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30/06/2015 | FRANCE | N°14LY00654

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 30 juin 2015, 14LY00654


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2010 pour la part correspondant aux revenus qu'il a perçus en contrepartie de temps additionnels accomplis.

Par un jugement n° 1205748 du 14 janvier 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 février 2014, le 1er août 2014 e

t le 22 mai 2015, M. B...C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 et 2010 pour la part correspondant aux revenus qu'il a perçus en contrepartie de temps additionnels accomplis.

Par un jugement n° 1205748 du 14 janvier 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 27 février 2014, le 1er août 2014 et le 22 mai 2015, M. B...C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 14 janvier 2014 ;

2°) de le décharger de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, le tribunal ayant procédé d'office à une substitution de motifs, lequel n'a jamais été invoqué par l'administration fiscale ;

- les dispositions de la loi n° 2007-1223 du 21 aout 2007 n'ont pas entendu écarter les praticiens hospitaliers du dispositif d'exonération fiscale des heures supplémentaires ;

- le décret du 4 octobre 2007 ne pouvait restreindre le champ d'application de l'exonération ainsi que l'a jugé le tribunal ;

- il justifie, par la production d'une nouvelle attestation, du nombre d'heures qu'il a effectuées et des rémunérations correspondantes ;

- que l'administration ne saurait exiger d'un contribuable qu'il produise les attestations prévues par l'article 2 du décret du 4 octobre 2007 qui impose à l'employeur la tenue de ces attestations ;

- que les dispositions de l'article 2 du décret du 4 octobre 2007 ne sont pas adaptées aux praticiens hospitaliers.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 juin 2014 et le 17 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que les documents produits par M. C..., qui ne permettent pas de connaitre la comptabilisation exacte du temps de travail additionnel accompli et rémunéré, ne répondent pas aux exigences de l'article 2 du décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, et notamment la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ;

- la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ;

- le décret n° 2002-598 du 25 avril 2002 relatif aux indemnités horaires pour travaux supplémentaires ;

- le décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007 portant application aux agents de droit public de l'article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ;

- l'arrêté du 30 avril 2003 relatif à l'organisation et à l'indemnisation de la continuité de soins et de la permanence pharmaceutique dans les établissements publics de santé et dans les établissements publics d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que M. C...exerce la profession de praticien hospitalier à temps plein au centre hospitalier du Forez à Montbrison ; qu'il a effectué des heures de temps de travail additionnel au sein de ce centre hospitalier au cours des années 2008 et 2010 ; qu'il a été imposé à l'impôt sur le revenu au titre de ces années conformément à ses déclarations ; que, par une réclamation en date du 26 décembre 2011, il a demandé, au titre de ces deux années, la réduction de son imposition sur le revenu à raison de l'exonération prévue au 5° du I de l'article 81 quater du code général des impôts, concernant les heures supplémentaires ; que le tribunal administratif de Lyon a, le 14 janvier 2014, rejeté la demande de M. C...au motif que si l'intéressé entrait bien dans le champ d'application des dispositions du 5° du I de l'article 81 quater du code général des impôts, il ne produisait que deux attestations qui n'indiquent que le montant net des rémunérations versées au titre des temps de travail additionnel sans préciser le nombre d'heures effectuées à ce titre, contrairement aux exigences posées par l'article 2 du décret du 4 octobre 2007, ce qui ferait obstacle à la comptabilisation exacte du temps de travail additionnel accompli et rémunéré ; que M. C...relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rejet de sa réclamation préalable le 27 juin 2012, que pour refuser de faire droit à la demande de M.C..., l'administration fiscale s'est uniquement fondée sur le motif tiré de ce que la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 aurait exclu les praticiens hospitaliers du dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires ; que, ni dans cette décision, ni dans ses mémoires en défense produits devant le Tribunal, l'administration fiscale, qui avait indiqué dans son premier mémoire en défense que le litige portait sur la défiscalisation de 2 847,23 euros net fiscal pour l'année 2008 et 4 871,42 euros net fiscal pour l'année 2010 perçus au titre du temps de travail additionnel, n'a fait valoir d'autres motifs pouvant justifier que la demande de M. C...soit rejetée ; que le tribunal administratif de Lyon, après avoir jugé que les indemnités forfaitaires pour travail additionnel qu'a versées le centre hospitalier du Forez à M. C...constituaient des éléments de rémunération relevant de l'exonération prévue par l'article 81 quater du code général des impôts, a toutefois rejeté la demande de l'intéressé au motif, différent de celui invoqué par l'administration, et alors même que ce n'était pas en litige, tiré de ce que M. C...ne justifiait pas du nombre d'heures concernées par le dispositif en méconnaissance de l'article 2 du décret du 4 octobre 2007 susvisé ; qu'en statuant ainsi, le tribunal a procédé à une substitution de motifs sans y avoir été invité par l'administration ; que, par suite, le jugement attaqué est, pour ce motif, entaché d'irrégularité, et doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Lyon ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

4. Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article 81 quater du code général des impôts, en vigueur en 2010 : " I.- Sont exonérés de l'impôt sur le revenu : (...) / 5° Les éléments de rémunération versés aux agents publics titulaires ou non titulaires au titre, selon des modalités prévues par décret, des heures supplémentaires qu'ils réalisent ou du temps de travail additionnel effectif (...) " ; que, d'autre part, aux termes de l'article R. 6152-23 du code de la santé publique : " Les praticiens hospitaliers à temps plein perçoivent après service fait : 1° Des émoluments mensuels variant selon l'échelon des intéressés (...). / 2° des indemnités et allocations dont la liste est fixée par décret. " ; qu'aux termes de l'article D. 6152-23-1 du même code, applicable aux praticiens hospitaliers à temps plein : " Les indemnités et allocations mentionnées au 2° de l'article R. 6152-23 sont : / 1° Des indemnités de participation à la permanence des soins ou de réalisation de périodes de travail au-delà des obligations de service hebdomadaires : / (...) b) Des indemnités forfaitaires pour tout temps de travail additionnel accompli, sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service hebdomadaires (...)./ Les indemnités mentionnées aux deux alinéas précédents sont versées lorsque, selon le choix du praticien, le temps additionnel accompli, les astreintes et les déplacements ne font pas l'objet d'une récupération." ;

5. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que l'exonération de l'impôt sur le revenu s'appliquait à l'ensemble des agents publics titulaires ou non titulaires ; que, les praticiens hospitaliers à temps plein ou à temps partiel qui ont la qualité d'agent public, entraient donc dans le champ de cette exonération de l'impôt sur le revenu, alors même qu'ils ne sont pas régis par la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ; qu'ainsi, les indemnités forfaitaires pour travail additionnel qui ont été versées par le centre hospitalier du Forez à M. C...constituaient des éléments de rémunération relevant de l'exonération prévue par l'article 81 quater du code général des impôts ;

