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13/06/2019 | FRANCE | N°18LY00121

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 13 juin 2019, 18LY00121


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2018, la SASU Euro Dépôt Immobilier, dont le siège est 30-32, rue de la Tourelle à Longpont-sur-Orge (42), représentée par Me Courrech, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler la décision du 15 novembre 2017 par laquelle le maire de la commune de Chevigny-Saint-Sauveur (21) lui a refusé un permis de construire, valant autorisation d'exploitation commerciale, pour la création d'un magasin de bricolage à l'enseigne " Brico Dépôt " d'une surface de vente de 7 887 m², dans la ZAC des Terres Rous

ses, sis RD 107 ;

2°) d'annuler l'avis défavorable émis le 28 septembre 2017...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2018, la SASU Euro Dépôt Immobilier, dont le siège est 30-32, rue de la Tourelle à Longpont-sur-Orge (42), représentée par Me Courrech, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler la décision du 15 novembre 2017 par laquelle le maire de la commune de Chevigny-Saint-Sauveur (21) lui a refusé un permis de construire, valant autorisation d'exploitation commerciale, pour la création d'un magasin de bricolage à l'enseigne " Brico Dépôt " d'une surface de vente de 7 887 m², dans la ZAC des Terres Rousses, sis RD 107 ;

2°) d'annuler l'avis défavorable émis le 28 septembre 2017 par la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) sur sa demande du 3 avril 2017 ;

3°) d'enjoindre, d'une part, à la commune de Chevigny-Saint-Sauveur de saisir la Commission nationale d'aménagement commercial de sa demande, d'autre part, à cette dernière, de se prononcer à nouveau sur cette demande, respectivement dans un délai d'un mois et de quatre mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.

La SASU Euro Dépôt Immobilier soutient que :

- c'est à tort que la CNAC a considéré que le projet n'était pas compatible avec le SCoT du Dijonnais, qui ne contient pas de document d'aménagement commercial, mais seulement un document de planification déterminant des orientations générales ; la commune de Chevigny-Saint-Sauveur est incluse dans le périmètre identifié au document d'orientation générales (DOG) comme ayant " un rôle moteur du Pôle métropolitain englobant l'ensemble des créations ou des extensions en cours ou projetées à court terme ", lequel est destiné à accueillir des " fonctions commerciales majeures " comprenant des offres non alimentaires ; en outre, les zones d'activités existantes auxquelles se réfère la CNAC ne sont pas spécialement répertoriées en raison de leur caractère commercial alors que le SCoT ne prohibe pas l'implantation de surfaces commerciales en dehors de celles-ci ; enfin, le projet n'est pas une création puisqu'il ne consiste qu'en un réaménagement, avec une modeste extension de 1 450 m², d'une activité existante sur deux sites du même pôle métropolitain ;

- c'est aussi à tort que la CNAC s'est fondée sur l'éloignement de 550 mètres du projet de la station de transport en commun et sur le fait que l'accotement le long de la RD 107 n'est pas réservé aux piétons, dès lors que le recours à des transports dits " doux " ne permet pas l'emport des gros matériels et les matériaux de bricolage destinés à la vente.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 4 octobre 2018, la commune de Chevigny-Saint-Sauveur, représentée par Me Barberousse, avocat, conclut à l'annulation de la décision de refus et de l'avis de la CNAC, elle fait valoir que :

- elle a intérêt à ce que le projet se réalise sur son territoire ;

- le projet est compatible avec les orientations générales du SCoT prises dans leur ensemble et, en tout état de cause, ces mêmes orientations, dans lesquelles ni la hiérarchisation ni la planification des fonctions commerciales ne sont justifiées, portent une atteinte excessive à la liberté d'établissement et sont donc incompatibles avec le paragraphe 15 de la directive n° 2006/123/ CE du 12 décembre 2006.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Souteyrand, président-assesseur,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la SASU Euro Dépôt Immobilier et de Me Barberousse, représentant la commune de Chevigny-Saint-Sauveur.

Une note en délibéré, présentée pour la SASU Euro Dépôt Immobilier, a été enregistrée le 9 mai 2019 ;

Considérant ce qui suit :

1. Sur le recours de la société Euro Dépôt Immobilier, la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a, le 28 septembre 2017, aux motifs tirés de l'incompatibilité du projet avec les orientations générales du schéma de cohérence territorial (SCoT) du Dijonnais et de l'éloignement des transports en commun ainsi que de l'insuffisance des passages pour piétons, confirmé l'avis défavorable émis le 1er juin 2017 par la commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) de Côte-d'Or sur la demande de la société en vue de la délivrance d'un permis de construire, valant autorisation d'exploitation commerciale, pour la création d'un magasin de bricolage à l'enseigne " Brico Dépôt " d'une surface de vente de 7 887m², dans la ZAC des Terres Rousses située dans la commune de Chevigny-Saint-Sauveur, après transfert de deux magasins de 3 278 et 2 664 m2 respectivement installés sur les communes de Chenôve et de Marsannay-la-Côte, lesquelles font également partie de l'agglomération de Dijon. La société Euro Dépôt Immobilier demande l'annulation de la décision du 15 novembre 2017 par laquelle le maire de la commune de Chevigny-Saint-Sauveur lui a refusé ce permis de construire, valant autorisation d'exploitation commerciale et de l'avis défavorable émis le 28 septembre 2017 par la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC).

