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19/06/2014 | FRANCE | N°13LY00241

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 19 juin 2014, 13LY00241


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 janvier 2013, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) Etablissements Billebault, dont le siège est 1 rue Jolin à la Celle-sur-Loire (58440) ;

La SARL Etablissements Billebault demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200352 du 27 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit d'impôt en faveur des métiers d'arts d'un montant de 36 867 euros au titre de l'année 2008, de 32 639 euros au titre de l'année 2009 et d

e 26 726 euros au titre de l'année 2010 ;

2°) de prononcer le remboursement de...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 24 janvier 2013, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) Etablissements Billebault, dont le siège est 1 rue Jolin à la Celle-sur-Loire (58440) ;

La SARL Etablissements Billebault demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200352 du 27 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit d'impôt en faveur des métiers d'arts d'un montant de 36 867 euros au titre de l'année 2008, de 32 639 euros au titre de l'année 2009 et de 26 726 euros au titre de l'année 2010 ;

2°) de prononcer le remboursement de ce crédit d'impôt ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle remplit les conditions d'octroi du crédit d'impôt en faveur des métiers d'arts instauré par l'article 244 quater O du code général des impôts ; qu'en effet, les moulures et encadrements qu'elle réalise sont des pièces uniques et originales qui se distinguent, de par leur apparence et leur fonctionnalité, des objets industriels ou artisanaux existants ; que la réalisation de ces objets haut de gamme s'effectue de façon artisanale, notamment par la mise en oeuvre de la technique du vernis au tampon, et requiert d'importants travaux de mise au point ; qu'elle a été amenée à constituer une vaste bibliothèque d'outils et de moulures adaptés aux contraintes particulières de chaque commande, afin de réaliser des moulures et encadrements de tous styles et innovants ; que sa clientèle, issue du monde de l'art et des grands créateurs, attache une importance particulière à l'esthétisme et au renouveau perpétuel de ses cadres réalisés sur mesure et destinés à des oeuvres artistiques uniques ; qu'ainsi, les produits qu'elle conçoit et fabrique doivent être qualifiés de nouveaux produits au sens du 1° du I. de l'article 244 quater O ainsi que de l'article 49 septies ZL de l'annexe III ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre de l'économie et des finances fait valoir :

- qu'eu égard à l'objet de son activité, la SARL Etablissements Billebault n'entre pas dans le champ d'application du crédit d'impôt ; qu'en effet, s'agissant du 1° du III de l'article 244 quater O du code général des impôts, elle employait plus de dix salariés et n'avait pas, par conséquent, la qualité d'artisan ; que, s'agissant du 2° du même III, la société ne réalisait pas seulement des " objets décoratifs en bois ", mais aussi des " bois profilés ", produits non visés par l'arrêté du 14 juin 2006 ; que la proportion de moulures éligibles au crédit d'impôt sur ce fondement n'est pas justifiée ; que, s'agissant du 3° dudit III, la SARL ne détient pas le label " entreprise du commerce vivant " ;

- que les moulures réalisées par la SARL Etablissements Billebault ne se distinguent pas, par leur apparence et leur fonctionnalité, des objets industriels ou artisanaux existants et ne peuvent, par suite, être qualifiées de nouveaux produits au sens de l'article 49 septies ZL de l'annexe III au code général des impôts ; que la création au cours des années en litige d'outils spécifiques n'est pas établie ; qu'aucun amortissement correspondant à de telles immobilisations n'a d'ailleurs été passé sur le fondement du 2° du I. de l'article 244 quater O ; que la technique du vernis au tampon n'est pas nouvelle ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 septembre 2013, présenté pour la SARL Etablissements Billebault, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

La SARL Etablissements Billebault soutient, en outre :

- que, bien qu'employant plus de dix salariés, elle demeure inscrite à la chambre des métiers et de l'artisanat et conserve, dès lors, sa qualité d'artisan ;

