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22/08/2018 | FRANCE | N°17LY02317

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 22 août 2018, 17LY02317


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision du 4 mai 2015 par laquelle la directrice du centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon a prononcé sa révocation ;

2°) d'enjoindre au centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon de procéder à la reconstitution administrative de sa carrière ;

3°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1506339 du 5 avril 2017, le tribunal admi

nistratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision du 4 mai 2015 par laquelle la directrice du centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon a prononcé sa révocation ;

2°) d'enjoindre au centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon de procéder à la reconstitution administrative de sa carrière ;

3°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1506339 du 5 avril 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 7 juin 2017, 12 janvier, 15 février et 16 février 2018, Mme A..., représentée par Me Bertrand-Hébrard, avocate, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 avril 2017 ;

2°) d'annuler la décision susmentionnée du 4 mai 2015 ;

3°) d'enjoindre au centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon de procéder à la reconstitution administrative de sa carrière jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu que la procédure disciplinaire des fonctionnaires échappait aux dispositions de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'enquête administrative a été menée de manière partiale ;

- elle n'a pas été en mesure de faire valoir ses droits au cours de l'enquête administrative ; elle n'a pas eu connaissance des témoignages recueillis contre elle préalablement à l'entretien du 20 mars 2015 ;

- les garanties relatives à la communication du dossier n'ont pas été respectées, en méconnaissance de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 et de l'article 1er du décret du 7 novembre 1989 ;

- ses observations écrites n'ont pas été portées à la connaissance de l'ensemble des membres du conseil de discipline ; elles n'ont pas été lues en séances ;

- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis ou ne peuvent être regardés comme constitutifs de fautes justifiant une sanction ;

- la sanction est disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2017, et des mémoires complémentaires, enregistrés les 16 février et 29 juin 2018, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon, représenté par Me B..., de la SELARL BLT Droit Public, avocat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de Mme A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires relavant de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Bertrand Hébrard, avocat, pour Mme A..., et celles de Me Bitar, avocat, pour le centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon ;

1. Considérant que Mme C... A..., agent de la fonction publique hospitalière depuis le 4 janvier 1993, titularisée en qualité d'aide soignante le 1er janvier 1994, exerçait ses fonctions au sein du centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon à temps partiel en service de nuit, puis, à compter du mois de septembre 2010, en service de jour ; que, par une décision du 4 mai 2015, prise après avis favorable de la commission administrative paritaire réunie en conseil de discipline le 27 avril 2015, la directrice du centre hospitalier a prononcé à l'encontre de Mme A... la sanction de la révocation à compter du 5 mai 2015 ; que Mme A... relève appel du jugement du 5 avril 2017 du tribunal administratif de Lyon ayant rejeté sa demande d'annulation de cette décision ;

Sur la légalité des décisions des 11 octobre et 10 décembre 2012 :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6, § 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) publiquement (...) par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...) " ;

