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12/04/2018 | FRANCE | N°17LY01200

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 12 avril 2018, 17LY01200


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1403870 du 31 janvier 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 21 mars 2017, et un mémoire, enregistré le 30 août 2017, présentés pour M. C... A..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugem

ent n° 1403870 du 31 janvier 2017 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de lui accorder la réduction de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1403870 du 31 janvier 2017, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 21 mars 2017, et un mémoire, enregistré le 30 août 2017, présentés pour M. C... A..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1403870 du 31 janvier 2017 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de lui accorder la réduction de l'imposition contestée à hauteur d'une somme de 165 145 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il lui incombait d'établir que son licenciement n'avait pas de cause réelle et sérieuse ;

- en l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, la taxation de l'indemnité transactionnelle, visée par les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, méconnait l'article 80 duodecies du code général des impôts tel qu'il a été interprété par le Conseil constitutionnel et la totalité de cette indemnité transactionnelle aurait dû être exonérée ;

- l'indemnité transactionnelle versée ne présente pas le caractère de rémunération, mais un caractère indemnitaire.

Par un mémoire, enregistré le 28 juillet 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 7 mars 2018, présenté pour la Selarl Jenner et associés, celle-ci déclare intervenir dans l'instance en qualité de liquidateur de M. A....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 62 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision n° 2013-340 QPC du 20 septembre 2013 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public ;

- les observations de Me B..., substituant Me Detroye, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., qui avait été embauché, à compter du 1er octobre 2009, en qualité de directeur général opérationnel de la société Brossette, appartenant alors au groupe Wolseley, a été ensuite, après la cession de cette société au Groupe Point. P, embauché, par contrat du 30 mars 2012, par la société Point. P Développement, en qualité de directeur détaché à la direction générale, rattaché au directeur général adjoint de ladite société, en charge de l'activité sanitaire chauffage, à compter du 1er avril 2012, avec reprise de son ancienneté au 1er octobre 2009. Il a toutefois été licencié par cette société, le 9 mai 2012. Par une transaction du 1er juin 2012, son employeur a notamment accepté de verser à M. A... une indemnité de 575 000 euros. M. A... a été assujetti à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2012 conformément à ses déclarations, qui incluaient une somme correspondant à la part non exonérée de l'indemnité transactionnelle. Par une réclamation du 11 octobre 2013, il a sollicité un dégrèvement partiel de 165 145 euros, au motif que l'indemnité transactionnelle de licenciement devait être totalement exonérée d'impôt sur le revenu. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la réduction de l'imposition contestée à hauteur d'une somme de 165 145 euros.

2. La Selarl Jenner et associés, désignée en qualité de liquidateur de M. A... par un jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg du 12 février 2018 qui a placé M. A... en liquidation judiciaire, a intérêt à intervenir dans la présente instance. Dès lors, son intervention est recevable.

3. Aux termes de l'article 80 duodecies du code général des impôts : " 1. Toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail constitue une rémunération imposable, sous réserve des dispositions suivantes. Ne constituent pas une rémunération imposable : 1° Les indemnités mentionnées aux articles L. 1235-2, L. 1235-3 et L. 1235-11 à L. 1235-13 du code du travail (...) ".

4. Pour l'application et l'interprétation d'une disposition législative, aussi bien les autorités administratives que le juge sont liés par les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel, statuant sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution, assortit la déclaration de conformité à la Constitution de cette disposition.

5. Il résulte de la réserve d'interprétation dont la décision n° 2013-340 QPC du 20 septembre 2013 du Conseil constitutionnel a assorti la déclaration de conformité à la Constitution du 1 de l'article 80 duodecies du code général des impôts que ces dispositions, qui définissent les indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail bénéficiant, en raison de leur nature, d'une exonération totale ou partielle d'impôt sur le revenu, ne sauraient, sans instituer une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi, conduire à ce que le bénéfice de l'exonération varie selon que l'indemnité a été allouée en vertu d'un jugement, d'une sentence arbitrale ou d'une transaction et qu'en particulier, en cas de transaction, il appartient à l'administration et, lorsqu'il est saisi, au juge de l'impôt, de rechercher la qualification à donner aux sommes objet de la transaction.

6. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement. ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à un contribuable qui présente une réclamation dirigée contre une imposition établie d'après les bases indiquées dans la déclaration qu'il a souscrite de démontrer le caractère exagéré des impositions qu'il conteste pour en obtenir la décharge ou la réduction.

