration particulière des lieux, comme appartenant à un même ensemble. Pour déterminer si un projet de construction réalise une urbanisation en continuité par rapport à un tel groupe, il convient de rechercher si, par les modalités de son implantation, notamment en termes de distance par rapport aux constructions existantes, ce projet sera perçu comme s'insérant dans l'ensemble existant.

7. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section A n° 4900 est voisine de huit constructions situées respectivement à environ 30 et 50 mètres. Ces constructions sont elles-mêmes isolées, en impasse de la route communale n° 2 et s'implantent à proximité d'une vaste zone naturelle. Ces constructions, situées au lieu-dit Borbon caractérisé par un habitat très diffus, ne peuvent ainsi, compte tenu de leur nombre et de leur implantation, être regardées comme appartenant à un même ensemble ni être assimilées à un groupe de constructions traditionnelles ou d'habitations existant au sens des dispositions précitées au point 5.

8. En second lieu, aux termes de l'article L. 442-14 du code de l'urbanisme : " Dans les cinq ans suivant l'achèvement d'un lotissement, constaté dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, le permis de construire ne peut être refusé ou assorti de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à l'autorisation du lotissement. (...) ". L'arrêté de non opposition à déclaration préalable délivré le 28 octobre 2010 pour le détachement de la parcelle d'assiette du projet comme lot à bâtir n'emportait pas par lui-même autorisation de construire. M. et Mme A... ne sont donc pas fondés à se prévaloir de droits acquis à construire qui résulteraient de cette autorisation. En outre, l'annulation du permis en litige en date du 15 mars 2016 est fondée sur l'application des dispositions de l'article L. 122-5 du code de l'urbanisme, issues de l'ancien article L. 145-3 III du même code, qui s'appliquent sans préjudice de la cristallisation des règles d'urbanisme intervenue postérieurement à la date du 28 octobre 2010 en vertu des dispositions de l'article L. 442-14 précitées.

9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé le permis de construire qui leur avait été délivré le 15 mars 2016.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. et Mme A... demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de M. O... B..., qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme A... le versement d'une somme de 2 000 euros à Jean-Michel B....

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme A... verseront la somme de 2 000 euros à Jean-Michel B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... et Mme N... A... et à M. O... B....

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

Mme M... P..., présidente de chambre ;

M. Thierry Besse, président-assesseur ;

Mme L... K..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 28 janvier 2020.

1

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N° 18LY01629

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18LY01629
Date de la décision : 28/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation nationale. Dispositions législatives du code de l'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : MEROTTO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-01-28;18ly01629 ?
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