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09/01/2019 | FRANCE | N°18LY03711

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre a - formation à 3, 09 janvier 2019, 18LY03711


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de lui accorder, à titre principal, la décharge et, à titre subsidiaire, la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1105091 du 18 novembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à cette demande.

Par un arrêt n° 15LY01002 du 3 janvier 2017, la cou

r administrative d'appel de Lyon, faisant droit à l'appel du ministre des finances et des ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de lui accorder, à titre principal, la décharge et, à titre subsidiaire, la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1105091 du 18 novembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à cette demande.

Par un arrêt n° 15LY01002 du 3 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Lyon, faisant droit à l'appel du ministre des finances et des comptes publics a annulé ce jugement du tribunal administratif de Grenoble et rejeté la demande de M. D...devant ce tribunal et ses conclusions devant la cour.

Par une décision n° 408643 du 3 octobre 2018, enregistrée à la cour administrative d'appel de Lyon le 4 octobre 2018 sous le n° 18LY03711, le Conseil d'Etat, sur la demande de M. D...a, d'une part, annulé l'arrêt n° 15LY01002 du 3 janvier 2017 de la cour administrative d'appel de Lyon et, d'autre part, renvoyé le jugement de l'affaire devant cette cour.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée le 20 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 novembre 2014 et de remettre à la charge de M. D...les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Le ministre des finances et des comptes publics soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a jugé que la procédure d'imposition était entachée d'irrégularité au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; la proposition de rectification adressée au contribuable n'était pas insuffisamment motivée, et ne faisait que reproduire les motifs de droit et de fait justifiant les redressements sociaux et indiquer les raisons pour lesquelles M. D...doit être regardé comme ayant appréhendé ces revenus distribués, eu égard à sa maîtrise de l'affaire ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a jugé que M. D...n'a pas eu connaissance de la proposition de rectification concernant la société vérifiée ;

- les impositions sont fondées et l'appréhension des distributions par M. D...est démontrée par sa qualité de maître de l'affaire ;

- la SARL Akademic Construction n'a pas justifié des charges déduites de son résultat imposable sur la période contrôlée, s'agissant d'achats de matériaux, de frais de carburant et de dépenses à caractère personnel ; les déclarations de son gérant, contradictoires, n'ont pas été corroborées par la production de pièces probantes ; il n'a pas été établi que ces dépenses auraient été engagées dans l'intérêt de l'entreprise ; M.D..., en sa qualité de gérant et de principal associé, qui en assurait la direction effective et disposait sans contrôle de la signature et des moyens de paiement, avait la parfaite maîtrise de l'affaire et doit être regardé comme ayant appréhendé les revenus distribués résultant de la remise en cause de la déductibilité des charges non justifiées.

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2015, présenté pour M.D..., représenté par Me B..., tendant, à titre principal, au rejet de la requête, et, à titre subsidiaire, à la réduction de ses bases de redressement des années 2008 et 2009 de respectivement 69 818 euros et 22 515 euros.

Il soutient :

- à titre principal que :

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité pour insuffisance de motivation de la proposition de rectification en l'absence de mention des motifs de droit et de fait démontrant le non-respect de l'intérêt de la société et le caractère anormal de sa gestion alors qu'un acte anormal de gestion ne se présume pas ; le tribunal administratif de Grenoble a fait une exacte application des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- l'insuffisance de motivation ne résulte pas du défaut de transmission de la copie de la proposition de rectification adressée à la société vérifiée mais de l'absence d'information dans la proposition de rectification qui lui a été adressée à titre personnel sur les motifs ayant conduit l'administration à remettre en cause la déduction de dépenses au niveau de la société ;

- la société ayant été mise en liquidation, son gérant n'a pas eu communication des pièces de procédure la concernant ; il n'a donc pu présenter ses observations de façon utile en réponse à la proposition de rectification du 16 juillet 2010, peu importe qu'il ait pu avoir ultérieurement communication d'une copie de la proposition de rectification adressée à la société ;

- la proposition de rectification adressée à la SARL est insuffisamment motivée ;

- à titre subsidiaire que :

- les dépenses dont la déduction a été remise en cause étaient justifiées et en cohérence avec l'activité de la société ; elles ne sont pas à l'origine d'avantage en nature au profit du gérant ; les rappels litigieux reviennent à taxer trois fois ces dépenses ;

