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03/10/2019 | FRANCE | N°18LY04678

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 03 octobre 2019, 18LY04678


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 27 novembre 2018 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 1808699 du 29 novembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ces

décisions et mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 700 euros à Me C.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 27 novembre 2018 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 1808699 du 29 novembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions et mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 700 euros à Me C... en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 20 décembre 2018, le préfet de la Haute-Savoie demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 novembre 2018.

Le préfet de la Haute-Savoie soutient que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il a procédé à un examen particulier de la situation de M. A....

La requête a été communiquée à M. A... qui n'a ni demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle, ni produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Le rapport de Mme H..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet de la Haute-Savoie relève appel du jugement en date du 29 novembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 27 novembre 2018 par lesquelles il a obligé M. A..., ressortissant albanais, né le 10 septembre 1978, à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

2. Pour annuler la décision du 1er mai 2019 faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français, ainsi que, par voie de conséquence, les autres décisions prises à son encontre le même jour, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a relevé que M. A... avait indiqué lors de son audition par les services de police, le 1er mai 2019, qu'il souhaitait formuler une nouvelle demande d'asile et qu'alors que le requérant a clairement exprimé, auprès des autorités de police, son intention de demander le réexamen de sa demande d'asile, l'arrêté attaqué ne mentionnait nullement cette circonstance, ne visait aucune disposition du livre septième du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatif au droit d'asile et aucun des motifs de l'arrêté contesté ne révélait que le préfet de la Haute-Savoie aurait procédé à un examen de cette demande. Le magistrat désigné par le président du tribunal en concluait que le préfet de la Haute-Savoie ne pouvait être regardé comme ayant procédé à un examen particulier de la situation de M. A....

3. Toutefois, ainsi que le fait valoir le préfet de la Haute-Savoie en appel, il ne ressort d'aucune pièce du dossier, et en particulier pas des procès-verbaux de l'interpellation et des auditions de M. A..., que ce dernier aurait fait état auprès des services de police des démarches qu'il avait entreprises ou aurait manifesté sa volonté de présenter une demande d'asile. Ainsi, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise sans examen particulier de la situation de l'intéressé, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur ce motif pour annuler la décision portant obligation de quitter le territoire français ainsi que, par voie de conséquence, les autres décisions prises le même jour par le préfet de la Haute-Savoie.

4. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif.

Sur les autres moyens soulevés par M. A... dans sa demande :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la demande de M. A...:

5. D'une part, en vertu des articles L. 741-1, L. 744-1 et R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tout étranger souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande, en principe, au plus tard trois jours ouvrés après sa présentation et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013. L'autorité administrative compétente peut prévoir que la demande est présentée auprès de la personne morale à laquelle a été déléguée, par convention, la possibilité d'assurer certaines prestations d'accueil, d'information et d'accompagnement social et administratif des demandeurs d'asile pendant la période d'instruction de leur demande. La structure de pré-accueil est notamment chargée de renseigner en ligne le formulaire de demande pour le compte du demandeur d'asile et de prendre rendez-vous avec le guichet unique pour le demandeur d'asile et lui remettre une convocation.

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 743-2 du même code dans sa version alors applicable : "Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : 1° L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris une décision d'irrecevabilité en application des 1° ou 2° de l'article L. 723-11 ; / 2° Le demandeur a informé l'office du retrait de sa demande d'asile en application de l'article L.723-12 ; / 3° L'office a pris une décision de clôture en application de l'article L. 723-13. L'étranger qui obtient la réouverture de son dossier en application de l'article L. 723-14 bénéficie à nouveau du droit de se maintenir sur le territoire français ; / 4° L'étranger n'a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3° de l'article L. 723-11, qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement ; / 5° L'étranger présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d'une première demande de réexamen ; / 6° L'étranger fait l'objet d'une décision définitive d'extradition vers un Etat autre que son pays d'origine ou d'une décision de remise sur le fondement d'un mandat d'arrêt européen ou d'une demande de remise par une cour pénale internationale".

7. Hors les cas visés tant à l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant l'hypothèse d'un ressortissant étranger placé en rétention, qu'à l'article L. 743-2 du même code, le préfet saisi d'une demande d'asile est tenu de délivrer au demandeur l'attestation mentionnée à l'article L. 741-1 précité de ce code. Il résulte, en outre, de ces dispositions que le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France bénéficie en principe du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, de celle de la Cour nationale du droit d'asile. Par voie de conséquence, les dispositions en cause font ainsi nécessairement obstacle à ce qu'un préfet prenne à l'encontre de l'étranger qui en a clairement exprimé le souhait avant un éventuel placement en rétention une quelconque mesure d'éloignement hormis les cas où l'étranger entrerait dans l'un des cas visés à l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où l'attestation de demande d'asile peut être refusée.

8. Il ressort des pièces du dossier que la première demande d'asile de M. A... a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 27 mars 2017, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 6 juillet 2018. Cette procédure concernait l'examen d'une première demande d'asile et non le réexamen d'une telle demande ainsi que l'indique de façon erronée la décision du préfet de la Haute-Savoie. M. A... s'est ensuite présenté le 21 novembre 2018 à la structure de premier accueil des demandeurs d'asile de Haute-Savoie, qui a rempli un formulaire de demande d'asile et a remis à M. A... une convocation à un entretien au guichet unique des demandeurs d'asile de la préfecture de l'Isère le 5 décembre 2018 à 9h15. Ainsi, M. A... doit être regardé comme ayant valablement introduit une demande de réexamen de protection internationale le 21 novembre 2018. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas soutenu par le préfet de la Haute-Savoie, que M. A... entrait dans l'un des cas où entrerait dans l'un des cas visés à l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où l'attestation de demande d'asile peut être refusée. Par suite, en prenant à son encontre le 27 novembre 2018 une obligation de quitter le territoire français, le préfet de la Haute-Savoie a commis une erreur de droit. Cette décision doit, pour ce motif, être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions du même jour par lesquelles le préfet a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

9. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions du 27 novembre 2018 par lesquelles il a obligé M. A..., ressortissant albanais, né le 10 septembre 1978, à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Haute-Savoie est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. E... A....

Copie en sera adressée au préfet de la Haute Savoie et à Me C....

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

Mme B..., présidente-assesseure,

Mme H..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.

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N° 18LY04678


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04678
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : LOUIS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-10-03;18ly04678 ?
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