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26/06/2014 | FRANCE | N°12LY20807

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 26 juin 2014, 12LY20807


Vu l'ordonnance n° 373441 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de l'affaire n° 12MA00807 ;

Vu la requête, enregistrée le 25 février 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. B...A..., domicilié ... ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103485 du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande

tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2011, par lequel le préfet du Ga...

Vu l'ordonnance n° 373441 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, attribué à la Cour administrative d'appel de Lyon le jugement de l'affaire n° 12MA00807 ;

Vu la requête, enregistrée le 25 février 2012 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour M. B...A..., domicilié ... ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103485 du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2011, par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ledit arrêté du 17 octobre 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Gard de lui délivrer une carte de séjour temporaire lui ouvrant droit au travail dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 196 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- qu'elle est entachée d'un vice de procédure dans la mesure où, en méconnaissance des articles L. 312-2 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'a pas saisi la commission du titre de séjour préalablement à son refus ;

- qu'elle méconnaît l'article 313-11 7° dudit code et viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où il justifie d'une vie privée et familiale sur le territoire français ; qu'en effet, il y réside habituellement depuis 2001 et établit résider à Uzès depuis 2004 ; que tous les membres de sa famille, français ou titulaires de carte de résident, résident sur le territoire français, à l'exception de son frère Mohamed, commerçant, qui réside en Espagne ; que sa mère est invalide à 80 % ; que son père est décédé en 2003 ; qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine et que la maison familiale a été vendue en 2004 ; que, depuis cette année là, il réside sur le territoire français sans avoir connaissance du caractère falsifié de sa carte de séjour ; qu'il travaille depuis 2008 dans une exploitation agricole dont le patron promet de l'embaucher en cas de régularisation de sa situation administrative ; qu'un chef d'entreprise lui a proposé un poste de menuisier ; que le maire d'Uzès attestait en 2008 des bonnes moeurs et de l'intégration de sa famille ; que, pour les mêmes motifs, la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- qu'elle est illégale par voie d'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- qu'elle viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où elle éloigne une personne qui vit et travaille en France depuis dix ans et qui a basé sa vie privée et familiale sur le territoire français ; qu'elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation eu égard aux graves conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;

Vu l'arrêté et le jugement attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2014, présenté par le préfet du Gard qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

Sur le refus de titre de séjour :

- qu'il y a lieu de procéder à une substitution de base légale au profit de l'article 3 de l'accord franco marocain ;

- que la commission du titre de séjour n'avait pas à être consultée puisque le requérant ne relève pas des dispositions des articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne peut attester de la durée de son séjour depuis 2001 ; que, célibataire, sans charge de famille et n'étant pas isolé dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de quarante ans, il ne peut prétendre à un titre de plein droit sur la base de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui est pas applicable et qu'il n'est titulaire ni d'un visa de long séjour ni d'un contrat de travail visé tel que le prévoit l'article 3 de l'accord franco marocain ;

- que l'arrêté ne méconnaît ni l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. A...est célibataire et sans charge de famille, qu'il ne peut démontrer sa présence continue depuis 2001, qu'il ne démontre pas que sa présence serait indispensable auprès de sa mère malade, ni qu'une tierce personne ne pourrait y pourvoir, qu'il n'établit pas être isolé au Maroc, qu'il ne peut revendiquer son insertion sur le territoire alors que celle-ci s'est faite sous couvert d'un titre de séjour falsifié et qu'il avait connaissance du caractère irrégulier de sa situation ; que, pour les mêmes motifs, le refus n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire :

- que cette décision n'est pas illégale par voie d'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés à l'égard du refus de titre, cette décision ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu l'ordonnance en date du 8 avril 2014 fixant la clôture d'instruction au 23 avril 2014 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord du 9 octobre 1987 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application des articles L. 732-1 et R. 732-1-1 du code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2014 :

- le rapport de Mme Bourion, premier conseiller ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant marocain né en 1968, déclare être entré en France en 2001, sans visa ; qu'après qu'il ait été interpellé dans le cadre d'une enquête pour infraction à la législation sur les étrangers, faux et usage de faux, le préfet du Gard a pris à son encontre un arrêté de reconduite à la frontière le 18 mars 2011, annulé par le Tribunal administratif de Nîmes le 21 mars 2011 ; qu'il a déposé le 10 juin 2011 une demande d'admission exceptionnelle au séjour par le travail ; que M. A...relève appel du jugement du 26 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2011 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

Sur décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que M. A...fait valoir qu'il est entré en France en 2001 pour rendre visite à son père malade, décédé en 2003, que sa présence est indispensable à sa mère, malade, que ses frères et soeurs, dont certains sont de nationalité française, résident tous en France, à l'exception d'un seul et qu'il travaille depuis 2008 ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A...ne justifie d'une activité salariée saisonnière au titre des années 2004 à 2011 que sous couvert d'un titre de séjour falsifié, qu'il n'établit pas être dépourvu de tout lien familial dans son pays d'origine où il y a vécu jusqu'à près de quarante ans, qu'il est célibataire et sans enfant et que, si la santé de sa mère requiert l'assistance d'une tierce personne, il ne justifie pas que sa présence serait indispensable à ses côtés, alors qu'il n'est pas contesté que ses trois frères et soeurs qui résident en France sont en mesure de l'assister ; qu'il n'est dès lors pas fondé à revendiquer une insertion familiale et professionnelle en France ; que, par suite, la décision attaquée ne méconnaît ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Gard aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

4. Considérant, en deuxième lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d' asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ; qu'en l'espèce et ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. A...ne justifie pas entrer effectivement dans le champ d'application du 7° de l'article L. 313-11 ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ; que M. A... ne justifie pas résider habituellement en France depuis plus de dix ans ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant, en premier lieu, que les conclusions d'annulation dirigées contre la décision portant refus de séjour ayant été rejetées, M. A...ne saurait se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision pour soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale ;

7. Considérant, en second et dernier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux précédemment développés à l'encontre du refus de titre de séjour, le préfet du Gard n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni commis une erreur manifeste d'appréciation en obligeant M. A...à quitter le territoire français ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 octobre 2011, par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office ; que ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2014, à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Bourion, premier conseiller.

Lu en audience publique le 26 juin 2014.

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N° 12LY20807

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Isabelle BOURION
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : CHABBERT MASSON

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 26/06/2014
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12LY20807
Numéro NOR : CETATEXT000029441420 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-06-26;12ly20807 ?
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