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27/08/2015 | FRANCE | N°14LY03801

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 27 août 2015, 14LY03801


Vu la procédure suivante :

La commune de Mâcon a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la société Longepierre à lui verser la somme de 55 888,46 euros, assortie des intérêts capitalisés à compter de la requête et la société Guérin à lui verser la somme de 16 857 euros, assortie des intérêts capitalisés à compter du 26 janvier 2011 et de mettre à la charge de chacune des sociétés la somme de 2 000 euros.

Par le jugement n° 1302035 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Dijon a condamné la SARL Longepierre à verser à la commune d

e Mâcon la somme de 46 497 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 a...

Vu la procédure suivante :

La commune de Mâcon a demandé au tribunal administratif de Dijon de condamner la société Longepierre à lui verser la somme de 55 888,46 euros, assortie des intérêts capitalisés à compter de la requête et la société Guérin à lui verser la somme de 16 857 euros, assortie des intérêts capitalisés à compter du 26 janvier 2011 et de mettre à la charge de chacune des sociétés la somme de 2 000 euros.

Par le jugement n° 1302035 du 2 octobre 2014, le tribunal administratif de Dijon a condamné la SARL Longepierre à verser à la commune de Mâcon la somme de 46 497 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 août 2013, ces intérêts étant capitalisés au 6 août 2014 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts, a condamné la société Guérin à verser à la commune la somme de 750 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 janvier 2011, ces intérêts étant capitalisés au 11 janvier 2012 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts, a mis les sommes de 8 400 euros et de 1 600 euros à la charge respectivement de la SARL Longepierre et de la société Guérin au titre des frais d'expertise, ainsi que la somme de 500 euros à la charge de chacune de ces sociétés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une requête enregistrée le 8 décembre 2014, la SARL Entreprise Longepierre et la SELARL AJ Partenaires, en qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Entreprise Longepierre, représentées par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 2 octobre 2014 ;

2°) de rejeter l'intégralité des demandes indemnitaires présentées par la commune de Mâcon ;

3°) de mettre à la charge de la commune la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les sociétés soutiennent que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé s'agissant du montant des frais d'expertise imputé à l'entreprise appelante ;

- la demande de la commune de Mâcon ne pouvait qu'être rejetée sur le fondement de la garantie de parfait achèvement, la réception ayant été prononcée avec date d'effet au 7 septembre 2005 et les désordres relevant des travaux effectués dans le cadre du lot n° 12 n'ayant pas été notifiés dans l'année ;

- les désordres sont apparus à la suite des fautes commises par d'autres intervenants sur le chantier, le maître d'oeuvre n'a pas donné des consignes aux entreprises pour éviter toute circulation prématurée sur le carrelage qui venait d'être posé, le tribunal administratif ne pouvait donc statuer exclusivement sur le fondement de la garantie de parfait achèvement ;

- les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 33 713,33 euros étant en majeure partie liés aux investigations relatives aux infiltrations dans le bâtiment, il est inéquitable de mettre à la charge de la société appelante 25 % de ces frais.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2015, la commune de Mâcon conclut au rejet de la requête, au cas où le jugement serait annulé au rejet de la requête au fond, et à ce que la SARL Entreprise Longepierre et son administrateur judiciaire soient condamnés à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune fait valoir que :

- le jugement est suffisamment motivé s'agissant de la charge définitive des frais d'expertise ;

- le principe de la garantie de parfait achèvement ne saurait être contesté puisque le 24 juillet 2006 le maître d'ouvrage délégué a mis en demeure l'entreprise Longepierre de remédier au sinistre ;

- la SARL Entreprise Longepierre n'apporte pas la preuve des fautes qu'elle impute aux autres entreprises et au maître d'oeuvre ni aucun élément à l'appui de sa contestation du montant des sommes correspondant aux travaux de réfection.

Par un mémoire en réplique enregistré le 12 mai 2015, la SARL Entreprise Longepierre et la SELARL AJ Partenaires, en qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Entreprise Longepierre concluent aux mêmes fins que précédemment.

