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11/06/2015 | FRANCE | N°14LY03577

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 11 juin 2015, 14LY03577


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2014 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligée à quitter le territoire sans délai à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre dans lequel elle établit être légalement admissible et a assorti cette obligation d'une interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans.

Par le jugement n° 1404363 du 28 octobre 2014, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté attaqué et a enjoint au préfet de l'

Isère de réexaminer la situation administrative de Mme B...dans le délai d'un mo...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 16 juillet 2014 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligée à quitter le territoire sans délai à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre dans lequel elle établit être légalement admissible et a assorti cette obligation d'une interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans.

Par le jugement n° 1404363 du 28 octobre 2014, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté attaqué et a enjoint au préfet de l'Isère de réexaminer la situation administrative de Mme B...dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, après remise d'une autorisation provisoire de séjour dans les meilleurs délais.

Par une requête enregistrée le 18 novembre 2014, le préfet de l'Isère demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 28 octobre 2014 ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par MmeB....

Le préfet soutient que c'est à tort que les premiers juges ont annulé sa décision pour méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par une ordonnance du 20 janvier 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 5 février 2015.

Par une ordonnance du 9 février 2015, la clôture d'instruction a été reportée au 25 février 2015.

Par une ordonnance du 8 avril 2015, la clôture d'instruction a été reportée au 27 avril 2015.

Par un mémoire enregistré le 27 avril 2015, Mme B...conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois et à ce que soit mise à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve, pour MeD..., de renoncer à percevoir la somme correspondante à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle.

Mme B...soutient que :

- la décision est insuffisamment motivée et méconnaît le droit d'être entendu ;

- l'obligation de quitter le territoire et l'interdiction de retour sont contraires aux articles 3 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur de fait en indiquant que M. C...n'a aucun droit au séjour ;

- il a également commis une erreur manifeste d'appréciation.

Par une ordonnance du 28 avril 2015, la clôture d'instruction a été reportée au 7 mai 2015.

Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 18 mars 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu, au cours de l'audience publique du 13 mai 2015, le rapport de Mme Gondouin, rapporteur.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante géorgienne née en 1988, est entrée en France selon ses propres déclarations en juillet 2012, avec son compagnon M. C... et leur fille alors âgée de neuf mois ; que leur demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA puis par la Cour nationale du droit d'asile ; que le préfet de l'Isère a refusé de leur délivrer un titre de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que M.C..., qui avait déposé une demande de titre sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est vu opposer un refus, assorti d'une nouvelle obligation de quitter le territoire, par un arrêté du 24 janvier 2014 ; que le Tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions par un jugement du 4 juillet 2014 ; que le préfet de l'Isère a fait obligation à Mme B...de quitter le territoire sans délai avec interdiction d'y revenir pendant deux ans, par un arrêté du 16 juillet 2014 que le tribunal administratif de Grenoble a annulé par son jugement du 28 octobre 2014 ; que le préfet de l'Isère relève appel de ce dernier jugement ;

Sur les conclusions du préfet de l'Isère :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que le refus de titre de séjour pris par le préfet de l'Isère à l'encontre du compagnon de Mme B...a été annulé par le Tribunal administratif de Grenoble dans son jugement du 4 juillet 2014, au motif qu'eu égard à l'état de santé de l'intéressé et à l'absence de traitement approprié en Géorgie, cette décision méconnaissait le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le jugement du 4 juillet 2014, qui enjoignait en outre au préfet de l'Isère de délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " à M.C..., a été confirmé par l'ordonnance n° 14LY02356 du 11 décembre 2014 du président de la Cour administrative d'appel de Lyon ; que le préfet ne soutient ni même n'allègue que Mme B...et M.C... n'auraient plus de vie commune alors qu'ils ressort au contraire des pièces du dossier qu'ils vivent ensemble à Grenoble avec leurs deux filles Anna et Sofia nées respectivement en octobre 2011 et en mai 2014 ; que, dès lors, la mesure d'éloignement prise à l'encontre de Mme B...méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Isère n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 16 juillet 2014 ;

Sur les conclusions de MmeB... :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt " ; que le présent arrêt qui rejette la requête du préfet de l'Isère dirigée contre le jugement du Tribunal administratif de Grenoble qui a annulé l'arrêté du 16 juillet 2014 par lequel il a obligé Mme B...à quitter le territoire sans délai à destination de son pays ou de tout autre dans lequel elle établit être légalement admissible et assorti cette obligation d'une interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans, n'implique par lui-même aucune mesure d'exécution, sans préjudice de l'obligation pour le préfet de l'Isère d'exécuter l'injonction prononcée par le jugement attaqué ;

6. Considérant, en second lieu, que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros à verser à MeD..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de l'Isère est rejetée.

Article 2 : L'État versera à Me D...la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour elle de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet de l'Isère et à Mme A...B....

Délibéré après l'audience du 13 mai 2015 où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- Mme Gondouin et MmeE..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 11 juin 2015.

Le rapporteur

G. GondouinLe président

J- P. Wyss

La greffière,

M.-T. Pillet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 14LY03577


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03577
Date de la décision : 11/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCHURMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-06-11;14ly03577 ?
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