6. Considérant qu'en appel, l'administration fiscale fait valoir que les documents produits par M.C..., qui ne permettent pas de connaitre le nombre exact d'heures complémentaires ou supplémentaires effectuées à ce titre par mois civil ou à la fin de chaque cycle, ne répondent pas aux exigences de l'article 2 du décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007, ce qui ferait obstacle à la décharge des impositions ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007 susvisé : " L'exonération fiscale et la réduction de cotisations salariales de sécurité sociale des éléments de rémunération prévus à l'article précédent sont subordonnées : (...) / - à l'établissement par l'employeur d'un document, qui peut être établi sur support dématérialisé, indiquant par mois civil - ou, pour les agents dont le cycle de travail excède un mois, à la fin de chaque cycle - et pour chaque salarié, le nombre d'heures supplémentaires ou complémentaires effectuées au sens de l'article 1er du présent décret et la rémunération y afférente. Le récapitulatif mentionné à l'article D. 241-25 du code de la sécurité sociale doit également être tenu à disposition par l'employeur. " ; que, s'agissant des praticiens hospitaliers, l'article 2 de l'arrêté du 30 avril 2003 susvisé, alors applicable, prévoit que : " A.-Les activités médicales et pharmaceutiques sont organisées en demi-journées ou par dérogation en heures dans des structures à temps médical continu. " ; que l'article 4 du même arrêté indique : " Les praticiens hospitaliers, (...) peuvent, sur la base du volontariat, assurer des périodes de temps de travail additionnel au-delà de leurs obligations de service dans les conditions fixées par leurs statuts respectifs. (...) Le décompte du temps de travail additionnel n'intervient qu'à l'issue de chaque période de référence de quatre mois, après que la réalisation de la totalité des obligations de service hebdomadaires effectuées, en moyenne, sur cette même période aura été constatée au vu du tableau de service. " ; que l'article 13 de cet arrêté prévoit le montant des indemnités forfaitaires pour toute période de temps de travail additionnel accompli, de jour et de nuit, sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service hebdomadaires ; qu'il résulte de la lecture combinée de ces dispositions et des dispositions précitées de l'article 81 quater du code général des impôts que, pour les praticiens hospitaliers, l'exonération fiscale est subordonnée à l'établissement par l'employeur d'un document permettant de déterminer, à défaut du nombre d'heures supplémentaires ou complémentaires, le nombre de plages de travail additionnel réalisées ainsi que la rémunération y afférente ; qu'en l'espèce, et alors que le décret n° 2007-1430 n'avait pas expressément visé les praticiens hospitaliers et que les attestations ont dû être produites a posteriori par les centres hospitaliers, la circonstance que ce document ne comprendrait pas le détail par mois, ou par période de référence, du nombre d'heures réalisées ou du nombre de plages de travail additionnelles effectuées est sans incidence sur l'exonération de ces sommes lorsqu'il n'existe pas de contestation sur la réalité de la réalisation de ces heures et sur leur caractère supplémentaire ;

8. Considérant que M. C...a produit, pour la première fois en appel, une attestation du 31 janvier 2014 du directeur du centre hospitalier du Forez attestant qu'il a perçu " 2 487,23 euros net imposable " au titre du temps de travail additionnel qu'il a réalisé sur l'année 2008, correspondant à 31 demi-journées et " 4 871,42 euros net imposable " de rémunération de temps de travail additionnel sur l'année 2010, correspondant à 56 demi-journées ; qu'en l'absence de contestation sur la réalité de l'accomplissement de ces temps de travail additionnel, ces différentes attestations sont suffisantes au regard des exigences prévues à l'article 2 du décret n° 2007-1430 du 4 octobre 2007 ;

9. Considérant qu'il s'ensuit qu'au titre des revenus perçus en 2008 et en 2010, les sommes versées par le centre hospitalier du Forez correspondant aux rémunérations perçues au titre des indemnités forfaitaires pour tout temps de travail additionnel accompli, sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service hebdomadaires, devaient être exonérées de l'impôt sur le revenu au titre de ces années en application du 5° du I et du 3° du II de l'article 81 quater précité ; que les bases de l'impôt sur le revenu de M. C...doivent être réduites de 2 487,23 euros au titre de l'année 2008 et de 4 871,42 euros au titre de l'année 2010 ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M.C... et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon n° 1205748 en date du 14 janvier 2014 est annulé.

Article 2 : Les bases de l'impôt sur le revenu assigné à M. C...sont réduites de 2 487,23 euros au titre de l'année 2008 et de 4 871,42 euros au titre de l'année 2010.

Article 3 : M. C...est déchargé du montant de l'impôt sur le revenu correspondant aux réductions en base prononcées à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : L'Etat versera à M. C... la somme de 1 500 euros que demande M. C...au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié M. B...C...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2015, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Bouissac, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 juin 2015.

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