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18/10/2016 | FRANCE | N°15LY03767

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2016, 15LY03767


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 19 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire et de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de

l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 19 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire et de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Par un jugement n° 1502872 du 17 septembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 30 novembre 2015, M. A...B..., représenté par Me Bidault, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1502872 du 17 septembre 2015 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions du 19 décembre 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de son conseil une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- son état de santé justifie que lui soit délivré un titre de séjour ;

- le préfet ne pouvait s'écarter de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé de la santé en se fondant sur des articles de presse non vérifiés ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4 al. 10 du CESEDA en raison de l'erreur manifeste d'appréciation du fait de l'absence de prise en charge dans son pays d'origine ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité entachant le refus de titre de séjour ;

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 octobre 2015.

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2016, présenté pour le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié relatif au séjour et au travail des personnes ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Deliancourt a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant tunisien né le 4 décembre 1968, a déposé le 16 janvier 2014 une demande de titre de séjour auprès des services de la préfecture du Rhône sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en sa qualité d'étranger malade ; que, dans son avis du 20 février 2014, le médecin de l'agence régionale de santé a considéré que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale qui ne pouvait lui être assurée dans son pays d'origine et dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, par décision du 19 décembre 2014, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a prescrit l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office ; que, par le jugement lu le 17 septembre 2015 dont M. Boughmanirelève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 juin 1988 en matière de séjour et de travail : "Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent accord, dans les conditions prévues par sa législation" ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...)" ; qu'il appartient au médecin de l'agence régionale de santé de donner seulement au préfet, tout en respectant le secret médical, les éléments relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger intéressé et à la nature des traitements qu'il doit suivre, nécessaires pour éclairer la décision que doit prendre le préfet à qui il appartient d'apprécier lui-même la situation de l'étranger après avoir procédé à l'examen de l'ensemble de la situation de l'intéressé ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...souffre des séquelles d'une poliomyélite contractée dans l'enfance, dont les complications orthopédiques ont nécessité de multiples interventions chirurgicales, en Tunisie d'abord, puis en France les 31 mars 2011 et 21 juin 2012 ; que le préfet du Rhône, qui a considéré qu'un traitement approprié existait en Tunisie en se fondant sur différentes documentations, dont des articles de presse générale et spécialisée, a produit devant le tribunal comme devant la cour des éléments démontrant l'existence d'une prise en charge des séquelles de cette pathologie, des actes de kinésithérapie dont certains remboursés par le système d'assurance-maladie, ainsi que les types d'appareillage disponibles en Tunisie ; que la seule complexité de l'appareillage nécessaire pour M. B...ne permet pas d'établir qu'il ne pourrait pas être pris en charge dans ce pays, la circonstance que son coût élevé rendrait cette prise en charge ineffective ne pouvant utilement être invoquée dès lors qu'il n'est pas sérieusement contesté que ce type d'appareillage y est disponible ; que, dans ces conditions, ni le certificat médical du 18 février 2015 du docteur Long détaillant les protocoles de soin en matière de chirurgie, kinésithérapie et appareillage, ni les avis des médecins produits par le requérant, qui ne comportent aucune justification, ne permettent de remettre en cause l'appréciation, contraire à celle du médecin de l'agence régionale de santé, portée par le préfet sur la situation de M. B...au regard des dispositions précitées du 11° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant que M.B..., qui soutient être entré sur le territoire national le 24 avril 2010 après avoir vécu au moins jusqu'à l'âge de quarante-deux ans dans son pays d'origine où résident ses frères et soeurs, est célibataire, sans charge de famille et n'apporte aucun élément susceptible de démontrer que, ainsi qu'il l'affirme, il disposerait d'une vie privée et familiale ou de liens en France auxquels la décision litigieuse aurait porté une atteinte excessive ; qu'il n'est, dans ces conditions, fondé à soutenir ni que cette décision a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ou des dispositions de l'article L.313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni qu'elle est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui a été dit aux points précédents que M. B... n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, de l'illégalité de la décision rejetant sa demande de titre de séjour ;

6. Considérant, d'autre part, que, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 4, les soins et traitements nécessités par l'état de santé de M. B...sont disponibles en Tunisie, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire a été prise en violation de l'article L.511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux termes duquel : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé ; / (...) " ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. B...n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi, de l'illégalité de la décision rejetant sa demande de titre de séjour et de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que sa requête susvisée, en ce comprises les conclusions à fin de remboursement des frais exposés non compris dans les dépens, doit, par suite, être rejetée ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à Me Bidault et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- M. Drouet, président assesseur,

- M. Deliancourt, rapporteur.

Lu en audience publique le 18 octobre 2016.

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N° 15LY03767


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03767
Date de la décision : 18/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Samuel DELIANCOURT
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : BIDAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-10-18;15ly03767 ?
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