- qu'elle conçoit bien de nouveaux produits et a créé pour cela des outils spécifiques, notamment en 2009 ; que l'importance des travaux de mise au point est attestée par les cadres réalisés, par exemple, pour Karl Lagerfeld et pour le Musée de la marine ; que si la technique du vernis au tampon est très ancienne, elle permet néanmoins, suivant ses modalités d'application, de créer des effets nouveaux et n'est, en outre, maîtrisée par aucun autre fabricant français ; qu'elle réalise des " articles décoratifs en bois ", et notamment du " bois marqueté ou incrusté ", mais en aucun cas des " bois profilés " au sens de la nomenclature d'activités française ;

- que le bénéfice du crédit d'impôt en faveur des métiers d'art n'est subordonné à aucune condition de " quantum " ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 décembre 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Le ministre de l'économie et des finances fait valoir, en outre :

- qu'en admettant même que la SARL Etablissements Billebault ait la qualité d'artisan, la fabrication de moulures ne peut ouvrir droit au crédit d'impôt, l'arrêté du 12 décembre 2005 ne visant que les métiers de marqueteur et de vernisseur ; que la société ne justifie pas de la proportion de moulures en bois marqueté de conception nouvelle ;

- qu'il n'est pas démontré que les cadres destinés à Karl Lagerfeld et au Musée de la marine auraient été réalisés au cours des années en litige ; que ni la conception sur mesure ni le recours à des outils spécifiques ne permettent, à eux seuls, d'établir que les produits réalisés se distinguent de ceux déjà existants ;

- que le bénéfice du crédit d'impôt sur le fondement du 1° du III. de l'article 244 quater O est subordonné à la condition que les salariés qui exercent un métier d'art représentent au moins 30 % de la masse salariale totale ; qu'en l'espèce, aucun salarié n'est directement chargé de la conception de nouveaux produits et aucun ingénieur ou technicien de production ne réalise des prototypes ou des échantillons non vendus ; qu'en tout état de cause, la SARL n'a pas distingué le montant des dépenses de personnel afférentes à la conception de nouveaux produits de celui des dépenses afférentes aux opérations de fabrication ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu l'arrêté du 12 décembre 2003 fixant la liste des métiers de l'artisanat d'art ;

Vu l'arrêté du 14 juin 2006 fixant la liste des nomenclatures des activités industrielles et des produits éligibles au crédit d'impôt mentionné à l'article 244 quater O du code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2014 :

- le rapport de M. Meillier, conseiller ;

- et les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public ;

1. Considérant que la SARL Etablissements Billebault, qui a pour objet social la " fabrication d'objets divers en bois, fabrication d'objets en liège, vannerie et sparterie ", a sollicité, par réclamation en date du 16 novembre 2011, le remboursement d'un crédit d'impôt en faveur des métiers d'arts d'un montant de 36 867 euros au titre de l'année 2008, de 32 639 euros au titre de l'année 2009 et de 26 726 euros au titre de l'année 2010 ; que, par décision du 16 décembre 2011, le directeur des services fiscaux de la Nièvre a rejeté cette réclamation ; que, par jugement du 27 novembre 2012, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de la société tendant au remboursement de ce crédit d'impôt ; que la SARL Etablissements Billebault relève appel de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin de remboursement :