Les sociétés soutiennent en outre que :

- l'expertise était inutilisable quant à la partie concernant les carreaux sonnant creux et le jugement attaqué ne pouvait donc se fonder sur le rapport d'expertise ;

- la commune n'est pas fondée à demander l'application de la garantie de parfait achèvement puisque la différence de sonorité de certains carreaux est tolérée par le Document Technique Unifié ;

- en outre, la réserve du 24 juillet 2006 n'établit ni l'existence du désordre, ni son imputation ;

- le DTU précité précise le temps d'interdiction de circulation imposé pendant le délai de mise en service du carrelage scellé, les désordres sont apparus à la suite des fautes commises par les autres intervenants ;

- il ne peut être laissé 25 % des frais d'expertise à la charge de la SARL Entreprise Longepierre puisque ces frais ne correspondent pas à des mesures exécutées personnellement par l'expert.

Par ordonnance du 20 mai 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 11 juin 2015.

Un mémoire produit pour la commune de Mâcon a été enregistré le 10 juin 2015 et n'a pas été communiqué.

Par ordonnance du 11 juin 2015, la clôture de l'instruction a été reportée au 18 juin suivant.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gondouin,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- et les observations de MeC..., représentant la SARL Entreprise Longepierre, et la SELARL AJ Partenaires, en qualité de l'administration judiciaire de la SARL Entreprise Longepierre et de MeB..., représentant la commune de Mâcon.

1. Considérant qu'en 2004 la commune de Mâcon a fait réhabiliter une ancienne galerie commerciale et construire un complexe sportif ; qu'elle a délégué la maîtrise d'ouvrage à la société d'économie mixte d'aménagement (SEMA) Mâconnais Val-de-Saône Bourgogne du Sud et confié la maîtrise d'oeuvre à un groupement constitué de l'atelier d'architecture J.-L. Godivier et du BET Euclid Ingénierie ; que le lot n° 12 " revêtements de sols durs " a été attribué à la SARL Entreprise Longepierre et le lot n° 14 " eau chaude solaire " à l'entreprise Guérin ; que la réception des travaux a été prononcée le 2 novembre 2005 avec effet au 7 septembre 2005 ; qu'à la suite de l'apparition de désordres consistant en des défauts de pose du carrelage et de nombreuses infiltrations, notamment dans la salle d'escrime, la commune a sollicité une expertise ; que le tribunal administratif de Dijon, par ordonnance du 30 octobre 2006, a désigné un expert dont le rapport a été remis le 27 juillet 2010 ; que, par le jugement dont la SARL Entreprise Longepierre relève appel, le tribunal administratif de Dijon a condamné cette société à verser à la commune de Mâcon la somme de 46 497 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 6 août 2013, ces intérêts étant capitalisés au 6 août 2014 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date pour produire eux-mêmes intérêts et la somme de 8 400 euros au titre des frais d'expertise ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que les frais d'expertise ont été taxés et liquidés à la somme de 33 713,33 euros par ordonnance du président du président du tribunal administratif de Dijon du 30 octobre 2006 ; que pour laisser à la charge définitive de la SARL Entreprise Longepierre la somme de 8 400 euros, soit 25 % du montant total des frais d'expertise, à celle de l'entreprise Guérin la somme de 1 600 euros et le reste à celle de la commune, le tribunal administratif a considéré que " l'expertise a porté, à la demande de la commune, sur l'ensemble des désordres affectant les travaux de réhabilitation d'une ancienne galerie commerciale et de construction d'un complexe sportif ; qu'une partie de ces désordres n'est pas imputable aux entreprises Longepierre ou Guérin, mais à d'autres entreprises ; que la commune de Mâcon reconnaît, en se référant sur ce point au rapport d'expertise, qu'une majeure partie des investigations de l'expert a porté sur les problèmes d'infiltrations ; que la société Guérin n 'est concernée que par une seule infiltration, qui s'est produite dans la salle d'escrime " ; que ce faisant, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le tribunal administratif a suffisamment motivé son jugement s'agissant de la répartition de ces frais entre la commune de Mâcon et les deux entreprises ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de ce dernier doit être écarté ;

Sur la régularité de l'expertise :

3. Considérant que la SARL Entreprise Longepierre n'a pas contesté devant les premiers juges la régularité des opérations d'expertise auxquelles elle a été régulièrement convoquée ; qu'elle n'est, dès lors, pas recevable à invoquer pour la première fois en appel la circonstance, au demeurant non établie, que l'expert n'aurait pas correctement accompli sa mission pour soutenir que le jugement du 2 octobre 2014 aurait été rendu à la suite d'une expertise irrégulière ;

