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21/06/2018 | FRANCE | N°16LY01853

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 21 juin 2018, 16LY01853


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Praz-sur-Arly à lui verser la somme de 195 370,48 euros en réparation des préjudices subis du fait de son éviction de l'exploitation d'un snack-bar, lieu-dit " les Varins ".

Par le jugement n° 1303702 du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 30 mai 2016 et un mémoire enregistré le 19 juin 2017, M. D..., repr

senté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Praz-sur-Arly à lui verser la somme de 195 370,48 euros en réparation des préjudices subis du fait de son éviction de l'exploitation d'un snack-bar, lieu-dit " les Varins ".

Par le jugement n° 1303702 du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 30 mai 2016 et un mémoire enregistré le 19 juin 2017, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 mars 2016 ainsi que la décision par laquelle le maire de la commune de Praz-sur-Arly a implicitement rejeté sa demande d'indemnisation ;

2°) de condamner la commune de Praz-sur-Arly à lui verser la somme de 195 370,48 euros au titre de la réparation des préjudices subis du fait de son éviction ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Praz-sur-Arly la somme de 3 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. D... soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, dès lors qu'il n'a pas visé la note en délibéré datée du 25 mars 2016, adressée au greffe par télécopie et lettre recommandée avec accusé de réception ;

- la procédure de mise en concurrence organisée par la commune est entachée de nombreuses irrégularités ;

- le maire a décidé cette mise en concurrence sans justifier d'une délibération du conseil municipal ; le conseil municipal n'aurait pas apprécié la teneur de son offre de la même façon que le maire ; son éviction est liée à l'incompétence du maire contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif ;

- le principe de transparence de la procédure a été triplement méconnu : la commune n'a donné aucune indication sur ses attentes ou le déroulement de la consultation ; elle ne s'est pas conformée aux indications du règlement de la consultation relatives à la durée de la convention d'occupation ; le choix qu'elle a fait ne correspond pas aux critères de sélection des offres requis dans le cahier des charges et la commune n'a apporté aucune motivation pour justifier ce choix ;

- il a droit à être indemnisé : la commune ne saurait se prévaloir de la fermeture administrative de l'établissement en 2008 alors qu'il a fait des efforts pour mettre fin à cette situation ; il avait des chances sérieuses d'être retenu si la procédure avait été conduite régulièrement ;

- la responsabilité extra-contractuelle de la commune peut également être engagée du fait de son éviction irrégulière, puisque c'est elle qui l'avait incité à faire des travaux en 2008 ;

- les agissements fautifs de la commune sont à l'origine d'un manque à gagner (114 000 euros), de frais de présentation de candidature (2 000 euros), du coût du démantèlement des installations existantes (6 528,44 euros), de la perte de son fonds de commerce (40 695,60 euros), d'un trouble commercial (7 668 euros), de divers frais accessoires (7 950 euros) et d'un préjudice moral (10 000 euros).

Par un mémoire en défense enregistré le 22 mai 2018, la commune de Praz-sur-Arly, représentée par la SCP Margall-d'Albenas, avocats, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de M.D... ;

2°) de mettre à sa charge la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune fait valoir que :

- les décisions relatives à l'occupation du domaine public communal, à titre précaire, pour l'exercice d'une activité commerciale relèvent de la compétence du maire ; la procédure suivie a été régulière, le conseil municipal est intervenu pour approuver le choix proposé ;

- la procédure de consultation mise en oeuvre a été transparente, les attentes de la commune étaient détaillées dans les documents communiqués par le requérant ;

- le requérant ne démontre pas que la procédure a été irrégulière ni qu'il avait des chances sérieuses d'emporter le contrat ;

- elle ne l'a pas incité à réaliser des investissements importants ; le requérant n'avait pas de fonds de commerce sur le domaine skiable.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gondouin,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant de M. D... et de Me B... représentant de la commune de Praz-sur-Arly ;

Une note en délibéré présentée pour M. D... a été enregistrée le 6 juin 2018.

1. Considérant que M. D... exerçait une activité de restauration sur un terrain appartenant à la commune de Praz-sur-Arly situé sur le front de neige de la station de ski, lieu-dit " Les Varins ", sur lequel il avait érigé un chalet et une terrasse ; qu'après avoir exercé cette activité plusieurs années, en dernier lieu en vertu d'une convention d'occupation précaire du 12 décembre 2011, M. D... a dû libérer les lieux qu'il occupait et enlever toute installation, équipement ou aménagement réalisé sur le terrain, la commune de Praz-sur-Arly ayant, au terme d'une procédure de mise en concurrence, décidé de conclure une convention d'occupation précaire avec un autre commerçant ; qu'il a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 195 370,48 euros en réparation des préjudices subis ; que M. D... relève appel du jugement du 29 mars 2016 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que si le juge administratif peut être valablement saisi d'une note en délibéré adressée par télécopie dès lors qu'elle est enregistrée avant la date de lecture de la décision, c'est à la condition que son auteur l'authentifie ultérieurement, mais avant la même date, par la production d'un exemplaire dûment signé de cette note ou en apposant, au greffe de la juridiction saisie, sa signature au bas de ce document ; qu'après l'audience publique, qui s'est tenue le 15 mars 2016, M. D... soutient avoir adressé au tribunal administratif de Grenoble une note en délibéré datée du 25 mars 2016 par télécopie et par lettre recommandée avec accusé de réception ; que, toutefois, cette note en délibéré n'a pas été reçue au greffe du tribunal administratif avant le 30 mars 2016 alors que le jugement avait été lu la veille ; que, dès lors, et contrairement à ce que soutient le requérant, les premiers juges n'ont pas entaché d'irrégularité le jugement attaqué en ne visant pas cette note en délibéré ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'un candidat à l'attribution d'un contrat public demande la réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'irrégularité ayant, selon lui, affecté la procédure ayant conduit à son éviction, il appartient au juge, si cette irrégularité est établie, de vérifier qu'il existe un lien direct de causalité entre la faute en résultant et les préjudices dont le candidat demande l'indemnisation ; qu'il s'ensuit que lorsque l'irrégularité ayant affecté la procédure de passation n'a pas été la cause directe de l'éviction du candidat, il n'y a pas de lien direct de causalité entre la faute résultant de l'irrégularité et les préjudices invoqués par le requérant à raison de son éviction ; que sa demande de réparation des préjudices allégués ne peut alors qu'être rejetée ;

