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14/11/2019 | FRANCE | N°19LY01912

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 14 novembre 2019, 19LY01912


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 26 avril 2019 par lesquelles le préfet de la Savoie lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé et lui a interdit tout retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par une ordonnance n° 1903244 du 7 mai 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a transmis sa requête au tribunal administratif de Gren

oble en application de l'article R. 776-16 du code de justice administrative.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 26 avril 2019 par lesquelles le préfet de la Savoie lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'éloignement forcé et lui a interdit tout retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

Par une ordonnance n° 1903244 du 7 mai 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a transmis sa requête au tribunal administratif de Grenoble en application de l'article R. 776-16 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1903165 du 16 mai 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du préfet de la Savoie du 26 avril 2019 en tant qu'il prononce à l'encontre de M. B... une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, a enjoint au préfet de prendre toute mesure propre à mettre fin au signalement de l'intéressé dans le système d'information Schengen et a mis à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 1 000 euros au titre des frais du litige.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 mai 2019, le préfet de la Savoie demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble du 16 mai 2019 ;

2°) de rejeter la demande de première instance de M. B....

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Grenoble, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est suffisamment motivée en droit et en fait ; aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction fassent l'objet de motivations distinctes ;

- cette décision est parfaitement fondée.

La requête a été communiquée à M. B... qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né en décembre 1994, est entré irrégulièrement en France dans le courant de l'année 2017 après avoir transité par l'Italie. Le 26 avril 2019, il a fait l'objet d'un contrôle d'identité qui a révélé sa situation irrégulière. Par un arrêté du même jour, le préfet de la Savoie l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Le préfet de la Savoie fait appel du jugement du 16 mai 2019 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

2. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) "

3. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Ainsi et dès lors que la décision prononçant une interdiction de retour sur le territoire français est suffisamment motivée en droit et en fait au regard des critères énoncés par la loi, rappelés ci-dessus, le préfet de la Savoie n'avait pas à motiver spécialement sa décision de fixer à une année la durée de cette interdiction. Il est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a annulé sa décision du 26 avril 2019 portant interdiction de retour sur le territoire français au motif que la durée de cette interdiction n'était pas motivée.

4. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. B... devant le tribunal à l'encontre de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

5. En premier lieu, la décision a été signée par M. Patrick Lavault, conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, directeur de la citoyenneté et de la légalité, en vertu d'une délégation consentie par un arrêté du préfet de la Savoie du 29 janvier 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour.

6. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de la décision en litige, ni des pièces du dossier que le préfet de la Savoie n'aurait pas, avant d'arrêter sa décision, tant dans son principe que dans sa durée, tenu compte de la circonstance que l'intéressé n'avait pas fait l'objet de précédentes mesures d'éloignement en France et ne constituait pas une menace pour l'ordre public. Le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas examiné attentivement la situation de M. B... avant de prendre la décision en litige doit donc être écarté.

7. En troisième lieu, si M. B... soutient qu'il a besoin d'une greffe de cornée, il ne l'établit pas et ne justifie d'aucune circonstance humanitaire qui aurait dû conduire le préfet à ne pas prononcer d'interdiction de retour sur le territoire français. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est entré irrégulièrement en France dans le courant de l'année 2017, alors qu'il avait fait l'objet, selon ses déclarations, d'une décision l'obligeant à quitter le territoire italien et que la délivrance d'un visa lui avait été refusé par le consulat de France en Algérie. Il est célibataire et sans enfant à charge et ne justifie pas de l'existence de liens particuliers avec la France ni être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'au moins l'âge de vingt-deux ans. Ainsi, le préfet de la Savoie n'a commis aucune erreur d'appréciation en prononçant une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français et en en fixant la durée à un an.

8. En dernier lieu, la circonstance que cette décision emporte des effets dans les autres pays de l'espace Schengen est sans incidence sur sa légalité.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an prise à l'encontre de M. B... et lui a enjoint de mettre fin au signalement de l'intéressé dans le système d'information Schengen.

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 1903165 du 16 mai 2016 du magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble sont annulés.

Article 2 : Les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 26 avril 2019 prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Grenoble ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à Me D... et à M. A... B.... Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2019, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 novembre 2019.

2

N° 19LY01912


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY01912
Date de la décision : 14/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme GONDOUIN
Avocat(s) : SERGENT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-11-14;19ly01912 ?
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