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22/10/2019 | FRANCE | N°17LY01526

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 22 octobre 2019, 17LY01526


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. J... C... et Me A... K..., en sa qualité de mandataire judiciaire de M. C..., ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 12 mai 2014 par laquelle la directrice départementale des territoires de l'Isère a suspendu le versement de la bonification de deux prêts qui avaient été accordés à M. C... et a procédé à leur déclassement ainsi qu'au recouvrement de la bonification acquise, ensemble la décision du 22 juillet 2014 ayant rejeté le recours gracieux de M. C....
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. J... C... et Me A... K..., en sa qualité de mandataire judiciaire de M. C..., ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 12 mai 2014 par laquelle la directrice départementale des territoires de l'Isère a suspendu le versement de la bonification de deux prêts qui avaient été accordés à M. C... et a procédé à leur déclassement ainsi qu'au recouvrement de la bonification acquise, ensemble la décision du 22 juillet 2014 ayant rejeté le recours gracieux de M. C....

Par un jugement n° 1407606 du 9 février 2017, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 8 avril 2017 et les 21 mars et 6 avril 2019 (non communiqué), M. J... C... et Me A... K..., ce dernier agissant en sa qualité de mandataire judiciaire, représentés par Me N..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 février 2017 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler la décision précitée du 12 mai 2014 de la directrice départementale des territoires ensemble la décision du 22 juillet 2014 ayant rejeté le recours gracieux de M. C... ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens et celle de 13 euros au titre des dépens de l'instance.

Ils soutiennent que :

- les décisions en litige sont entachées de l'incompétence de leur signataire ;

- ces décisions sont insuffisamment motivées ;

- elles sont entachées d'erreur de droit en ce qu'elles visent le décret n° 91-93 du 23 janvier 1991 inapplicable en l'espèce et que les conditions prévues par les textes réglementaires pour prononcer la déchéance ne sont pas remplies ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que M. C... est le seul bénéficiaire des prêts en litige pour une utilisation professionnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2019, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme P..., présidente-assesseure,

- et les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a été autorisé le 5 décembre 2008 par le préfet de l'Isère à bénéficier de la bonification liée à deux prêts à moyen terme spéciaux " jeunes agriculteurs " destinés à financer l'achat, d'une part, d'un bâtiment principal pour sa fromagerie pour un coût de 65 000 euros et d'autre part de bâtiments annexes nécessaires à la création d'une pension de chevaux et de gîtes pour un coût de 39 000 euros, soit un taux de 1% correspondant à une subvention respectivement de 16 095,27 et 12 023,23 euros. A la suite d'un contrôle sur place et après que M. C... a été mis en mesure de faire valoir ses observations, la directrice départementale des territoires de l'Isère, par décision du 12 mai 2014, a suspendu le versement de ces bonifications, " qu'elle formalise " selon les termes de cette décision par deux décisions du 28 avril 2014 de déclassement de ces prêts, et a rejeté le 22 juillet 2014 le recours gracieux de M. C... dirigé contre ces décisions. M. C... et Me K... relèvent appel du jugement du 9 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'annulation de ces décisions.

2. En premier lieu, Mme M... G..., directrice départementale des territoires, disposait, par arrêté du préfet de l'Isère du 29 janvier 2014 publié au recueil des actes administratifs, d'une délégation de signature à l'effet de signer la décision du 22 juillet 2014. Mme F... H..., chef du service agriculture et développement rural, disposait, par arrêté de la directrice départementale des territoires du 11 février 2014 publié au recueil des actes administratifs, d'une délégation de signature à l'effet de signer les décisions des 28 avril et 12 mai 2014. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence des signataires des actes en litige doit être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, si les décisions de déclassement de prêts bonifiées du 28 avril 2014 ne sont pas à elles-seules suffisamment motivées par le visa de textes, et notamment des articles D. 343-18 et suivants du code rural et de la pêche maritime, elles sont jointes à la décision du 12 mai 2014 qui expose avec précision l'ensemble des circonstances de fait fondant la suspension du versement des bonifications et le déclassement des prêts. Le rejet du recours gracieux du 22 juillet 2014 est lui aussi, suffisamment motivé. Par suite, les décisions litigieuses sont suffisamment motivées.

4. En troisième lieu, une erreur ou omission dans les visas d'un acte administratif n'est pas de nature à en affecter la légalité. Il est constant que les décisions litigieuses n'ont pas fait application du décret 91-93 du 23 janvier 1991. Dès lors, la circonstance que les décisions en litige visent ce décret, est sans influence sur leur légalité.