3. Considérant que, comme en ont jugé à bon droit les premiers juges, la procédure disciplinaire diligentée à l'encontre de Mme A... ne constituant pas une procédure juridictionnelle, cette dernière ne saurait utilement invoquer le non-respect des stipulations précitées de l'article 6, § 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort des pièces du dossier ni que les témoignages recueillis par la direction du centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon dans le cadre de l'enquête administrative aient été uniquement orientés à charge, ni qu'ils aient été sollicités auprès d'agents ayant manifesté une hostilité personnelle envers Mme A... ; qu'il ne ressort pas du procès verbal de la réunion du conseil de discipline qu'il n'aurait pas pris en compte les témoignages en sa faveur ; que, si l'intéressée soutient que le centre hospitalier aurait manqué à son obligation de loyauté envers elle dès lors qu'elle n'a pas eu connaissance des témoignages recueillis contre elle préalablement à l'entretien du 20 mars 2015 et qu'elle n'a pas été mise à même de faire valoir ses droits au cours de l'enquête administrative, le devoir de loyauté de l'employeur public à l'égard de son agent ne saurait avoir pour effet d'exiger la mise en oeuvre du principe du contradictoire au cours de l'enquête administrative, laquelle, préalable à une éventuelle procédure disciplinaire, ne constitue pas un élément de cette procédure ; qu'il suit de là que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige a été prise au terme d'une procédure irrégulière, en méconnaissance des droits de la défense et du principe d'impartialité ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 30 mars 2015, auquel ont été annexés l'ensemble des témoignages recueillis lors de l'enquête administrative, Mme A... a été convoquée devant le conseil de discipline pour le 27 avril 2015 et informée de son droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration de préciser les modalités d'exercice de ce droit ; que la requérante n'est, par suite, pas fondée à soutenir que les garanties relatives à la communication du dossier n'auraient pas été respectées, en méconnaissance de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 et de l'article 1er du décret du 7 novembre 1989 ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que le procès verbal du conseil de discipline réuni le 27 avril 2015, lequel fait foi jusqu'à preuve contraire, mentionne que les observations écrites de Mme A... ont été lues ; que cette dernière n'est, dès lors, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que ses observations écrites n'auraient pas été portées à la connaissance de l'ensemble des membres du conseil de discipline ni qu'elles n'auraient pas été lues en séance ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte des témoignages précis, circonstanciés et concordants recueillis aussi bien le 29 janvier 2015 dans le cadre de l'enquête administrative qu'au cours de l'été 2015 dans le cadre de l'enquête de gendarmerie menée à la suite de la plainte déposée par l'établissement hospitalier contre Mme A..., que ses collègues, qui travaillaient avec elle au moment des faits, ont souligné de manière quasi unanime sa rapidité excessive dans l'administration des repas aux résidents, le fait qu'elle ne respectait pas systématiquement les prescriptions relatives aux textures des repas, pratique susceptible de mettre en danger les personnes, sa précipitation et son irrespect des protocoles en vigueur dans l'accomplissement de la toilette et son manque de rigueur dans l'habillement des résidents ; que plusieurs témoignages évoquent sa brusquerie et son manque de précaution à l'égard de ces derniers et font état de la nécessité de la superviser voire de refaire son travail, souvent jugé " bâclé " ; que ces attestations, qui concernent le service de jour, auquel était affectée l'intéressée depuis 2010 et dans le cadre duquel elle a été amenée à travailler plus souvent seule que dans le service de nuit, où elle exerçait précédemment, témoignent de ce que les manquements reprochés à Mme A... étaient de nature à porter atteinte à la pudeur, à l'intimité et à la dignité des personnes et s'assimilaient à des actes de maltraitance ; que la plupart de ses collègues s'accordent à souligner son insouciance, sa désinvolture voire sa négligence dans l'accomplissement de ses tâches ainsi que son absence de conscience du danger auquel elle exposait les résidents ; que le comportement de Mme A..., perçu comme inhabituel par ses collègues, lesquels ont à plusieurs reprises évoqué un sentiment de malaise face à sa pratique, ne saurait être justifié par la charge de travail incombant à l'équipe de soins ; que les faits qui lui sont reprochés sont établis par les témoignages produits et étaient de nature à justifier une sanction ;

8. Considérant, en sixième et dernier lieu, que, compte tenu du caractère grave et répété de ces agissements, la sanction de la révocation ne présente pas un caractère disproportionné même si l'intéressée, qui exerçait ses fonctions depuis une vingtaine d'années, n'avait fait l'objet d'aucune procédure disciplinaire auparavant ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de la décision contestée du 4 mai 2015, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les frais liés au litige :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon, qui n'est pas partie perdante, la somme que demande Mme A... au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... une somme de 500 euros en application de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera une somme de 500 euros au centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au centre hospitalier de Chazelles-sur-Lyon.

Copie en sera adressée au ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré après l'audience du 3 juillet 2018, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

M. Hervé Drouet, président assesseur,

Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.

Lu en audience publique, le 22 août 2018.

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N° 17LY02317

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY02317
Date de la décision : 22/08/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-02-02 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Caractère disciplinaire d'une mesure. Mesure ne présentant pas ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : BERTRAND HEBRARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-08-22;17ly02317 ?
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