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03/10/2019 | FRANCE | N°18LY00188

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 03 octobre 2019, 18LY00188


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 et des pénalités correspondantes ;

Par un jugement n° 1701062 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejet

é sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 janvier ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014 et des pénalités correspondantes ;

Par un jugement n° 1701062 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 janvier 2018, M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 9 novembre 2017 ;

2°) de lui accorder la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, l'administration supporte la charge de la preuve ;

- à titre principal, la méthode de reconstitution est radicalement viciée ou excessivement sommaire ;

- à titre subsidiaire, la méthode de reconstitution ne tient pas compte de toutes les données propres à son activité ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- M. B... supporte la charge de la preuve

- aucun des moyens invoqués par M. B... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré, premier conseiller,

- les conclusions de Mme C..., rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui exerce une activité de commerce de fruits et légumes sur les marchés, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au cours de laquelle le vérificateur a constaté l'absence de comptabilité et procédé à une reconstitution de son chiffre d'affaires. A l'issue de cette procédure, M. B... a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu portant sur les années 2012 et 2013 et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, notifiés selon la procédure contradictoire, assortis d'intérêts de retard et de majorations pour manquement délibéré. M. B... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

2. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission./ Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge./ Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69. "

3. Au cours du contrôle, M. B... a été dans l'incapacité de produire le moindre document comptable et s'est borné à produire des relevés bancaires et des copies de factures, dont le droit de communication exercé par l'administration auprès des fournisseurs a permis de révéler qu'elles étaient incomplètes. Dans ces conditions, alors même que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas été saisie, la charge de la preuve repose sur M. B... en application du troisième alinéa de l'article L. 192 précité.

Sur la reconstitution des bénéfices et du chiffre d'affaires :

4. Le vérificateur a reconstitué les achats effectués en additionnant les factures présentées au cours du contrôle et celles qui ont été obtenues auprès des fournisseurs dans le cadre du droit de communication. Il a ensuite appliqué un coefficient de marge moyen à partir des prix constatés au cours d'un contrôle inopiné qui s'est déroulé le 28 avril 2015, sur l'étal intérieur et l'étal extérieur du marché de Dijon. Au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014, le coefficient a été fixé à 3 pour les produits vendus sous la halle de Dijon et à 2,2 pour les produits vendus à l'extérieur. Ces coefficients ont été diminués respectivement, à 2,7 et 2 au titre des exercices clos en 2012 et 2013, le vérificateur ayant admis l'explication du contribuable suivant laquelle les prix auraient été augmentés en 2014. Ces mêmes coefficients ont été retenus pour les marchés de Chenôve et de Grésille, qui n'ont pas fait l'objet d'un relevé de prix. Certaines ventes telles que les pâtisseries n'ont pas fait l'objet de reconstitution, en l'absence de toute facture produite. Le vérificateur a accepté la demande du contribuable de considérer que seules 20 % des marchandises étaient vendues sous halle et devaient ainsi se voir appliquer le coefficient le plus important. A l'issue de la réclamation, l'administration a admis que 18,5 % du chiffre d'affaires était réalisé sous halle en 2012 et 2013 et 18 % au titre de l'année 2014. Alors que le vérificateur avait appliqué un coefficient de pertes de 15 % pour les seules ventes à l'extérieur, ce taux a été porté à 20 % et un pourcentage de pertes de 5 % a été reconnu pour les ventes sous halle dans le cadre de l'admission partielle de sa réclamation. Par ailleurs, des charges ont été admises, dont un montant de frais de transport de 11 700 euros et un montant de frais divers forfaitaire de 10 000 euros.

5. En premier lieu, M. B... soutient que l'utilisation des prix relevés au cours d'un contrôle inopiné, pour évaluer un coefficient de marge serait excessivement sommaire. Il critique ainsi le fait que le vérificateur ait appliqué à l'ensemble de son activité le taux de marge relevé à Dijon, dont la clientèle aisée achèterait selon lui des produits de bonne qualité en petite quantité, alors que l'activité des marchés de Chenôve et de Grésille connaît une clientèle plus populaire, qui achèterait davantage des produits de base en grande quantité (cagettes). Toutefois, M. B... ne produit aucun élément concret au soutien de cette différence de chiffre d'affai res en fonction de la clientèle, qui constitue, dès lors, une pure allégation de sa part. En outre, Si M. B... fait valoir que les prix ont été relevés en début de journée alors qu'ils diminueraient en cours et surtout en fin de matinée, cette pratique doit être regardée comme ayant été prise en compte par l'application des taux de pertes importants qui ont été retenus, ainsi qu'il a été mentionné au point 4. Ainsi, la reconstitution des bénéfices et du chiffres d'affaires n'est ni radicalement viciée, ni excessivement sommaire.

6. En second lieu, M. B... soutient que le vérificateur aurait insuffisamment tenu compte de ses déplacements pour évaluer ses frais de transport et qu'en appliquant la règle d'évaluation retenue par le vérificateur, ceux-ci doivent ainsi être augmentés de 4 795 euros par exercice. L'administration ne conteste pas ces déplacements supplémentaires et se borne à répondre qu'il convient d'inclure ces frais dans les " frais divers " retenus par le vérificateur. Toutefois, il ressort clairement de la proposition de rectification que le vérificateur n'a pas entendu inclure les frais de transport dans les " frais divers " retenus. Le requérant est ainsi fondé à demander la réduction de ses bases imposables au titre des années 2012 et 2013 à concurrence de ce montant.

7. En revanche, M. B... n'établit pas que son épouse, qui travaille avec lui comme conjoint collaborateur, ait voyagé séparément. Par suite, M. B... n'est pas fondé à demander que les frais de transport de l'entreprise soient augmentés de ces déplacements dont la réalité n'est pas justifiée.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 12 du code général des impôts : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année. " Aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. "

9. Les rappels de cotisations de sécurité sociale consécutifs à des redressements doivent être compris dans les charges de l'exercice au cours duquel une entreprise s'est reconnue débitrice des droits rappelés ou, à défaut, dans les charges de l'exercice au cours duquel la décision de rappel a été rendue exécutoire.

10. M. B... fait valoir que, consécutivement au rehaussement de ses bénéfices, il a fait l'objet d'un contrôle de la part du régime social des indépendants, qui a procédé au cours de l'année 2015 à des rappels de cotisations sociales pour des montants de 22 643 euros en droits et 1 160 euros en pénalités, au titre de l'année 2012 et de 28 230 euros en droits et 1 446 euros en pénalités, au titre de l'année 2013. Toutefois, il résulte de ce qui vient d'être dit que ces rappels, qui ont été établis au cours de l'année 2015 et n'ont fait l'objet d'aucune provision, ne peuvent venir en déduction des exercices clos en 2012 et 2013. Il en va de même en ce qui concerne les rappels de cotisations au régime social des indépendants concernant Mme B....

11. Il résulte de ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la réduction de ses bases imposables des années 2012 et 2013 de la somme de 4 795 euros par exercice.

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. B... au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : Les bases imposables de M. B... à l'impôt sur le revenu au titre des exercices clos en 2012 et 2013 sont réduites de la somme de 4 795 euros par exercice.

Article 2 : M. B... est déchargé des droits et pénalités auxquels il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, correspondant à la réduction des bases d'imposition décidée à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Dijon, en date du 9 novembre 2017, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme A..., présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019

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N° 18LY00188


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY00188
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Rectification (ou redressement) - Commission départementale.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Divers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : LEGI CONSEILS BOURGOGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-10-03;18ly00188 ?
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