Sur le fondement de la responsabilité de la SARL Entreprise Longepierre :

4. Considérant que la garantie de parfait achèvement s'étend à la reprise d'une part des désordres ayant fait l'objet de réserves dans le procès-verbal de réception, d'autre part de ceux qui apparaissent et sont signalés dans l'année suivant la date de réception ;

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que par une lettre recommandée avec accusé de réception datée du 24 juillet 2006, moins d'un an après la date d'effet de la réception des travaux, le maître d'ouvrage délégué a rappelé à la SARL Entreprise Longepierre que des réserves avaient été confirmées le 8 décembre 2005 " en raison de la persistance de malfaçons nécessitant la réalisation de travaux supplémentaires au titre de l'obligation de parfait achèvement et consistant " en particulier " en la vérification du scellement des carreaux situés dans le hall d'accueil et la circulation centrale, et aux réparations nécessaires des carreaux cassés " ; que par le même courrier le maître d'ouvrage délégué constatait que les travaux destinés à rendre l'ouvrage conforme aux prévisions du marché n'ont pas été réalisés et mettait en demeure l'entreprise de remédier aux dysfonctionnements réservés dans le délai d'un mois ; que, par suite, la société Longepierre n'est pas fondée à soutenir qu'elle serait déchargée de son obligation de parfait achèvement faute de mise en demeure régulière ;

6. Considérant, d'autre part, que si les requérantes soutiennent que selon le DTU applicable en matière de carreaux scellés, " sur l'ensemble de l'ouvrage carrelé les éléments de revêtements doivent sonner de façon uniforme. Quelques éléments de revêtements peuvent sonner différemment ", il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, que plus du tiers des carreaux que la SARL Entreprise Longepierre a posés " sonnent le creux " ce qui atteste d'une non-adhérence partielle ou totale du carreau à son mortier de pose, laquelle induit une fragilisation du carreau sur la partie non adhérente de sa surface ; que si les sociétés requérantes invoquent également le DTU qui précise le temps d'interdiction de circulation imposé pendant le délai de mise en service du carrelage scellé, elles n'apportent pas la preuve que les autres entreprises intervenant sur le chantier, le maître d'ouvrage délégué ou le maître d'oeuvre ont commis des fautes à l'origine des désordres affectant le carrelage ;

7. Considérant, enfin, qu'en l'absence de tout justificatif et de toute contestation argumentée, les sociétés requérantes ne contestent pas utilement le montant de l'indemnisation de la commune de Mâcon arrêté par le jugement en principal à la somme de 46 497 euros ;

Sur les dépens :

8. Considérant que, comme il a été précédemment dit, les frais d'expertise ont été taxés et liquidés à la somme de 33 713,33 euros : qu'en mettant à la charge de la SARL Entreprise Longepierre la somme de 8 400 euros, soit 25 % du montant total des frais d'expertise, à celle de l'entreprise Guérin la somme de 1 600 euros et le reste à celle de la commune, le jugement attaqué n'a pas procédé, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, à une répartition inéquitable des dépens au détriment de la société Longepierre ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Entreprise Longepierre et la SELARL AJ Partenaires, en qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Entreprise Longepierre, ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a condamné la SARL Longepierre à verser à la commune de Mâcon la somme de 46 497 euros et a mis la somme de 8 400 euros à sa charge au titre des frais d'expertise ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Mâcon qui n'est pas partie perdante dans la présente instance quelle que somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Entreprise Longepierre et la SELARL AJ Partenaires, en qualité d'administrateur judiciaire de la SARL Entreprise Longepierre, quelle que somme que ce soit à verser à la commune de Mâcon sur le fondement de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Entreprise Longepierre et de la SELARL AJ Partenaires, en qualité de l'administration judiciaire de la SARL Entreprise Longepierre est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Mâcon présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Entreprise Longepierre, à la SELARL AJ Partenaires, en qualité de l'administration judiciaire de la SARL Entreprise Longepierre et à la commune de Mâcon.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2015 où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

- Mme Gondouin, rapporteur.

Lu en audience publique, le 27 août 2015.

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N° 14LY03801


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03801
Date de la décision : 27/08/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-02 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité contractuelle.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SELARL STRAT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-08-27;14ly03801 ?
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