- aucune motivation ne figure dans la proposition de rectification en ce qui concerne les frais de carburant de nature à justifier l'existence d'un avantage en nature ; l'audition de son donneur d'ordre ne contredit pas le fait que les véhicules mis à disposition du sous-traitant étaient utilisés épisodiquement ; l'attestation de son donneur d'ordre bien que tardive reste opposable ; les frais de carburant nécessaires aux déplacements du personnel sont établis ; leur caractère d'avantage en nature n'est pas établi ;

- aucune motivation ne figure dans la proposition de rectification en ce qui concerne les dépenses à caractère personnel, qu'il s'agisse des loyers, des retraits d'espèce, ou des autres dépenses litigieuses ; il justifie du caractère professionnel de la location des locaux à Barberaz ; les retraits d'espèces étaient destinés à verser aux salariés, l'acompte de leur salaire.

II - Par courriers des 9 octobre 2018, les parties ont été informées du renvoi après cassation, à la cour administrative d'appel de Lyon, de l'affaire qui a été enregistrée sous le n° 18LY03711.

Les parties n'ont pas produit de nouvelles écritures devant la cour.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ayant été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, présidente, rapporteure

- et les conclusions de M. Bertrand Savouré, rapporteur public.

1. La société à responsabilité limitée (SARL) Akademic Construction, créée le 28 février 2008 par M. G... D..., son gérant et associé à 90 %, exerçait une activité de plâtrerie, isolation, cloisons et peinture jusqu'à son placement en liquidation judiciaire, le 2 novembre 2009. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur son premier exercice clos le 30 juin 2009, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a transmis deux propositions de rectification. La première, datée du 16 juillet 2010 et adressée au liquidateur judiciaire de la SARL Akademik Construction, qui en a accusé réception le 20 juillet 2010, porte sur la réintégration au résultat imposable de la société de dépenses regardées comme non engagées dans l'intérêt direct de son exploitation. La seconde proposition de rectification, également datée du 16 juillet 2010, concerne la situation fiscale personnelle de M. D...et indique que les rectifications notifiées à la SARL Akademik Construction ont été regardées comme constitutives de revenus distribués imposables au nom de M.D..., à l'impôt sur le revenu au titre des années 2008 et 2009 sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts. M. D...a contesté les impositions issues de cette procédure devant le tribunal administratif de Grenoble, qui a fait droit à ses demandes par un jugement du 18 novembre 2014 en estimant que la proposition de rectification adressée à M. D...par courrier simple, se référait à une proposition de rectification qui ne lui avait été pas été notifiée personnellement mais seulement au liquidateur de la société en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. La cour administrative d'appel de Lyon, statuant sur recours du ministre des finances et des comptes publics, a, par un arrêt du 3 janvier 2017, annulé ce jugement du tribunal administratif de Grenoble et remis à la charge de M. D...les impositions et pénalités en litige. Par une décision du 3 octobre 2018, le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi présenté par M.D..., a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon, et a renvoyé l'affaire à la cour.

Sur le motif de décharge retenu par le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'administration doit indiquer au contribuable, dans la proposition de rectification, les motifs et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et la catégorie de revenus dans laquelle ils sont opérés, ainsi que les années d'imposition concernées. Hormis le cas où elle se réfère à un document qu'elle joint à la proposition de rectification ou à la réponse aux observations du contribuable, l'administration peut satisfaire à cette obligation en se bornant à se référer aux motifs retenus dans une proposition de rectification, ou une réponse à ses observations, consécutive à un précédent contrôle et qui lui a été régulièrement notifiée, à la condition qu'elle identifie précisément la proposition ou la réponse en cause et que celle-ci soit elle-même suffisamment motivée.

3. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé à M.D..., par lettre recommandée avec accusé de réception, une proposition de rectification datée du 16 juillet 2010 concernant sa situation fiscale personnelle. Ce courrier, présenté au domicile de l'intéressé le 20 juillet 2010, a été retourné au service expéditeur avec la mention " non réclamé - retour à l'envoyeur ". A la suite de cette notification infructueuse, l'administration a toutefois adressé à M.D..., par courrier simple en date du 30 août 2010, la copie de la proposition de rectification concernant M.D..., à laquelle était jointe une copie de la proposition de rectification n° 3924 concernant la société Akademic Construction, notifiée le 20 juillet 2010 au liquidateur judiciaire de la société. M. D...ne conteste pas avoir réceptionné ce nouvel envoi qui comportait l'ensemble des éléments de fait et de droit lui permettant de comprendre les motifs sur lesquels l'administration fiscale s'était fondée pour procéder aux redressements de ses revenus personnels dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement de l'article 111 c du code général des impôts. Dans ces conditions, M. D...auquel avait été communiqué l'ensemble des éléments justifiant les redressements prononcés à son encontre, n'a pas été privé des informations de nature à lui permettre de les discuter utilement, ce qu'il a d'ailleurs fait en adressant, par courrier du 28 septembre 2010, ses observations à l'administration fiscale. Dès lors, le ministre de l'action et des comptes publics, est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a prononcé la décharge de l'imposition litigieuse au motif que la proposition de rectification concernant la situation fiscale de M. D...était insuffisamment motivée au sens des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

4. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D...devant le tribunal administratif et devant la cour.

Sur le bien-fondé des impositions mises à la charge de M.D... :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

5. Il résulte de l'instruction que M. D...a été destinataire, par un courrier simple du 30 août 2010, de la proposition de rectification concernant ses revenus personnels, à laquelle avait été jointe la proposition de rectification de la société Akademic notifiée au liquidateur judiciaire. Par un courrier du 28 septembre 2010, le contribuable a adressé des observations au service. Dès lors, c'est à l'administration fiscale d'établir le bien-fondé des rehaussements en litige.

En ce qui concerne l'imposition sur le fondement de l'article 111 c du code général des impôts des sommes prélevées sur le compte de la SARL Akademik Construction :

6. Aux termes de l'article 54 bis du code général des impôts : " Les contribuables visés à l'article 53 A (...) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel. ". Aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ". Il résulte de ces dispositions que l'administration est réputée apporter la preuve que des distributions occultes ont été appréhendées par la personne qui est, dans la société dont des revenus ont été regardés comme distribués, le maître de l'affaire.

7. Il est constant que les sommes litigieuses, qui correspondaient à des prélèvements effectués sur le compte bancaire de la société Akademik Construction au cours des années 2008 et 2009, n'ayant fait l'objet d'aucune inscription en comptabilité, un procès verbal pour défaut de présentation de comptabilité a été dressé à l'encontre de la société le 15 janvier 2010 entre le 29 février 2008, date du commencement de son activité et le 30 juin 2009. Par suite, l'administration a pu, sans commettre d'erreur de droit, estimer que ces distributions occultes avaient été appréhendées par M.D..., dont elle faisait valoir, sans que cela soit contesté, qu'il était le maître de l'affaire.

8. En premier lieu, dans le cadre de la vérification de comptabilité dont la SARL Akademic Construction a fait l'objet, l'administration fiscale a remis en cause la déductibilité de son résultat imposable d'un ensemble de dépenses dont elle a estimé qu'en l'absence de justificatifs, elles n'avaient pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise et ne se rattachaient pas à une gestion commerciale normale, et que les avantages en nature en résultant, faute d'avoir été comptabilisés explicitement dans les écritures de la société ainsi que l'exige l'article 54 bis du code général des impôts, devaient être regardés comme distribués de manière occulte entre les mains de son gérant et associé, détenteur de 90 % des parts sociales, qui assurait la direction effective de la SARL Akademic Construction, disposait de l'ensemble des moyens de paiement, était le seul détenteur de la signature sur le compte bancaire, et disposait ainsi de la parfaite maîtrise de l'affaire.

9. Pour contester l'imposition entre ses mains des sommes réputées distribuées par la SARL Akademic Construction dont il avait été le gérant, M. D...soutient que les dépenses considérées comme injustifiées par l'administration fiscale, eu égard à leur nature, s'agissant d'achats de matériaux, de frais de carburant, de frais de sous-traitance et de loyers, ainsi que de retraits d'espèces destinés aux versements d'acomptes sur salaires, ou correspondant au solde créditeur de son compte courant d'associé, étaient justifiées par les besoins de l'exploitation et ne sauraient, par suite, ni être regardées comme n'ayant pas été engagées dans l'intérêt de la société ni constitutives d'avantages en nature dont il aurait personnellement bénéficiés, imposables entre ses mains. Toutefois, il résulte de l'instruction que, lors du contrôle, la SARL Akademik Construction n'a présenté aucune comptabilité et que l'administration fiscale a opéré, dans le cadre de la procédure de redressement contradictoire, la reconstitution du chiffre d'affaires à partir des relevés de banque de la société. Les dépenses non appuyées de factures qui n'ont pas été régulièrement comptabilisées dans les écritures de la société ainsi que l'exige l'article 54 bis du code général des impôts, et dont l'intérêt pour les besoins de l'activité n'a pas été démontré, ont été considérées comme ne se rattachant pas à une gestion commerciale normale.

