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22/03/2018 | FRANCE | N°17LY01152

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 22 mars 2018, 17LY01152


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2016 du préfet de la Côte-d'Or portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et désignation du pays de renvoi.

Par un jugement n° 1603475 du 16 février 2017, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 mars 2017, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annu

ler ce jugement et cet arrêté ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2016 du préfet de la Côte-d'Or portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et désignation du pays de renvoi.

Par un jugement n° 1603475 du 16 février 2017, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 mars 2017, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé s'agissant de la réponse au moyen, fondé, tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

- le préfet a commis une erreur de droit ;

- sa situation justifiait sa régularisation exceptionnelle.

Par un mémoire enregistré le 22 février 2018, le préfet de la Côte-d'Or conclut, d'une part, à ce que la cour constate qu'il n'y a plus lieu à statuer sur la requête, ayant pris à l'encontre de M. B...une nouvelle mesure d'éloignement le 4 janvier 2018 exécutée par retour forcé le 12 février 2018 et, d'autre part, au rejet des conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par une décision du 4 avril 2017, M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par une lettre du 2 février 2018, la cour a, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, informé les parties qu'elle envisageait de relever d'office l'irrégularité du jugement attaqué, le tribunal administratif ayant méconnu son office en procédant à une substitution de motif qui n'était pas sollicitée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Michel ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant pakistanais, a déclaré être entré en France au mois de décembre 2013 ; qu'il a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance du département de la Côte-d'Or par un jugement du tribunal pour enfants de Dijon du 13 mars 2014 ; qu'il relève appel du jugement du 16 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2016 du préfet de la Côte-d'Or portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désignation du pays de renvoi ;

2. Considérant que, contrairement à ce que soutient le préfet de la Côte-d'Or, la circonstance que M. B... a quitté le territoire français le 12 février 2018, en exécution d'un arrêté du 4 janvier 2018, ne rend pas sans objet la présente requête dirigée contre le jugement par lequel le tribunal administratif a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2016, portant notamment refus de séjour ;

3. Considérant que si l'administration peut faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision, il n'appartient pas au juge, en l'absence d'une demande en ce sens de l'administration, de procéder d'office à une substitution de motifs, qui n'est pas d'ordre public ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Côte-d'Or a refusé de délivrer à M. B...une carte de séjour temporaire sur le fondement de ces dispositions aux motifs qu'il ne justifiait pas suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, qu'il avait gardé des contacts avec sa mère qui réside au Pakistan et que des mentions le concernant sont contenues dans le fichier de traitement d'antécédents judicaires ; que, par le jugement attaqué, le tribunal a substitué à ces motifs, sans que le préfet de la Côte-d'Or l'ait sollicité, un motif tiré de ce que l'intéressé était âgé de plus de dix-neuf ans et ne pouvait plus bénéficier du titre de séjour de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les premiers juges, en procédant à une substitution de motif qui n'était pas sollicitée, ont méconnu leur office ; qu'il incombe à la cour, même d'office, de censurer une telle irrégularité ; que, par suite, le jugement attaqué, au surplus insuffisamment motivé s'agissant de la réponse au moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être annulé ;

6. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal ;

7. Considérant, en premier lieu, que par un arrêté du 26 juillet 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet de la Côte-d'Or a donné à M. Serge Bideau, secrétaire général de la préfecture, signataire de l'arrêté contesté, délégation à l'effet de signer tous arrêtés relevant des attributions de l'Etat dans le département ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été signé par une autorité incompétente doit être écarté comme manquant en fait ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français dont le préfet de la Côte-d'Or a assorti le refus de titre de séjour, sur le fondement des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour qui, notamment, reproduit les données personnelles concernant M. B...inscrites dans le fichier de traitement d'antécédents judiciaires et est suffisamment motivée en droit et en fait ; que si le requérant fait grief au préfet de ne pas avoir joint à son arrêté l'avis favorable de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française, il ressort en tout état de cause des termes mêmes de cet arrêté que le préfet ne s'est pas fondé sur cet avis pour apprécier son intégration dans la société française ;

9. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., né le 27 avril 1997, a été scolarisé à compter de la rentrée scolaire 2014-2015 en classe d'accueil pour élèves normalement scolarisés antérieurement (CLA) puis, à compter du 1er septembre 2015, en 1ère année de certificat d'aptitude professionnelle de carreleur mosaïste ; qu'ainsi il ne remplissait pas la condition de formation prévue à l'article L. 313-15 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par ailleurs, la structure d'accueil relève dans son avis qu'il est resté en contact permanent avec sa mère ; que, dès lors, le préfet n'a commis ni erreur de droit ni erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant, en quatrième lieu, que si M. B...fait valoir qu'il a noué une relation avec une jeune femme et qu'il est inséré dans la société française, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à la brièveté de son séjour en France et de cette relation amoureuse, que le préfet de la Côte-d'Or aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris son arrêté ; que, par suite, le préfet, en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en assortissant ce refus d'une mesure d'éloignement n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant, en dernier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 9 et 10, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant d'user de son pouvoir de régularisation, alors même que M. B...souffre de troubles neuropsychiques ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2016 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des frais liés au litige doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1603475 du tribunal administratif de Dijon du 16 février 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Dijon et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2018, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président assesseur,

Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique le 22 mars 2018.

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N° 17LY01152


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Moyens - Moyens d'ordre public à soulever d'office.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : LUKEC

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 22/03/2018
Date de l'import : 10/04/2018

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17LY01152
Numéro NOR : CETATEXT000036771549 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-03-22;17ly01152 ?
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