4. Considérant que, d'une part, M. D... soutient que le maire de Praz-sur-Arly a décidé de mettre en place une procédure de mise en concurrence sans justifier d'une délibération du conseil municipal ; qu'à supposer même que le conseil municipal n'ait pas délibéré préalablement à la mise en oeuvre de la procédure de mise en concurrence pour l'attribution d'une nouvelle convention d'occupation du domaine public, ce qui ne résulte pas de l'instruction, cette irrégularité n'a pas été la cause directe de l'éviction de la candidature du requérant ;

5. Considérant que, d'autre part, il résulte de l'instruction qu'au cours de l'année 2011 la commune avait organisé une procédure de consultation pour mettre en concurrence les commerçants susceptibles d'être intéressés par l'exploitation du snack-bar sur l'emplacement occupé par M. D..., pour une durée de trois ans ; que la commune a alors mis à la disposition du public un document de consultation élaboré en juin 2011 précisant les critères de sélection des candidats : " la collectivité retiendra l'offre la plus intéressante au regard notamment : du type de structure démontable et/ou mobile fournie par le candidat (30 %), du type de restauration proposée (20 %), de l'expérience et des références du candidat (25 %), du montant de la redevance proposée (25 %) " ; qu'à l'issue de cette procédure, l'offre de M. D... ayant été retenue, une nouvelle convention d'occupation précaire avait été signée le 12 décembre 2011, pour un an seulement, car la commune l'avait informé, par courrier du 17 novembre 2011, qu'une consultation allait être relancée pour les années suivantes ; que M. D... produit une capture d'écran du site de la commune de Praz-sur-Arly qui annonçait, le 21 mars 2012, la relance de la procédure sous l'intitulé " appel à projet pour le snack-bar des Varins " ; qu'il en ressort que la mise en concurrence allait s'opérer selon les mêmes modalités et les mêmes critères que précédemment, la commune ayant toutefois décidé de proposer une durée de location de 5 ans et non plus 3 ans ; que le même document précisait que le cahier des charges était accessible sur le site de la commune ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que le requérant qui savait que la procédure allait être relancée, puisqu'il en avait été personnellement informé par la commune, n'est pas fondé à soutenir que cette dernière n'a donné aucune indication sur ses attentes ou le déroulement de la consultation ; que deux mises en concurrence se sont succédé, l'une en 2011 qui prévoyait une durée de location de trois ans et la seconde en 2012 qui portait cette durée à cinq ans ; qu'il n'est, dès lors, pas davantage fondé à soutenir que la commune ne s'est pas conformée aux indications du règlement de la consultation relatives à la durée de la convention d'occupation ; qu'enfin, il ne résulte pas de l'instruction que le choix fait par la commune ne répond pas aux critères de sélection des offres requis dans le cahier des charges ; qu'en particulier, les photographies produites par le requérant n'établissent pas que l'offre de son concurrent n'était pas conforme aux critères définis par la commune de Praz-sur-Arly dans son cahier des charges ; que M. D... n'est pas fondé à soutenir que la commune a méconnu le principe de transparence dans la procédure de mise en concurrence pour l'attribution de la convention d'occupation du domaine public ;

7. Considérant que le requérant n'établit ni le lien de causalité entre l'irrégularité qu'il allègue tirée de l'incompétence du maire de Praz-sur-Arly, ni l'irrégularité de la procédure de mise en concurrence que la commune a décidé d'organiser pour l'attribution de la convention d'occupation du domaine public ; que sa demande d'indemnisation présentée sur le fondement de son éviction irrégulière ne peut, dès lors, qu'être rejetée ;

8. Considérant, en second lieu, que M. D... soutient qu'en 2008 il a réalisé à la demande de la commune d'importants travaux de modernisation de son installation ; qu'il ne résulte toutefois pas de l'instruction, comme l'ont justement relevé les premiers juges, que ces travaux, faisant suite à la fermeture administrative de son établissement pour atteinte à la sécurité sanitaire par arrêté préfectoral du 8 mars 2008, avaient été demandés par la commune ; que le requérant n'est, dès lors, pas fondé à rechercher la responsabilité de la commune de Praz-sur-Arly au motif qu'elle aurait commis une faute en l'ayant incité à moderniser ses installations, puis en l'ayant évincé et obligé à démanteler ses installations quelques années après ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les frais liés au litige :

10. Considérant que M. D...étant partie perdante dans la présente instance, ses conclusions tendant à ce que soit mise une somme à la charge de la commune de Praz-sur-Arly ne peuvent qu'être rejetées ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à sa charge une somme à verser à la commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Praz-sur-Arly présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D...et à la commune de Praz-sur-Arly.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2018 où siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 juin 2018.

5

N° 16LY01853


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01853
Date de la décision : 21/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-08-01-03 Marchés et contrats administratifs. Règles de procédure contentieuse spéciales. Recevabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCP MARGALL - D'ALBENAS

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-06-21;16ly01853 ?
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