10. En défense, M. D...soutient que, s'agissant des dépenses pour l'achat de matériaux, bien que le donneur d'ordre, un certain AdemD..., fournisse l'essentiel des matériaux nécessaires au chantier, les fournitures directement incorporées à la prestation de sous-traitance sont apportées par la SARL Akademic Construction en qualité de sous-traitante laquelle intégrait ce coût dans la rémunération facturée au donneur d'ordre. M. D...fait, en outre, valoir que les factures d'achats listées par l'administration fiscale portent sur des fournitures dont le détail et les lieux de livraison sont en cohérence avec l'activité et les prestations facturées par la société et ne peuvent être regardées comme des " dépenses personnelles " du gérant de la société. Toutefois si M. D...entend justifier des dépenses de fournitures par la production des copies de la plupart des factures listées par l'administration fiscale dans la proposition de rectification de la société, et se prévaut de ce que ces dépenses sont en cohérence avec l'activité et les prestations facturées par la société, il résulte de l'instruction que la plupart des factures produites ne comportent pas l'indication du chantier concerné et que, lorsque le lieu de livraison est précisé, aucune pièce justificative n'est apportée attestant de ce que ces achats correspondraient à des chantiers sur lesquels la SARL Akademic Construction est intervenue au cours de la période litigieuse. Il n'est pas davantage établi que la société aurait répercuté le coût de ces fournitures dans la rémunération facturée à son donneur d'ordre. Par ailleurs, le ministre fait valoir, sans être contesté, que l'administration fiscale a tenu compte des dépenses correspondant aux achats de matériaux destinés à remplacer ceux qu'elle avait détériorés sur les chantiers. Par suite, l'administration fiscale a pu considérer que la preuve n'était pas apportée que les dépenses litigieuses auraient été engagées dans l'intérêt de la société.

11. S'agissant des dépenses de carburant, M. D...se prévaut d'attestations émanant des salariés de la SARL Akademik Construction et de son donneur d'ordre selon lesquelles la SARL fournissait le carburant à ses employés sur les chantiers et prenait également à sa charge les frais de carburant destinés aux véhicules mis à sa disposition par le donneur d'ordre. Toutefois, ces attestations, établies postérieurement aux opérations de contrôle ne sont pas probantes et ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation portée par l'administration fiscale quant à leur caractère non déductible alors que la contrepartie pour la société entre les chantiers sur lesquels elle intervenait au cours de la période litigieuse et les dépenses de carburant exposées par cette dernière n'est pas établie. Par suite, l'administration fiscale, démontre l'existence, le montant et le caractère occulte des distributions résultant des dépenses de matériaux et de carburant qui n'ont pas été régulièrement comptabilisées dans les écritures de la société ainsi que l'exige l'article 54 bis du code général des impôts, et dont l'intérêt pour les besoins de l'activité de la SARL Akademik Construction n'a pas été démontré, justifiant la remise en cause de leur caractère déductible du revenu imposable de celle-ci.

12. S'agissant des dépenses à caractère personnel, M. D...soutient justifier les frais correspondant à la location de locaux situés 6, rue du Mont Saint Michel à Barberaz, par la nécessité pour la SARL Akademik Construction de disposer d'un local de stockage utilisé pour entreposer de petits matériaux, de l'outillage et autres matériels de chantier et en vue de développer une activité d'achat-revente de matériaux. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que ce local loué à l'association des travailleurs turcs a été utilisé pour les besoins de l'activité de la SARL Akademik Construction durant la période contrôlée. En outre, le bail relatif à cette location ne prévoyait aucune destination précise pour ce local dans lequel l'exercice d'une " activité commerciale, industrielle ou artisanale " était d'ailleurs expressément exclu. Enfin, le ministre fait valoir, sans être contredit, que ce local éloigné du siège social de la société, ne pouvait, de ce fait, être exploité pour stocker les marchandises nécessaires aux chantiers. Le caractère professionnel de cette location n'est, par suite, pas établi.