5. En quatrième lieu, aux termes des dispositions alors applicables de l'article D. 343-3 du code rural et de la pêche maritime : " En vue de faciliter leur première installation, il peut être accordé aux jeunes agriculteurs qui satisfont aux conditions fixées par la présente section les aides suivantes : / (...) 2° Des prêts à moyen terme spéciaux. ". Selon le 8° de l'article D. 343-5 du même code, dans ses dispositions applicables au présent litige, " le jeune agriculteur, candidat aux aides mentionnées à l'article D. 343-3, doit, s'il bénéficie d'un prêt à moyen terme spécial, s'engager à conserver le bien faisant l'objet du prêt pour un usage identique pendant au moins cinq ans. ". L'article D. 343-13 du même code alors applicable dispose : " Les prêts à moyen terme spéciaux réservés aux jeunes agriculteurs sont destinés au financement des dépenses affectées aux activités agricoles au sens de l'article L. 311-1. Ils ont pour objet de financer les dépenses afférentes à la première installation, notamment pour la reprise totale ou partielle d'une exploitation, sa mise en état et son adaptation et, le cas échéant, le paiement des soultes de partage. Ils sont exclusivement destinés : / 1° Au financement des dépenses suivantes : / a) Le besoin en fonds de roulement au cours de la première année d'installation, la reprise, la mise en état et l'adaptation du capital mobilier et immobilier, hors foncier, nécessaire à l'installation ; (...) ". Enfin, aux termes des dispositions alors applicables de l'article D. 343-18-2 : " (...) Lorsque le bénéficiaire d'un prêt à moyen terme spécial ne respecte pas l'engagement prévu au 8° de l'article D. 343-5, il est tenu de rembourser la somme correspondant aux bonifications d'intérêt dont il a bénéficié, assortie des intérêts au taux légal en vigueur. (...) " .

6. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que les prêts à moyen terme spéciaux prévus par l'article D. 343-3 du code rural et de la pêche maritime doivent bénéficier à des personnes ayant la qualité de jeunes agriculteurs.

7. Il est constant que les autorisations de financement par deux prêts à moyen terme ont été présentées par le seul M. C... en sa qualité de jeune agriculteur et lui ont été accordées à ce titre, au demeurant assorties de la mention " sous réserve du respect de la réglementation en vigueur ". Or il a été constaté lors d'une visite sur place réalisée le 12 avril 2011 que M. C... n'était propriétaire des biens financés par les prêts bonifiés que pour 50 % et qu'il n'a pas été justifié de l'utilisation des sommes prêtées. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'acte de vente notarié du 28 janvier 2009 que les bâtiments décrits au point 1 ont été acquis non seulement par M. C... lui-même, mais également, à concurrence de 50 %, par sa compagne, Mme O... I..., éducatrice spécialisée, et que ces acquisitions ont été financées par les prêts bonifiés mentionnés au point 1. M. C... en se bornant à indiquer, qu'il est le seul assuré pour les prêts et que les documents ne sont pas paraphés, n'établit pas l'inexactitude des mentions portées dans l'acte de vente. L'attestation d'attribution de biens de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) en date du 26 janvier 2010 mentionne une rétrocession de biens pour M. C... et Mme I.... M. C... étant copropriétaire des biens financés par les prêts bonifiés avec Mme I... qui n'est pas agricultrice, il ne peut justifier que les prêts seront utilisés pour un usage professionnel pendant une durée de cinq ans. La circonstance que le tribunal de grande instance de Grenoble a ordonné par décision du 25 novembre 2015 à l'établissement bancaire de communiquer l'original des prêts n'est pas de nature, en l'état, à démontrer l'inexactitude des pièces versées au dossier. Dès lors, la directrice départementale des territoires de l'Isère a pu, en l'état de l'instruction, sans erreur de droit ni erreur manifeste d'appréciation, estimer que les conditions d'octroi des prêts n'étaient pas respectées. Par suite, cette autorité administrative a pu suspendre par décision du 12 mai 2014 le versement de ces bonifications, procéder par décisions du 28 avril 2014 au déclassement des prêts ainsi qu'au recouvrement de la bonification acquise, et rejeter le 22 juillet 2014 le recours gracieux de M. C... dirigé contre ces décisions.

8. Il résulte de ce qui précède que M. C... et Me K... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au versement de sommes au titre des frais liés au litige doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... et Me K... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. J... C..., à Me A... K... et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2019, à laquelle siégeaient :

Mme E... B..., présidente de chambre,

Mme P..., présidente-assesseure,

Mme D... L..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 22 octobre 2019.

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N° 17LY01526


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17LY01526
Date de la décision : 22/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-06 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Aides de l'Union européenne.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : MLADENOVA MAURICE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-10-22;17ly01526 ?
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