7. En premier lieu, selon les termes du contrat de travail conclu le 30 mars 2012 entre la société Point. P Développement et M. A..., ce dernier a été engagé en qualité de directeur détaché à la direction générale de cette société, rattaché à son directeur général adjoint en charge de l'activité sanitaire chauffage. Il résulte du descriptif des principales fonctions de M. A..., figurant à l'annexe remise à ce dernier au jour de signature du contrat, qu'il lui appartenait de participer à la mise en oeuvre de la politique du groupe Point. P définie par la direction générale et, en particulier, de veiller à la bonne intégration de la société Brossette au sein des activités du groupe par un rôle d'appui et de conseil à l'équipe de direction. Il en résulte également que sa mission était " prévue pour une période de 6 à 9 mois maximum, pendant laquelle les parties définiront ensemble les nouvelles responsabilités qui seront confiées par la suite ". Ainsi, M. A..., engagé dans un emploi rattaché à la direction générale de la société Point. P Développement, avait accepté d'effectuer, d'une manière temporaire, une mission d'appui et de conseil à l'équipe de direction de l'entreprise Brossette, dont il ne faisait plus partie, avant de se voir confier d'autres responsabilités au sein de la société Point. P Développement. Si des articles publiés sur des sites spécialisés ont évoqué, au début du mois d'avril 2012, le remplacement de M. A... à son poste de directeur général de la société Brossette et son départ de cette société après une période d'accompagnement, se bornant ainsi à mentionner des informations conformes à ce que prévoyaient le contrat de travail et la lettre de mission de M. A..., aucun de ces articles n'évoquait une rupture future du contrat liant l'intéressé à son employeur, la société Point. P Développement. Le requérant ne peut, dès lors, se prévaloir de ces articles pour soutenir que, dès cette période, son nouvel employeur avait envisagé son licenciement. Ledit employeur était, par suite, fondé à faire grief à M. A..., pour justifier son licenciement, ainsi que le mentionne la transaction signée par ce dernier, d'avoir répandu autour de lui la nouvelle qu'il serait de toute façon prochainement licencié.

8. En second lieu, il résulte également de la transaction conclue le 1er juin 2012 entre la société Point. P Développement et M. A..., qu'il a été fait grief à ce dernier d'avoir manifesté à plusieurs reprises son désaccord avec la stratégie arrêtée dans le cadre de l'intégration de la société Brossette dans le groupe Point. P et d'avoir ainsi critiqué ouvertement les options retenues par le groupe, en particulier lors de la préparation d'une réunion du 24 avril 2012 au cours de laquelle ces sujets avaient donné lieu à de nouveaux échanges houleux. Ladite transaction mentionne également que, loin de prendre en compte les observations, M. A... a multiplié les points de désaccords, lesquels s'étaient progressivement étendus à tous les domaines du fonctionnement de la société. Les attestations produites par M. A..., par lesquelles d'autres salariés de l'entreprise Brossette affirment n'avoir pas constaté de telles critiques de la part de M. A..., ne suffisent pas à établir que celles-ci n'auraient pas été émises, alors, au demeurant, qu'ainsi qu'il a été dit, ce grief est mentionné dans la transaction signée par le requérant. Eu égard au rôle confié à M. A... par son employeur, telles qu'il résulte de son contrat de travail et de sa lettre de mission, de " participer à la mise en oeuvre de la politique du groupe Point. P définie par la direction générale ", et compte tenu de la mésentente profonde entre M. A..., cadre exerçant dans l'entreprise des fonctions importantes, et sa direction sur les méthodes de gestion et la politique générale de l'entreprise, le licenciement de M. A... doit être regardé comme survenu pour une cause réelle et sérieuse au sens des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'indemnité en litige, que son employeur lui a versée en exécution du protocole transactionnel du 1e juin 2012 conclu à la suite de son licenciement pour cause réelle et sérieuse, devait être exonérée de l'impôt sur le revenu, en application des dispositions du 1° du 1. de l'article 80 duodecies du code général des impôts.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de la Selarl Jenner et associés est admise.

Article 2 : La requête de M. A... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à la Selarl Jenner et associés et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2018 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 avril 2018.

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N° 17LY01200


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17LY01200
Date de la décision : 12/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme BOURION
Avocat(s) : DETROYE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-04-12;17ly01200 ?
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