13. S'agissant des factures de l'EURL Rushiti et de l'entreprise de M. A...F...C..., l'administration fiscale relève qu'elles ne comportent aucune précision sur la nature des travaux effectués pour le compte de la SARL Akademik Construction, et que l'activité de plomberie de l'EURL Rushiti est sans rapport avec celle de la société Akademik Construction. Si M. D...soutient que la SARL Akademic Construction sous-traitait à l'EURL Rushiti la pose de joints dans le cadre d'un marché de travaux sur un de ses chantiers, et recourait aux service de l'entreprise de M. A...pour achever sa prestation de travaux sur le chantier du lycée Monge à Chambéry, ces allégations ne sont pas établies.

14. S'agissant des retraits d'espèces, l'administration fiscale qui a admis les retraits dont le montant correspondait au paiement justifié d'acomptes de salaires au profit du personnel salarié, a écarté les retraits d'espèce dont le montant n'était pas corrélé à celui des acomptes de salaire allégués. Les bulletins de salaires des employés produits par M. D...ne suffisent pas à démontrer que les retraits dont la déduction a été remise en cause auraient été opérés dans l'intérêt de l'exploitation. S'agissant du compte courant d'associé au nom de M.D..., l'administration fiscale fait valoir que celui-ci ne saurait exciper de la balance des comptes pour démontrer l'existence d'un solde créditeur sur son compte courant d'associé autorisant des retraits d'espèces dès lors qu'aucune comptabilité n'a pu être présentée par la société lors du contrôle, la mise en liquidation de la société étant à cet égard sans incidence. Par suite, l'administration fiscale, qui démontre l'existence et le montant de distributions occultes correspondant aux dépenses injustifiées dont l'engagement dans l'intérêt de la SARL Akademik Construction n'est pas démontré, a pu à bon droit les imposer entre les mains de M. D...dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts.

15. En second lieu, M. D...soutient que l'administration, qui n'a pas mis en oeuvre la procédure de désignation des bénéficiaires des revenus réputés distribués prévue par l'article 117 du code général des impôts auprès de la SARL Akademik Construction, n'apporte pas la preuve de son appréhension des sommes correspondantes. Toutefois, il résulte de l'instruction que, pour imposer, entre les mains de M. D...sur le fondement des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts, les distributions occultes réputées distribuées par la SARL Akademik Construction, correspondant aux dépenses de cette société regardées comme engagées dans l'intérêt personnel de son dirigeant, l'administration fiscale s'est fondée sur la parfaite maîtrise de l'affaire de M. D...en sa qualité de gérant et associé, détenteur de 90 % des parts sociales, assurant la direction effective de la SARL, disposant de l'ensemble des moyens de paiement et étant le seul détenteur de la signature sur le compte bancaire. Dès lors, l'administration fiscale, qui n'était pas tenue de recourir à la procédure de désignation des bénéficiaires des revenus distribués prévue à l'article 117 du code général des impôts, apporte la preuve qui lui incombe de l'appréhension des sommes litigieuses par M. D...en sa qualité de maître de l'affaire. Dans ces conditions, M. D...n'est pas fondé à soutenir que les impositions litigieuses en tant qu'elles concernent les distributions résultant de la remise en cause du caractère déductible des dépenses à caractère personnel exposées par la SARL Akademik Construction sont dépourvues de fondement. Par suite, les conclusions M. D...tendant à la décharge ou la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 , en application des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts, doivent être rejetées.

16. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie et des finances est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales auxquelles M. D...a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. D...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble, en date du 18 novembre 2014, est annulé.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et les cotisations sociales auxquelles M. D...a été assujetti au titre des années 2008 et 2009 sont remises à sa charge ainsi que les pénalités correspondantes.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G...D...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018 à laquelle siégeaient :

Mme Fischer-Hirtz, présidente de chambre,

M. Souteyrand, président assesseur,

MmeE..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 janvier 2019.

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N° 18LY03711


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