Sur l'intervention de la commune de Chevigny-Saint-Sauveur :

2. Le maire de Chevigny-Saint-Sauveur étant l'auteur de la décision en litige, prise au nom de cette commune, celle-ci a la qualité de défendeur à la présente instance et, nonobstant la circonstance qu'en raison de l'avis défavorable de la CNAC, le maire était en situation de compétence liée pour refuser le permis de construire sollicité par la société Euro Dépôt Immobilier, son intervention ne peut donc être admise. Et, par voie de conséquence, eu égard à sa qualité de défendeur, le moyen que la commune soulève par la voie de l'exception, tiré de l'illégalité du SCoT du Dijonnais, doit, en tout état de cause, être écarté en tant qu'il est irrecevable.

Sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction :

3. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / (...). ".

4. En application de ces dispositions, l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi, et il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce. En outre, en application de ces mêmes dispositions et de celles de l'article L. 142-1 du code de l'urbanisme, les autorisations délivrées par les commissions d'aménagement commercial doivent être compatibles avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale, pris dans son ensemble. Ce document peut fixer des orientations générales et des objectifs d'implantations préférentielles des activités commerciales définis en considération des exigences d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement ou de qualité de l'urbanisme.

5. En premier lieu, le document d'orientations générales (DOG) du SCoT du Dijonnais, approuvé le 4 novembre 2010 et qui couvre la commune de Chevigny-Saint-Sauveur, précise en prescriptions : " Avertissement : il est entendu que les commerces dits " de moyennes surfaces " proposent une surface de vente de 300 à 1 000 m², tandis que les commerces dits " de grande surface " ont une surface de vente supérieure à1 000 m². Sur le Pôle métropolitain de l'agglomération dijonnaise, les fonctions commerciales sont les suivantes : (...) - fonctions commerciales relais où l'armature marchande sera limitée à une offre alimentaire dense (avec supermarchés pouvant afficher des superficies de vente de 1 000 à 3 000 m², et commerces de bouche spécialisés). Il s'agit aujourd'hui et par exemple des espaces commerciaux de Chevigny-Saint-Sauveur (...). Pour les fonctions commerciales relais identifiées sur des pôles relais, l'offre marchande sera composée d'alimentaire dense (supermarchés de 1 000 à 3 000 m² de vente et commerces de bouche spécialisés) et attractives complétée par une offre non alimentaire répondant aux besoins occasionnels (moyennes surface en bricolage/ quincaillerie, jardinerie, petit électroménager (...). ".

6. En l'espèce, il est constant que si la commune de Chevigny-Saint-Sauveur est incluse dans le " Pôle métropolitain de l'agglomération dijonnaise ", elle ne constitue pas l'un des deux " pôles relais ", identifiés comme tels au document graphique joint au DOG, dans lesquels l'offre alimentaire peut être complétée par une offre non alimentaire répondant aux " besoins occasionnels (moyennes surface en bricolage/quincaillerie, jardinerie) ". Et, en tout état de cause, la seule extension de plus de 1 800 m² prévue au projet de la surface commerciale existante, actuellement répartie sur deux magasins situés dans les communes de Chenôve et de Marsannay-la-Côte, n'entre pas dans la catégorie des " moyennes surfaces " au sens des prescriptions précitées du même DOG. Par suite, nonobstant la circonstance qu'il est prévu au même document " (...) de donner la priorité au renouvellement, à l'intensification (...) et à l'extension de zones d'activité déjà constituées par rapport à la création ex nihilo de nouvelles zones pour les projets le permettant. ", c'est à bon droit que la CNAC a estimé que le projet de transfert-extension de la société Euro Dépôt Immobilier n'était pas compatible avec les orientations générales du SCoT du Dijonnais prises dans leur ensemble.

7. En second lieu, si la société Euro Dépôt Immobilier est fondée à soutenir que, s'agissant d'un magasin de vente d'articles de bricolage lourd et de matériaux destinés surtout aux professionnels, la circonstance que son implantation soit assez éloignée d'un arrêt de transport en commun et peu accessible aux piétons, n'est pas de nature, à elle seule, à faire regarder le projet comme de nature à compromettre le respect de l'objectif d'aménagement du territoire susmentionné, il ressort de ce qui a été dit au point précédent que l'avis de la CNAC aurait également été défavorable si la Commission ne s'était fondée que sur le seul constat de l'incompatibilité du projet avec le SCoT du Dijonnais.

8. Par suite, la société Euro Dépôt Immobilier, dont les conclusions à fin d'annulation de l'avis de la CNAC, qui n'a pas de caractère décisoire, sont irrecevables, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que la CNAC a rejeté son recours et que le maire de la commune de Chevigny-Saint-Sauveur a refusé de lui délivrer le permis de construire valant autorisation commerciale qu'elle sollicitait. En conséquence ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la commune de Chevigny-Saint-Sauveur n'est pas admise.

Article 2 : La requête de la SASU Euro Dépôt Immobilier est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SASU Euro Dépôt Immobilier et à la commune de Chevigny-Saint-Sauveur.

Copie sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC).

Délibéré après l'audience du 9 mai 2019 à laquelle siégeaient :

M Seillet, président,

M. Souteyrand, président-assesseur,

MmeB..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 13 juin 2019.

2

N° 18LY00121


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY00121
Date de la décision : 13/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Eric SOUTEYRAND
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SCP COURRECH ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-06-13;18ly00121 ?
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