2. Considérant qu'il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au terme de son instruction et compte tenu des différents éléments produits par les parties, si un contribuable remplit ou non les conditions auxquelles est subordonné le bénéfice d'un crédit d'impôt ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 244 quater O du code général des impôts, dans sa version alors applicable : " I.-Les entreprises mentionnées au III et imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 decies et 44 undecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 10 % de la somme : / 1° Des salaires et charges sociales afférents aux salariés directement chargés de la conception de nouveaux produits dans un des secteurs ou métiers mentionnés au III et aux ingénieurs et techniciens de production chargés de la réalisation de prototypes ou d'échantillons non vendus ; / (...) 5° Des autres dépenses de fonctionnement exposées à raison des opérations de conception de nouveaux produits et à la réalisation de prototypes ; ces dépenses sont fixées forfaitairement à 75 % des dépenses de personnel mentionnées au 1° ; / (...) III.- Les entreprises pouvant bénéficier du crédit d'impôt mentionné au I sont : / 1° Les entreprises dont les charges de personnel afférentes aux salariés qui exercent un des métiers d'art énumérés dans un arrêté du ministre chargé des petites et moyennes entreprises représentent au moins 30 % de la masse salariale totale ; / 2° Les entreprises industrielles des secteurs de l'horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie, de l'orfèvrerie, de la lunetterie, des arts de la table, du jouet, de la facture instrumentale et de l'ameublement ; les nomenclatures des activités et des produits concernés sont définies par arrêté du ministre chargé de l'industrie (...) " ; qu'aux termes de l'article 49 septies ZL de l'annexe III au même code, alors en vigueur : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater O du code général des impôts, les opérations de conception de nouveaux produits s'entendent des travaux portant sur la mise au point de produits ou gamme de produits qui, par leur apparence caractérisée en particulier par leurs lignes, contours, couleurs, matériaux, forme, texture, ou par leur fonctionnalité, se distinguent des objets industriels ou artisanaux existants ou des séries ou collections précédentes " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que pour bénéficier du crédit d'impôt prévu en faveur des métiers d'art, un contribuable doit, notamment, concevoir des nouveaux produits, soit des produits qui, par leur apparence ou par leur fonctionnalité, se distinguent des objets industriels ou artisanaux existants ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas contesté, que la SARL Etablissements Billebault s'est spécialisée dans la réalisation de moulures pour l'encadrement et en particulier dans le placage de filets de marqueterie et les moulures vernies selon la technique du " vernis au tampon " ; que sa clientèle est composée essentiellement de musées, de galeries d'art, de petites entreprises d'encadrement, de créateurs et de grandes maisons du secteur du luxe ; que les moulures et encadrements qu'elle produit sont conçus sur mesure en fonction des contraintes et exigences de chaque commande, à partir d'une bibliothèque de moulures et d'outils parfois réalisés spécifiquement, le cas échéant après avoir réalisé des prototypes ; qu'ainsi, ses produits peuvent être qualifiés de pièces uniques et originales ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment des photographies produites, que les cadres et moulures qu'elle commercialise se distingueraient, par leur apparence caractérisée en particulier par leurs lignes, contours, couleurs, matériaux, forme, texture, ou par leur fonctionnalité, des objets industriels ou artisanaux existants, et notamment de ceux qu'elle-même ou d'autres entreprises ont déjà réalisés ; qu'à cet égard, le seul fait de concevoir et de fabriquer des produits sur mesure, après un long travail de mise au point, en mettant en oeuvre un savoir-faire exigeant et en recourant à des méthodes artisanales et anciennes telles que la technique du " vernis au tampon " qu'aucun autre fabricant français n'utiliserait, ne saurait suffire à caractériser l'existence de nouveaux produits ; que, dans ces conditions, et quand bien même sa clientèle attacherait une importance particulière à l'esthétisme et à l'originalité de ses cadres, la SARL Etablissements Billebault ne peut être regardée comme concevant des nouveaux produits au sens des dispositions précitées du 1° du I. de l'article 244 quater O du code général des impôts et de l'article 49 septies ZL de l'annexe III à ce code ; que dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner si, eu égard aux métiers exercés par ses salariés et à l'objet de son activité, la société requérante est au nombre des entreprises visées au 1° ou au 2° du III de l'article 244 quater O et susceptibles de bénéficier du crédit d'impôt, elle ne remplissait pas les conditions auxquelles était subordonné, au titre des années en litige, le bénéfice du crédit d'impôt institué en faveur des métiers d'arts ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Etablissements Billebault n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions relatives aux frais exposés et non compris dans les dépens :

7. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la SARL Etablissements Billebault doivent, dès lors, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Etablissements Billebault est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Etablissements Billebault et au ministre de des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2014, à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président assesseur,

M. Meillier, conseiller.

Lu en audience publique, le 19 juin 2014.

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N° 13LY00241


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00241
Date de la décision : 19/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Charles MEILLIER
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : SELARL N.O.A. ORESTEIN DE COUESSIN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2014-06-19;13ly00241 ?
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